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Fabriqué en France (18 08 2025)

Nous vous proposons aujourd’hui cette synthèse d’un rapport publié le 16 juin 2025 sur le site du Sénat (cliquer ici pour accéder au site du Sénat)

 

https://www.senat.fr/notice-rapport/2024/r24-754-notice.html

cliquer ci-dessous pour accéder à la synthèse du rapport (sous pdf)

https://www.senat.fr/rap/r24-754/r24-754-syn.pdf

 

Rapport d’information ”FABRIQUÉ EN FRANCE”, la Compétitivité Patriotique, présenté par Franck MENONVILLE et Anne-Marie NÉDÉLEC, sénateurs

 

Alors que l’immense majorité des consommateurs français déclarent vouloir acheter des produits fabriqués en France, ils les considèrent trop chers, de qualité insuffisante et jugent l’offre ”France” illisible.  Pour autant, la délégation aux Entreprises n’est pas actuellement favorable au marquage obligatoire de l’origine, qui ferait supporter aux entreprises une charge supplémentaire. Cette perspective pourrait être reconsidérée après la mise en place du passeport numérique des produits et une étude d’impact à l’échelle européenne démontrant son coût quasi-nul pour les entreprises. La délégation considère en revanche prioritaire de lutter contre la contrefaçon et le dumping des importations de produits à bas coût qui menacent les savoir-faire traditionnels et tout produit fabriqué en France. 

 

  1. LE FABRIQUÉ EN FRANCE, UNE RESSOURCE À MIEUX EXPLOITER

 

Avec 23 %, ce motif d’achat arrive loin derrière le prix (80 %), la qualité (73 %) et la durée de vie (41 %). Par ailleurs, 75 % des Français attendent des entreprises qu’elles s’engagent en matière de patriotisme économique.

Le fabriqué en France est aujourd’hui perçu comme une réponse concrète pour préserver les emplois locaux, soutenir l’économie nationale, répondre aux enjeux de souveraineté nationale, garantir des produits de meilleure qualité et mieux tracés. Les préoccupations environnementales expliquent l’intérêt grandissant pour le fabriqué en France. Cependant, la crise du pouvoir d’achat freine la demande de ”fabriqué en France”.

 

Le ”fabriqué en France”, un concept célébré

 Symbolisant la qualité et le savoir-faire artisanal à l’origine, le fabriqué en France est devenu un symbole d'authenticité et de tradition et incarne, dans la mondialisation, la qualité, la durabilité et le maintien d'un savoir-faire français.  Initiatives privées et publiques valorisent l’origine française des produits. Ainsi la dernière édition (novembre 2024) du salon du ”made in France », créé en 2012, a regroupé 1 000 exposants et attiré 110 000 visiteurs. Un ”parcours des savoir-faire français” a été organisé par l’État à l’occasion des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en octobre 2024. Le Palais de l’Élysée a accueilli la 4e édition de la ”grande exposition du fabriqué en France” avec 112 produits français, sélectionnés parmi 2 452 produits candidats.

 

  1. LE FLOU DU FABRIQUÉ EN FRANCE POUR LES CONSOMMATEURS COMME POUR LES ACTEURS ÉCONOMIQUES

 

Le fabriqué en France, une notion complexe à appréhender

Un produit importé peut être qualifié de ”fabriqué en France”. Comme le reconnaît la Direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) : ”le recours aux règles douanières, basées sur la notion de dernière transformation substantielle, est effectivement parfois critiqué pour son manque de clarté ou d’ambition à l’égard du « Fabriqué en France” car le respect de ces règles ne signifie pas que le produit est 100 % français (c’est-à-dire qu’il a été fabriqué en France uniquement avec des matières françaises)”. Il peut donc y avoir confusion pour le consommateur qui, en lisant « Fabriqué en France » ou « origine France », peut croire que le produit est 100 % français. En matière non alimentaire, l'utilisation des couleurs du drapeau français n'est pas interdite. Son utilisation peut être en revanche considérée comme une pratique commerciale trompeuse si les produits ou services ne sont pas français.

 

Une forte suspicion sur le fabriqué en France  35% des consommateurs seulement déclarent ne pas être convaincus que les produits sont vraiment fabriqués en France ,  45%  déplorent le manque de visibilité des produits français

 

De trop nombreux labels publics et privés qui désorientent le consommateur L’imagination marketing est sans limite pour utiliser des allégations connexes faisant croire qu’un produit est français : ”Conçu en France”, ”Création Française ”, ”Collection Française”, ”Savoir-faire français”, ”Design français”, ”Conditionné en France”, ”Imprimé en France”, ”Inventé en France”, quand il ne s’agit pas de l’utilisation abusive du drapeau français. La tromperie sur le ”fabriqué en France” pénalise les entreprises françaises à hauteur de 5 milliards d’euros, faisant perdre des dizaines de milliers d’emplois. Les 92 labels et certifications publics et privés entretiennent une grande confusion chez les consommateurs.

