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Douleur : évaluation de la prise en charge (1/2) (30 05 2011)

Début de la Synthèse du rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en mars 2011 sur le site du HCSP (cliquer ici pour accéder au site du HCSP ou au rapport complet version pdf)

http://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?ae=avisrapportsdomaine&clefdomaine=6&clefr=211&ar=a&menu=09

http://www.hcsp.fr/docspdf/avisrapports/hcspr20110315_evaldouleur20062010.pdf

 

Évaluation du plan d’amélioration de la prise en charge de la douleur 2006 – 2010

Synthèse

Le HCSP a été saisi le 7 mai 2010 par le ministère chargé de la santé pour mener l’évaluation du plan douleur 2006-2010. Un comite d’évaluation a été constitué, compose de 2 membres du HCSP, de 5 personnalités extérieures et de 3 personnes du secrétariat général du HCSP. La mission a travaillé par auditions : 35 personnes ont été auditionnées et 16 personnes ont remis des contributions écrites.

Le niveau et les modalités de réalisation des 25 mesures du plan déclinant ses 4 priorités ont dans un premier temps été étudiés. La mission a ensuite réalisé une évaluation générale de la structuration et du déroulement du plan et a conclu sur une série de recommandations pouvant servir de base à la construction dun nouveau plan douleur. A lissue du travail dévaluation, les constats et appréciations suivants peuvent être énoncés.

Priorité 1 : Améliorer la prise en charge des douleurs des populations les plus vulnérables

Enfants et adolescents

L’élaboration de recommandations sur le bon usage des médicaments de la douleur chez lenfant réalisée par lAgence francaise de sécurite sanitaire et des produits de santé (Afssaps) est une avancée importante. Cest un document de référence pour guider les professionnels dans leur pratique quotidienne. Toutefois, ces recommandations mériteraient dêtre mieux diffusées auprès des professionnels de santé.

De gros efforts ont été faits dans la prise en charge et la prévention des douleurs aigües, en particulier liées aux soins. Mais il persiste de vraies difficultés pour accéder à des avis spécialisés dans la prise en charge de la douleur chronique, qui ne se limite pas au cancer (céphalées, rhumatologie, douleur neuropathique, handicap moteur) : le nombre de spécialistes et de structures spécialisées est très inférieur aux besoins, avec un accès très insuffisant aux techniques non pharmacologiques, en particulier psychocomportementales. Lutilisation en pédiatrie des médicaments existants en médecine adulte reste à développer, alors même que pour certains de ces médicaments lautorisation de mise sur le marché (AMM) pédiatrique existe dans dautres pays, mais pas en France.

Linformation aux familles et aux enfants doit être plus largement diffusée. Enfin, dune manière générale, limpact des mesures prévues par les plans douleur sur la douleur des patients est insuffisamment mesuré, incitant à développer des études épidémiologiques.

Personnes âgées

Un état des lieux sur la prise en charge de la douleur des personnes âgées a été réalisé, mais antérieurement au plan et sa diffusion, limitée au milieu gériatrique, reste insuffisante.

Un effort très important a été mené en matière de formation des soignants dans une logique systémique pour améliorer le repérage et la prise en charge de la douleur, la prescription de psychotropes, pour favoriser la bientraitance et mieux prendre en compte la souffrance psychique des personnes âgées, et enfin pour sensibiliser le personnel des institutions gériatriques à la démarche palliative. Le dispositif mis en place repose en grande partie sur le projet Mobiqual, via la création et la diffusion de kits de formation de formateurs. Les évaluations disponibles sont réalisées par les promoteurs du projet sur la base des retours de questionnaires remplis par les professionnels ayant utilisé les kits. Etant donné lambition du projet et son montant financier (1 million €), une évaluation indépendante et professionnelle aurait été hautement souhaitable. Il nen reste pas moins quun effort réel a été fait pour diffuser des recommandations et créer une « culture douleur ». Leffort a été très centré sur les institutions gériatriques et très peu a été fait pour les personnes âgées vivant à domicile ; or 90 % des personnes de plus de 75 ans vivent à domicile et une personne sur deux se plaint de douleur. Des formations destinées aux médecins généralistes et soignants intervenant à domicile (infirmières, kinésithérapeutes), voire aux aides de vie, sont indispensables pour une meilleure utilisation des antalgiques, une connaissance de liatrogénèse et une utilisation des techniques non médicamenteuses.

Autres personnes vulnérables : handicap et psychiatrie

Les handicapés et personnes atteintes de maladies mentales ont été les oubliés du plan. Très peu de mesures ont concerné les premiers, aucune les seconds, alors que ces populations sont très concernées par la douleur : dans une enquête récente du centre antidouleur de lhôpital St Jean de Dieu à Lyon « un jour donné », 60 % des 245 patients hospitalisés se plaignent de douleur et seuls 14 % ont été évalués par un soignant. Un travail sur le type dinstrument de mesure adapté aux différentes pathologies psychiâtriques est indispensable.

