Nous vous proposons aujourd’hui cette note publiée le 25 mars 2025 sur le site du Conseil Economique, Social et Environnemental (cliquer ici pour accéder au site du CESE)
https://www.lecese.fr/actualites/pour-un-numerique-en-sante-souverain-de-confiance-et-inclusif
Pour un numérique en santé souverain, de confiance et inclusif
par MM Majid EL JARROUDI ET Gérard RAYMOND
Publiée le 25/03/2025
Le numérique en santé est déjà une réalité, comme le montrent le recours massif aux plateformes de rendez-vous, le développement du partage de documents médicaux et de la télémédecine. Parallèlement, la place de l’intelligence artificielle (IA), déjà très présente dans la radiologie, la biologie médicale, l’oncologie ou l’ophtalmologie, se renforce.
Dans cet avis, le CESE identifie des priorités pour mettre le numérique au service de l'amélioration de notre système de santé.
Les données de santé sont au centre des enjeux
Il n’y aura ni numérique, ni intelligence artificielle de qualité, sans données de qualité, sécurisées et maîtrisées démocratiquement.
La France, pionnière sur ce sujet (base de données, cadre juridique...) s’est dotée d’une feuille de route du numérique en santé 2023-2027 construite autour d’objectifs partagés.
Aujourd’hui, le numérique en santé se structure autour :
De ”services socles” (dont l’application Mon espace santé est l’élément le plus emblématique) ;
D’une régulation (avec le rôle central de l’Agence du numérique en santé) ;
D’une organisation de l’accès à la donnée de santé pour la recherche (à travers la Plateforme des données de santé, Health Data Hub) ;
Mais aussi d’un programme d’investissements (le ”Ségur du numérique”) pour soutenir la transformation digitale de tout le secteur.
”Il n’y aura pas d’IA de qualité sans données de qualité, protégées et maîtrisées démocratiquement. La confiance des citoyens, le respect du droit qui fixe les conditions du recueil et du partage de leurs données de santé sont des impératifs”, expliquent les rapporteurs, Majid El Jarroudi et Gérard Raymond.
Le numérique en santé au service de l’amélioration de la qualité des soins et de la prévention
Notre système de santé est en crise : pour le CESE, il faut avant tout recruter et renforcer la relation humaine de proximité avec les usagers. Le numérique et l’IA ne permettront pas, à eux seuls, de répondre à toutes les difficultés, mais ils peuvent contribuer à l’amélioration de l’accès aux soins, au renforcement de la prévention, et à une plus grande qualité du soin.
- 78% des Français ont eu recours à des plateformes en ligne pour la prise de rendez-vous médicaux en 2023 (contre 25 % en 2018).
- Entre 2020 et 2024, plus de 65 millions de téléconsultations ont été facturées.
Les enjeux sont aussi ceux de la recherche : notre capacité à faire du partage et de l’utilisation des données des outils au service de l’amélioration de la santé, et en particulier de la prévention, dépend des investissements qui seront réalisés dans la qualité des données. Pour le CESE, il ne peut y avoir une IA performante sans des données fiables et complètes.
Le CESE identifie plusieurs priorités pour faire du numérique une chance pour améliorer notre système de santé et remet 13 préconisations concrètes pour y parvenir. Chacune repose sur trois principes transversaux :
Principe de la confiance : pour un numérique en santé coconstruit avec patients et professionnels de santé et qui garantisse à chacun le droit de décider en connaissance de cause de l’usage de ses données personnelles de santé ;
Numérique au service de l’humain : pour un numérique en santé qui libère du temps au service de la qualité du soin et de la prévention ;
Principe de la souveraineté, française et européenne : pour un numérique en santé sous le contrôle des pouvoirs publics nationaux et européens et au service de la politique de santé pour tous.
Comment mettre le numérique au service de l’amélioration de notre système de santé ?
Le CESE s'est interrogé sur les moyens de faire du numérique, des données de santé, et, surtout, de l'IA, des leviers d'amélioration réels de notre système de santé et contribuer au renforcement de la recherche, à l'amélioration de la prévention, à la réduction des inégalités dans l'accès aux soins.
Garantir la souveraineté française et européenne sur les données de santé
Dans un contexte de tension internationale autour du digital, le numérique en santé doit rester sous la responsabilité et le contrôle des pouvoirs publics et garantir l’application du droit de l’Union européenne aux données de santé.
→ Que recommande le CESE ? Garantir l’hébergement des données de santé sur un cloud souverain européen ou français et y organiser la migration de la Plateforme des données de santé d’ici la fin 2025 ; accorder une place centrale au numérique et à l’IA en santé dans les financements européens pour permettre l’émergence de champions continentaux.
Réunir les conditions de la confiance des usagers dans le partage de leurs données de santé
Les données des patients sont la matière première du numérique et de l’IA. Il faut réunir les conditions de confiance dans leur recueil et leur traitement pour favoriser leur partage et leur valorisation au service de toutes et tous.
→ Que recommande le CESE ? Faire de Mon espace santé la porte d’entrée unique avec une information claire sur le cadre juridique applicable aux données de santé et sur les projets de recherche menés sur la base de ces données ; développer de nouvelles fonctionnalités, comme un système de prise de rendez-vous, pour répondre aux besoins.
Lutter contre les risques d’exclusion numérique et mieux accompagner les citoyens
Les inégalités d’accès au numérique ne doivent pas s’ajouter aux inégalités déjà existantes : inégalités sociales et dans l’accès aux soins. Le risque serait alors que le numérique aggrave les fractures. C’est pourquoi une alternative au numérique doit toujours exister et une attention particulière doit être portée aux publics les plus éloignés du numérique. Le numérique doit être au service du public.
→ Que recommande le CESE ? Lutter prioritairement contre les difficultés d’accès au numérique qui entravent l’effectivité des droits en accompagnant les usagers dans la maitrise des nouveaux outils ; organiser au moment de la délivrance de la carte vitale à 16 ans, et dans le cadre d’une information plus générale sur l’Assurance maladie, un accompagnement à l’ouverture de Mon espace santé.
Accompagner l’évolution des métiers et en créer de nouveaux
L’introduction des outils numériques dans le système de santé impacte considérablement les pratiques professionnelles et l’organisation des soins : cette évolution n’a pas été assez anticipée.
→ Que recommande le CESE ? Coconstruire, avec les professionnels, les évolutions des pratiques et des métiers ; imposer, dans le cadre des négociations conventionnelles avec l’Assurance maladie, l’enrichissement systématique de Mon espace santé.