 

Des contrôles trop peu nombreux 

 

Si 22 millions de produits contrefaits ont été saisis en 2024 en France, l’Italie déclare en avoir bloqué 800 millions. Les contrôleurs de la Garde des finances italienne sont quatre fois plus nombreux que les effectifs des douanes françaises (68 000 contre 16 500) et dotés d’outils juridiques plus efficaces. L’OCDE a estimé la valeur des importations de contrefaçons dans l'Union européenne en 2021 à environ 100 milliards d'euros, soit 4,7 % des importations de l'UE. Selon, une étude de la Fédération européenne des industries du jouet, 95 % des articles achetés sur Temu et testés étaient dangereux pour les enfants. Plus récemment, la Fédération finlandaise du commerce a analysé 14 produits vendus sur cette plateforme et aucun d’entre eux ne respectait les normes européennes de sécurité et de conformité.

 

Pourtant, les contrôles demeurent anecdotiques sur le plan quantitatif : en 2024, 1 200 établissements ont été contrôlés pour un taux d’anomalie de 15 %...  … et un contrôle récent des douanes par sondage de produits expédiés de la Chine en avion-cargo a révélé que 97 % du contenu n’était pas conforme à la législation européenne, en matière de sécurité des produits notamment !

 

  1. UNE CONJUGAISON D’ÉLÉMENTS HANDICAPANT LE FABRIQUÉ EN FRANCE

 

Une réglementation européenne qui considère l’indication de l’origine comme une « mesure d’effet équivalent » à une « restriction quantitative à l’importation ». Pourtant, l’information sur la provenance d’un produit n’est pas un obstacle mais une condition de la concurrence pour le consommateur. Une désindustrialisation massive qui empêche une offre adéquate. La part de l’industrie manufacturière dans le PIB est de 11 % au plus. L’offre de produits français s’est donc rétrécie à proportion de la désindustrialisation et des délocalisations. 

 

De nouveaux comportements de consommation. Les jeunes générations sont moins attachées à l’origine des produits qu’ils achètent. En matière de luxe, le ”dupe” est même une contrefaçon recherchée, très populaire chez les jeunes, dont le pouvoir d’achat est plus faible.

 

La révolution du e-commerce (8,4 milliards d’euros en 2005 de chiffre d’affaires mais 175 milliards en 2025) a élargi la brèche du « francolavage » avec un flux ininterrompu de contrefaçons proposées sur les réseaux sociaux et places de marchés. Ce « tsunami » de produits à bas coûts se traduit par 1,5 milliard de colis livrés en France, dont 800 millions sont des articles de moins de 150 euros, exemptés de droit de douane et bénéficiant d’un tarif postal préférentiel. En effet, la Chine, 2e puissance économique mondiale, est toujours considérée comme un pays en développement par l’Union postale universelle…

 

La lutte contre la contrefaçon doit être modernisée et renforcée. La France est le pays dont les entreprises sont les plus touchées par la contrefaçon, après les États-Unis, et devant l’Italie. En 2024, 21,5 millions de produits contrefaits ont été saisis, soit quatre fois plus en cinq ans. Réseaux sociaux et places de marché proposent un flux ininterrompu de contrefaçons. Les contrefaçons chinoises représentent 85 % des saisies mondiales en ligne et 51 % des saisies de ventes mondiales hors ligne. La contrefaçon s’est globalisée, industrialisée et criminalisée à grande échelle. Notre droit peine à s’adapter à des acteurs plus agiles et plus puissants.

 

  1. UNE COMMANDE PUBLIQUE QUI NE PROMEUT PAS SUFFISAMMENT LE FABRIQUÉ EN FRANCE

 

Sur le site de l’UGAP, la part de produits d’origine française ne représente que 1 % des références proposées aux acheteurs publics (10 000 sur 1 million). 

 

Avec un volume de près de 170 milliards €, pour plus de 243 000 contrats passés, la commande publique occupe une place essentielle dans l’économie nationale (8 % du PIB). Le fabriqué en France est le ”trou noir” de la commande publique. Le potentiel supplémentaire des achats de produits fabriqués en France est estimé à 15 milliards €, soit près de 1/5 du déficit commercial de 2024. Si 25 % des marchés publics étaient réservés aux produits français, cela représenterait 50 milliards € par an d’achats français. L’achat local est toutefois indirectement favorisé grâce à la prise en considération des caractéristiques environnementales des offres et la promotion des achats auprès des PME.

 

Les handicaps de l’achat français dans la commande publique sont nombreux :

  La préférence locale n’est pas admise par l’Union européenne ;

  La mesure de la part importée dans notre commande publique est totalement déficiente ;

 La commande publique est éclatée entre 60 centrales d’achats publics (dont la plus importante est l’UGAP avec un chiffre d’affaires de 5,6 milliards d’euros) et 135 000 pouvoirs adjudicateurs (30 000 en Allemagne, 3 500 en Italie) ;

 La France pénalise le délit de favoritisme applicable à l’ensemble de la commande publique, conduisant les acheteurs publics à une lecture excessivement prudente des règles ;

 La moitié des marchés publics en volume est passée sous le seuil de mise en concurrence de 40 000 € HT. Dans ce cas, l’acheteur public est libre : il peut se fournir sur les plateformes du e-commerce sans se préoccuper d’acheter français ;

  Le point faible de la commande publique est l’inexistence des contrôles des engagements des attributaires de marchés publics, notamment en matière environnementale et sociale au niveau national. 