Priorité 2 : Formation

Des avancées pour lamélioration des formations pratiques initiale et continue des professionnels de santé sont à porter au crédit du plan douleur 2006-2010 (Diplôme détudes spécialisées complémentaires (DESC) « médecine de la douleur, médecine palliative », nouveaux diplômes universitaires ou diplômes interuniversitaires (DIU) spécialisés, évaluation des pratiques professionnelles). Leur impact est tempéré par les limites qui persistent en termes de débouchés hospitaliers et de conditions dexercice en ville des spécialistes de la douleur, à la différence du secteur des soins palliatifs. Il faut souligner quil reste encore beaucoup à faire dans ce domaine, ce dautant plus que le cadre des formations évolue : réforme des cursus d'enseignement supérieur en vue de lharmonisation avec les cursus européens (dite « réforme Licence-Master-Doctorat ou LMD ») et développement professionnel continu. Les formations entrent dorénavant dans une logique dacquisitions des compétences professionnelles sollicitant les étudiants ou les professionnels pour quils apprennent à agir en situation clinique. Les centres antidouleur doivent améliorer la communication avec la médecine de ville (consultations durgence, télétransmission, liaison Internet, etc) et, plus globalement, mieux expliquer la démarche de prise en charge pluridisciplinaire et pluridimensionnelle.

Priorité 3 : Améliorer les modalités de traitement médicamenteux et dutilisation des méthodes non pharmacologiques pour une prise en charge de qualité

Incontestablement, un effort a été fait en matière de recommandations de bonnes pratiques professionnelles concernant les douleurs induites par les actes médicaux chez lenfant (2009) et la douleur rebelle en situation palliative avancée chez ladulte, avec lutilisation à domicile de certaines molécules en réserve hospitalière (2010). Deux études épidémiologiques denvergure réalisées par le Centre National de Ressources de Lutte contre la Douleur (CNRD) (étude EPIPPAIN de prévalence des soins douloureux et stressants et des traitements antalgiques administrés en réanimation néonatale et pédiatrique en Ile-de-France, et étude REGARDS de prévalence des Actes Ressentis comme Douloureux et Stressants en gériatrie), bien que nétant pas intégrées dans le plan, apportent des contributions importantes pour la mise en oeuvre dactions destinées à limiter les douleurs liées aux soins.

Par contre, les connaissances concernant les méthodes non pharmacologiques ont peu progressé et les obstacles au développement des thérapies non médicamenteuses restent nombreux sans véritable volonté politique de vouloir surmonter lobstacle principal que représentent les conditions de rémunération imposées par lAssurance Maladie aux professionnels non médicaux. Il reste actuellement de fortes difficultés dévaluation de techniques comme lostéopathie, lauriculothérapie, lart thérapie, les groupes de parole dans la prise en charge de la douleur chronique et des études comme celles financées par le 3e plan (neurostimulation transcutanée pour les lombalgiques et relaxation dans la migraine) sont à encourager.

Priorité 4 : Structurer la filière de soins de la douleur

La structuration territoriale et lorganisation de la lutte contre la douleur chronique rebelle se sont heurtées à un manque de moyens et dimpulsion politique et à labsence de cadrage. A lissue du plan, le constat est plutôt celui dune fragilisation des structures antidouleur. Certains centres ont perdu du personnel sous la pression de restructurations hospitalières, dautres ne se sont jamais vu attribuer leur crédits alors que ceux-ci ont été délégués aux établissements. Laccès aux structures de prise en charge de la douleur chronique rebelle nen a été que plus difficile ; les délais dattente sont longs. La mise à jour du cahier des charges des centres antidouleur a pris beaucoup de retard. Ce document devait être publié en 2011.

Par ailleurs, une limite de ce plan est son approche très « hospitalo-centrée », axée en grande partie sur la structuration des centres de douleur chronique rebelle. Le soutien à la médecine de ville na concerné que le maintien des rares réseaux ville-hopital existants. En dehors dune tentative de développement doutils de formation en milieu gériatrique, aucune réflexion na eu lieu pour impliquer de manière plus importante la médecine de premier recours. Les réseaux, malgre tout lintérêt que lon peut leur porter, sont restés expérimentaux. Ils ne touchent quun très faible nombre de professionnels et très peu de malades. La prise en charge psychologique reste le parent pauvre.

Seule embellie, lexigence sur la qualité de la prise en charge hospitalière, portée par la Haute autorité de sante (HAS), semble porter ses fruits. Laccréditation puis la certification, en retenant la douleur comme une des pratiques exigibles prioritaires, donnent un appui certain aux Comités de lutte contre la douleur (CLUD) et aux soignants investis dans la prise en charge de la douleur. Les indicateurs pour l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins en établissements de sante (IPAQSS) permettent de situer les efforts en matière dévaluation de la douleur, et le suivi de la douleur lorsque celle-ci a été identifiée. Les évaluations des pratiques professionnelles, notamment à travers les audits ou les staffs en réunion de concertation pluridisciplinaire, sont des outils prometteurs pour créer une dynamique et montrer aux équipes que leur mobilisation est payante. …/… (suite et fin demain sur ce blog)

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