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Fractures et Transitions : réconcilier la France (12 04 2019)

Nous proposons aujourd’hui une synthèse d’un rapport original et intéressant à nos yeux, celui de l’avis du Conseil économique, social et environnemental (Cese) publié le 12 mars 2019 sur le site de la Documentation Française (cliquer ici pour accéder au site de la Documentation Française)

https://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/194000249-fractures-et-transitions-reconcilier-la-france#book_sommaire.html

Texte intégral du rapport

https://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/194000249.pdf

FRACTURES ET TRANSITIONS : RÉCONCILIER LA FRANCE

Avis du Cese présenté par Michel Badré et Dominique Gillier

Synthèse de l’avis

Retrouver la confiance″ et ″faire nation solidaire″ : ce sont ces mots qui terminent la contribution au présent avis du groupe « citoyen », composé de 28 personnes, réuni par le Cese.

Le Cese fait siens ces deux objectifs, comme fil rouge de sa réponse aux quatre questions qu'il s'est posées, face à la situation que connaît la France depuis quelques mois :

- comment contribuer à résorber les fractures territoriales et sociales de notre pays ?

- comment accompagner la transition écologique ?

- comment améliorer le pouvoir d'achat et garantir plus de justice fiscale ?

- comment assurer la participation des citoyennes et citoyens à l'élaboration des décisions publiques ?

 

Il a préparé ses réponses avec humilité : conscient de l'étendue et de la complexité des questions posées, il ne prétend pas être exhaustif dans les solutions qu'il propose à la crise majeure que nous traversons.

Il l'a fait aussi avec le sens de sa responsabilité propre, en tant qu’assemblée de la société civile organisée : les corps intermédiaires, traits d'union entre la population et les pouvoirs publics, ont à exprimer une parole forte sur la situation de notre pays et sur des solutions envisageables.

Enfin et surtout, il a considéré que seules des actions portées par la volonté collective, dans la durée, pouvaient répondre à ces questions.

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La méthode suivie pour préparer cet avis ne se réduit pas à la simple juxtaposition des opinions de ses membres et du groupe de citoyennes et citoyens. Une commission temporaire constituée de représentantes et représentants de tous les groupes du Cese a été mise en place pour préparer le projet d'avis. Elle s'est appuyée sur plusieurs éléments :

- une plateforme de consultation, mise en place à la fin de 2018, à laquelle ont participé plus de 34 000 personnes ;

- une contribution de chacune des 12 formations de travail du Cese, dans leur domaine de spécialité ; les avis antérieurs du Cese ont aussi été repris dans ce cadre ;

 - un groupe citoyen de 28 personnes, choisies aléatoirement sur critères de représentativité, dont la contribution autonome est annexée au présent avis ; son travail, sur trois week-ends, et celui de la commission temporaire ont été reliés en permanence, cinq membres de chacune des deux formations participant aux travaux de l'autre ;

- les auditions et entretiens menés par la commission.

 

L’avis du Cese et la contribution du groupe citoyen diffèrent dans leur principe d'élaboration : le groupe citoyen exprime l’avis de ses membres, éclairés par leur expérience propre et s’exprimant ensemble ; l’avis du Cese est issu des travaux de la commission temporaire : intégrant, après examen avec lui, un grand nombre de propositions du groupe citoyen, il est l'expression des groupes qui constituent le Conseil, à partir de ses travaux passés et actuels, et au nom des organisations qui y sont représentées.

Cette démarche expérimentale et novatrice de travail en commun entre l'assemblée de la société civile organisée qu'est le Cese et un groupe citoyen choisi aléatoirement fera l'objet, dans les mois qui viennent, d'une évaluation scientifique par des spécialistes externes.

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L'état des lieux dressé dans l'avis confirme des points sensibles souvent relevés, notamment depuis quelques mois. La société française est traversée de lignes de faille profondes, entre les riches et les pauvres, entre les inclus et les exclus, entre ceux qui bénéficient d'un monde plus ouvert et ceux qui se sentent enfermés là où ils sont, entre ceux qui décident et ceux pour qui on décide. La situation des Outremer renforce tous les traits mesurés en métropole, et appelle des mesures encore plus déterminées.

De plus, des transitions très fortes sont en cours, démographique, économique, numérique, écologique, dessinant pour demain un monde entièrement nouveau et appellent des changements de fond. Ce que nous en ferons ensemble pourra résorber les fractures ou les agrandir.

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Les préconisations du Cese :   

 

 

Que faire ?

Le premier objectif, face aux questions de pouvoir d'achat et d'équité sociale posées par les fractures constatées, est de créer plus de richesses et de mieux les partager, pour répondre aux besoins sociaux et aux défis environnementaux présents et à venir. Pour ce qui relève de l'action publique, le Cese propose :

- de développer une éducation innovante source de création de richesses et réductrice d'inégalités sociales (Préconisation 1) ;

- de mettre en place un plan pluriannuel de soutien à l'industrie (Préconisation 2), pour enrayer la désindustrialisation, son impact sur les territoires et ses effets sociaux. Doté de moyens suffisants, ce plan devrait porter sur la recherche, l'innovation, les investissements stratégiques, la formation ;

 - de mieux partager les richesses, en améliorant le pouvoir d’achat (Préconisation 3) et la transparence des rémunérations des dirigeantes et dirigeants (Préconisation 4) ;

 - de refonder la fiscalité pour une meilleure progressivité, plus de solidarité, et la prise en compte des objectifs de développement durable (Préconisation 5).