 

  1. CINQ AXES D’ACTIONS POUR VALORISER L’ATOUT DU FABRIQUÉ EN FRANCE

 

Axe 1 - Mieux identifier le fabriqué en France

  1. Définir le fabriqué en France comme un produit dont la majorité de la valeur ajoutée a été créée sur le territoire national et non plus comme la dernière transformation substantielle
  2. Maintenir le caractère facultatif du marquage de l’origine de fabrication des produits non alimentaires
  3. Regrouper progressivement les labels publics et privés sous un label unique ”fabriqué en France”
  4. Réserver aux produits dont la majorité de la valeur est ajoutée en France, l’exclusivité de l’apposition du drapeau français, et considérer que le fait d’apposer ou de faire apparaître un drapeau français sur un produit vendu en France qui n’est pas fabriqué sur le territoire national est interdit et constitue une pratique trompeuse
  5. Créer une plateforme en ligne unique exclusivement réservée aux produits ”fabriqués en France”
  6. Rendre obligatoire au niveau européen le marquage de l’origine de production des produits importés et commercialisés dans l’Union européenne
  7. Confier aux comités stratégiques de filières l’élaboration d’une stratégie industrielle de relocalisation, en donnant la priorité aux produits identifiés comme en situation de vulnérabilité d’approvisionnement, avec la création de zones franches ayant une fiscalité allégée

 

 Axe 2 – Rétablir une concurrence libre et non faussée

  1. Étendre aux produits industriels le principe des clauses miroirs afin d’appliquer aux produits importés les mêmes règles environnementales et sociales
  2. Saisir l’Autorité de la concurrence, en application de l’article L. 461-2 du code de commerce, du sujet des reventes à perte de la part des plateformes de commerce en ligne, notamment chinoises
  3. Demander à l’Union européenne de lancer une procédure antidumping contre les plateformes de commerce en ligne chinoises et d’enquêter sur des subventions octroyées par des pays non membres de l’UE à des entreprises actives sur son territoire, afin de rétablir une concurrence loyale entre les produits importés des pays tiers et les produits fabriqués dans l'Union européenne
  4. Refonder la politique concurrentielle européenne afin d’intégrer la nouvelle stratégie industrielle de l’Union européenne de réduction de la dépendance dans des domaines stratégiques
  5. Mettre en œuvre rapidement l’amendement du Sénat qui soumet à un minimum de droits de douanes tout colis extra-communautaire de moins de 150 euros et de moins de 2 kilos
  6. Étendre la taxe carbone (mécanisme d'ajustement carbone aux frontières) aux produits de consommation courante

 

Axe 3 – Renforcer les contrôles sur le fabriqué en France

  1. Réorienter les contrôles de la DGCCRF et des Douanes vers le commerce en ligne extra-communautaire, en priorisant le contrôle de la sécurité des consommateurs
  2. Sensibiliser les places de marché (marketplace) à la mise en avant du ”fabriqué en France”, notamment à l’occasion du ”Black Friday”, et au déréférencement des entreprises qui fraudent sur l’origine des produits (”francolavage”)
  3. Assimiler la contrefaçon à une non-conformité du produit, dans le cadre de l’application du règlement relatif à un marché unique des services numériques (DSA) et du règlement sur les marchés numériques (DMA)
  4. Créer une amende délictuelle forfaitaire en cas de fraude sur une allégation de produit fabriqué en France, pour les vendeurs comme pour les acheteurs
  5. Autoriser le blocage des sites « miroirs » afin de lutter contre la multiplication des pages du web proposant des contrefaçons
  6. Augmenter les moyens de la DGCCRF et des Douanes en étendant leur compétence en matière de police judiciaire afin de mieux lutter contre le « francolavage »
  7. Faire de la contrefaçon une priorité de l’Office européen de lutte anti-fraude, rendre compétent le Parquet européen, renforcer la coopération douanière notamment avec la Belgique et les Pays-Bas

 

Axe 4 – Mobiliser la commande publique au service du fabriqué en France

  1. Diviser par dix le nombre de pouvoirs adjudicateurs (actuellement 135 000), en les mutualisant
  2. Mesurer la part importée de la commande publique
  3. Imposer les appels d’offre hors taxe pour les marchés dans lesquels peuvent se présenter des entreprises extra-communautaires
  4. Assurer un contrôle des engagements sociaux et environnementaux pris par les entreprises ayant remporté un marché public
  5. Faire du critère bas-carbone un levier en faveur des circuits d’approvisionnements territoriaux courts
  6. Transférer la tutelle de l’UGAP au ministère de l’Industrie

 

Axe 5 – Informer et davantage responsabiliser le consommateur

  1. Informer, par des campagnes régulières de sensibilisation, le consommateur des conséquences sur leur santé et leur sécurité, sur l’impact social et environnemental (conditions sociales de production inacceptables, bilan carbone désastreux) des produits importés
  2. Stigmatiser et dénoncer les entreprises qui pratiquent le « francolavage »

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