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Union Européenne : clause de défense mutuelle (27 02 2025)

Nous vous proposons aujourd’hui cette note publiée le 6 février 2025 sur le site Vie-publique (cliquer ici pour accéder au site Vie-publique)

https://www.vie-publique.fr/questions-reponses/297150-quest-ce-que-la-clause-de-defense-mutuelle-de-lunion-europeenne.html

La clause de défense mutuelle de l'Union européenne en 5 questions

Publié le 6 février 2025

La clause de défense mutuelle est un dispositif instauré par le traité sur l'Union européenne (TUE), qui renforce la solidarité des États membres en cas d'agression armée de l'un d'entre eux. Comment cette clause fonctionne-t-elle ? Comment se déclenche-t-elle ? Les réponses de Vie publique en cinq questions.

1 Qu'est-ce que la clause de défense mutuelle ?

2 Quelle peut-être la nature de l'assistance apportée dans le cadre de la clause de défense mutuelle ?

3 Existe-t-il des clauses similaires à la clause de défense mutuelle ?

4 Pourquoi la France a-t-elle invoqué la clause de défense mutuelle après les attentats de novembre 2015 ?

5 La clause de défense mutuelle s'applique-t-elle à l'espace ?

 

Qu'est-ce que la clause de défense mutuelle ?

 

La clause de défense mutuelle est définie par l'article 42 § 7 du traité sur l'Union européenne (TUE) : "Au cas où un État membre serait l'objet d'une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l'article 51 de la charte des Nations unies. Cela n'affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres."

L'article 51 de la charte des Nations unies prévoit une exception à l'interdiction de l'emploi de la force par un pays, mentionnée par son article 2. C'est le droit de légitime défense, individuelle ou collective, qui peut être exercé en cas d'agression armée.

La clause de défense mutuelle prévoit donc, dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune (PSCD) européenne et conformément au doit de légitime défense, une obligation d'assistance portée à un État membre par les autres États membres en cas d'agression armée sur son territoire.

Quelle peut-être la nature de l'assistance apportée dans le cadre de la clause de défense mutuelle ?

L'article 42 § 7 ne prévoit pas expressément d'assistance de nature militaire, aucune procédure formelle n'est prévue. Chaque État membre est libre de se conformer à sa politique de sécurité et de défense nationale.

Cela n'affecte donc pas la neutralité de certains États membres, comme l'Autriche, ou leur appartenance à l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN). L'article 42 du TUE précise que la coopération des États membres dans le cadre de la PSCD demeure conforme à leurs engagements souscrits au sein de l'OTAN, qui reste, pour les États qui en sont membres, "le fondement de leur défense collective et l'instance de sa mise en œuvre".

La neutralité de certains États membres a pu évoluer, puisque la Finlande et la Suède, à la suite de la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine, ont rejoint l'OTAN respectivement en 2023 et en 2024.

Existe-t-il des clauses similaires à la clause de défense mutuelle ?

Il existe deux autres clauses similaires à la clause de défense mutuelle que peuvent choisir les États membres de l'UE, le cas échéant :

  • La clause de solidarité, introduite par l'article 222 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), offre aux États membres et à l'UE la possibilité d'actions conjointes "si un État membre est l'objet d'une attaque terroriste ou la victime d'une catastrophe naturelle ou d'origine humaine". Les autorités politiques d'un État membre peuvent demander aux autres États membres, coordonnés au sein du Conseil, qu'ils lui portent assistance. Les modalités de mise en œuvre de la clause de solidarité sont définies par une décision adoptée par le Conseil, sur proposition conjointe de la Commission et du haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Lorsque cette décision a des implications dans le domaine de la défense, le Conseil statue à l'unanimité. Le Parlement européen est informé. La clause de solidarité complète la clause de défense mutuelle.
  • Le principe d'assistance, introduit par l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord, est essentiellement une clause de nature militaire : "Les parties conviennent qu'une attaque armée contre l'une ou plusieurs d'entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d'elles, dans l'exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l'article 51 de la charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d'accord avec les autres parties, telle action qu'elle jugera nécessaire, y compris l'emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l'Atlantique Nord."