 

Le second objectif proposé par le Cese, face aux enjeux de la transition écologique et aux fractures territoriales et sociales, est de définir des politiques publiques de développement qui soient à la fois durables et solidaires (Préconisation 6). Cet objectif doit irriguer toutes les politiques publiques, locales nationales ou européennes. Sans prétendre à l'exhaustivité, le Cese a examiné de plus près plusieurs domaines de l'action publique :

- les politiques d'énergie (Préconisation 6.1), de logement (Préconisation 6.2), de mobilité (Préconisation 6.3), d'agriculture et d'alimentation (Préconisations 6.4) : liées entre elles, ces politiques peuvent, et doivent, améliorer la vie quotidienne aussi bien que l'adaptation de notre société aux changements globaux. Des investissements importants sont à programmer, en particulier pour la rénovation thermique des logements et l'amélioration des moyens de transport, parmi lesquels les transports collectifs dans les zones mal desservies. Les actions territoriales de mise en œuvre de ces politiques, multiples et décentralisées, se programment dans le cadre de documents d'urbanisme ou d'aménagement du territoire à renforcer et unifier, selon des méthodes d'élaboration plus concertées (Préconisation 6.5) ;

- pour recréer du lien, l'amélioration des services au public : les recommandations du Cese portent sur le rappel des principes de base des services publics (Préconisation 7), une offre de soins adaptée à tous les âges et tous les territoires (Préconisation 8), un accès au numérique qui ouvre des possibilités nouvelles sans exclure personne (Préconisation 9), et un accès de proximité aux services publics du quotidien (Préconisation 10).

Comment le faire ?

Tous les sujets cités ci-dessus sont complexes et structurants. Ils demandent un engagement sur le long terme, et doivent être traités au niveau le plus adapté, du niveau communal au niveau européen. Beaucoup de ces décisions nécessiteront des études préalables importantes incluant leurs impacts économiques, sociaux et environnementaux ainsi que des arbitrages budgétaires.

Mais surtout, les mesures prises ne seront acceptées, et appliquées, que si les populations concernées peuvent participer à la définition de l'intérêt général, et à l’implication publique qu’il détermine. C'est donc le processus d'élaboration des décisions qui est déterminant pour rétablir la confiance, autant que les décisions elles-mêmes.

Tel est l'objet du pacte démocratique préconisé par le Cese. Il se fonde sur des éléments multiples.

- L'amélioration de la participation citoyenne aux décisions relève, pour partie, du débat institutionnel engagé depuis 2017 pour modifier la Constitution. La recherche d'un meilleur équilibre entre la démocratie représentative légitimée par l'élection, la représentation des corps intermédiaires et l'avis de citoyennes et citoyens choisis au hasard en fait partie. Le Cese propose qu'un débat institutionnel spécifique ait lieu sur ce point après le Grand débat national en cours : le Cese y apportera les résultats de l'expérience originale conduite pour élaborer le présent avis (Préconisation 11).

- Les bonnes décisions doivent s'appuyer sur des données fiables et publiques, et sur une participation active à leur préparation : l’extension à la plupart des décisions publiques, hors contraintes liées à la sécurité, des principes de la convention d'Aarhus portant sur ces sujets devrait, selon le Cese, être examinée (Préconisation 12).

- Le développement de bonnes pratiques d'expertise, de concertation et de gestion de controverse dans la conduite des projets publics nécessite d'étendre et diversifier les expériences de participation citoyenne, évaluées scientifiquement (Préconisation 13).

- La participation des parties prenantes au niveau communal doit reposer sur des projets de territoire co-construits et opposables, et être soutenue par des « ingénieurs du débat public » (Préconisation 14).

- Le rétablissement indispensable de la confiance entre les citoyennes et citoyens et l'Europe nécessite de refonder la subsidiarité entre les niveaux européen, national et local, et de renforcer les pouvoirs du Parlement européen (Préconisation 15).

- Un contrat social refondé passe par la participation des salariées et salariés aux décisions dans les instances de gouvernance de l’entreprise (Préconisation 16) et par la formalisation de l’expression des salariées et salariés sur le travail (Préconisation 17).

- Instance de représentation de la société civile organisée, le Cese se considère comme acteur des évolutions à conduire. Il est légitime pour renforcer l'expression des corps intermédiaires dans le débat démocratique. Il propose d’associer des personnes tirées au sort à l'élaboration de ses avis (Préconisation 18), d'instaurer un droit d'interpellation du Gouvernement et du Parlement (Préconisation 19) et d'organiser sa contribution régulière à l'évaluation des politiques publiques (Préconisation 20). Il pourra ainsi pleinement participer à l’évolution et à l‘approfondissement de la démocratie.

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Proposer un pacte productif, social et écologique, c'est accepter que toutes ses parties prenantes, individus, corps intermédiaires et pouvoirs publics, le fassent évoluer. C'est accepter aussi que sur des actions opérationnelles nombreuses et complexes les résultats concrets ne soient pas immédiats.

 Pour le Cese, c'est la qualité du processus collectif qui garantira un succès durable.

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