http://www.hcsp.fr/docspdf/avisrapports/hcspr20110315_evaldouleur20062010.pdf
Appréciation générale
Le comite d’évaluation a réparti les mesures du plan en 2 catégories : les mesures visant à améliorer les conditions de prise en charge de la douleur (formation, élaborations de recommandations, études épidémiologiques) et les mesures concernant plus directement l’amélioration de la prise en charge de la douleur proprement dite (structures, personnels, médicaments ou techniques antalgiques, etc). La plupart des avancées ont porté sur la première catégorie de mesures.
Sur le plan financier, 21,4 millions € (sur les 26,7 millions € prévus) ont été engagés. Il n’y pas eu de soutien à la création de nouveaux réseaux. Il n’a pas été possible d’établir si les crédits visant à financer la mise en place du groupe homogène de séjour (GHS) douleur ont été utilisés, au regard de la faible incitation liée au codage. Il s’avère que les sommes inscrites au titre du plan, mais financées par des crédits « ordinaires » de l’Assurance.
Selon les données financières transmises via le système informatique « ARBUST MIGAC » par les agences régionales d’hospitalisation (ARH) à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS), le flux financier associé à la douleur est passé de 51,7 millions d’Euros en 2006 à 62,6 millions en 2009, soit une progression de 10,9 millions d’Euros. Avec ces chiffres, ne peut-on pas prétendre que la prise en charge de la douleur a été financée bien au-delà de ce que le programme national prévoyait, dans la mesure où les dotations des structures ont augmenté pendant la durée du programme ? Pourtant, en termes de ressources humaines, les témoignages émanant du terrain font plutôt état de la diminution des postes que de la création d’emplois, ce qui laisse penser (sous réserve d’un bilan réel de l’utilisation des crédits) que cet argent a probablement été utilisé à d’autres fins au sein des établissements de santé.
On peut alors conclure que le 3e plan a eu un impact important sur le milieu professionnel hospitalier en termes d’animation ou d’encouragement à l’innovation, mais est passé à côté de son objectif d’amélioration de la prise en charge pour n’avoir pas assez pris en compte les contraintes exogènes que sont :
- L’organisation et le financement de l’hôpital public ;
- les limites des incitations en direction de l’industrie pharmaceutique pour développer des nouvelles formes galéniques d’antalgiques et demander des AMM ;
- le relatif isolement de la médecine libérale ;
- les conditions de rémunération imposées par l’assurance maladie aux professionnels médicaux et non médicaux : des expérimentations de prises en charge forfaitaires, décidées par les centres antidouleur, et qui incluraient la prise en charge libérale, permettraient le développement d’une filière de soins utile aux malades, la rémunération des psychologues et d’autres professionnels non médicaux, l’établissement d’un lien pédagogique entre soignants avec une plus grande disponibilité des centres antidouleur.
A l’issue des auditions, et au-delà des quelques recommandations déjà énoncées, découlant des objectifs et mesures du plan 2006-2010, il a paru intéressant à la mission de formuler une série de propositions pour la réalisation d’un nouveau plan autour de 4 principes et de 6 axes de recommandations :
- Principe 1 : consolider et approfondir les avancées des plans précédents, combler les lacunes ;
- Principe 2 : changer de paradigme (d’une prise en charge et d’un savoir hospitalo-centrés vers une offre et une organisation des soins de ville) : une offre de qualité à l’hôpital et en ville.
- Principe 3 : prêter une attention forte aux personnes « dyscommunicantes » : nouveau-nés et très jeunes enfants, malades en réanimation, malades atteints de pathologies psychiatriques, polyhandicapés, malades atteints de pathologies démentielles.;
- Principe 4 : élaborer et conduire le futur plan selon des objectifs explicites et des moyens proportionnés avec la mise en place d’une véritable fonction de pilotage.
Axe 1. La poursuite de la structuration de l’offre de soins, notamment en milieu de ville ;
Axe 2. La formation et la sensibilisation des professionnels de santé ;
Axe 3. L’information du public ;
Axe 4. L’attention aux enfants, adolescents, personnes âgées, handicapées et personnes souffrant de pathologies psychiatriques ;
Axe 5. L’amélioration des connaissances (épidémiologie, recherche clinique, évaluation d’impact) ;
Axe 6. L’amélioration de la gouvernance.
De fait, une attention particulière devra être portée au pilotage du plan, tant dans sa coordination que dans son suivi, avec :
- une coordination ministérielle associant la DGS, DGOS, la Direction de la sécurite sociale (DSS) et la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), de façon à ce que l’ensemble des dimensions soient prises en compte : politique, structurelle, financière et évaluative ;
- un comité de suivi activé, des groupes de travail sur chaque axe du plan ;
- la définition d’indicateurs de suivi, y compris financiers, pour chaque déclinaison du plan dès sa phase d’élaboration ;
- un rapport d’activité annuel rendu public.
C’est pourquoi le HCSP recommande l’élaboration d’un 4e plan douleur afin de donner un nouveau souffle aux actions entreprises et de s’assurer de la poursuite de l’engagement des pouvoirs publics dans ce champ. Le renforcement de l’exigence du public dans le domaine du soulagement de la douleur passe par une information large et régulière. Cette exigence est un déterminant majeur du changement des pratiques professionnelles. C’est un élément essentiel qui nécessite une volonté politique affichée au niveau ministériel.