Pourquoi la France a-t-elle invoqué la clause de défense mutuelle après les attentats de novembre 2015 ?

À la suite des attaques terroristes du 13 novembre 2015la France a invoqué, pour la première fois, la clause de défense mutuelle de l'article 42 § 7 du TUE.

Pourquoi, à la suite des attaques de novembre 2015, la France a-t-elle invoqué la clause de défense mutuelle et non pas l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord ou l'article 222 du TFUE, qui semblait correspondre à la situation ?

Invoquer la clause de défense mutuelle en 2015 est avant tout un acte politique. Selon le ministre de la défense de l'époque, Jean-Yves Le Drian, cela permettait d'"invoquer la nécessité du renforcement de l'Europe de la défense", tout en marquant une autonomie européenne vis-à-vis des États-Unis. La France a donc choisi un instrument de l'Union plutôt que de l'OTAN.

Par ailleurs, invoquer l'article 42 §7 du TUE a permis à la France de contrôler le processus, notamment son engagement militaire en Syrie et en Irak. Invoquer l'article 222 du TFUE aurait exigé le déclenchement de procédures européennes plus lourdes, requérant l'unanimité. Par ailleurs, le Conseil (ou l'OTAN si l'art. 5 précité avait été invoqué) aurait eu à coordonner les interventions.

Une proposition de résolution du Sénat de 2016 explicite la position de la France mais aussi de certains États membres, sans les nommer :

  • la faculté de recourir à l'article 5 du traité créant l'Alliance atlantique "aurait pu aboutir à une implication, politiquement délicate, de l'OTAN dans les frappes aériennes en Syrie et en Irak. Elle fut, après hésitation de certains États, abandonnée" ;
  • le recours à la clause de solidarité de l'article 222 du TFUE était également concevable, "mais elle eût entraîné une implication des institution européennes non souhaitée par certains États membres".

À la suite des attaques terroristes de novembre 2015, la France a opté pour une solution intergouvernementale, permise par la clause de défense mutuelle.

La réponse des autres États membres s'est traduite en solidarité, exprimée lors du Conseil des affaires étrangères du 17 novembre 2015. Les ministres de la défense des 27 "ont exprimé leur soutien plein et unanime à la France et leur volonté de fournir toute l'aide et l'assistance nécessaires".

La clause de défense mutuelle s'applique-t-elle à l'espace ?

Le 29 janvier 2025, lors de la 17e Conférence européenne sur l'espace, Kaja Kallas, la haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-présidente de la Commission européenne, a déclaré que la clause de défense mutuelle pourrait aussi s'appliquer si un État membre était victime d'une attaque agression armée dans l'espace, entre autres sur une infrastructure. L'article 42 § 7 du TUE dispose que la clause de défense mutuelle s'applique "au cas où un État membre serait l'objet d'une agression armée sur son territoire".

La question d'une frontière entre l'espace aérien souverain des États et l'espace est complexe. Selon un rapport du ministère des armées de 2019, l'espace n'est pas délimité faute de consensus. Il existe une zone litigieuse située entre 80 kilomètres et 120 kilomètres au-dessus du niveau de la mer. La France, à l'instar des puissances spatiales, n'estime pas opportun de définir et délimiter l'espace.

Les satellites européens sont de plus en plus souvent victimes de cyberattaques. Cela correspond à l'émergence de nouvelles menaces (cyber, entre autres), dans de nouveaux espaces stratégiques. Les États membres de l'UE, dans le cadre de la PSCD, peuvent être amenés à faire évoluer leur définition de ce qu'est une agression armée, face aux nouvelles menaces, et notamment sur l'aide et l'assistance à apporter, si la clause de défense mutuelle est invoquée.

 

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