Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

projet loi lopsi (29 06 2008)

Fichiers, écoutes, pouvoir des juges : les points durs de la loi "sécurité intérieure" Article de M. Gérard Danet, lu le 24 juin 2008 sur le site du Monde http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/06/24/fichiers-ecoutes-pouvoir-des-juges-les-points-durs-de-la-loi-securite-interieure_1062178_3224.html

La préparation de la future loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Lopsi), que le gouvernement souhaiterait soumettre au conseil des ministres à l'automne, oppose deux camps. D'un côté, les tenants d'un arsenal judiciaire toujours plus développé, de l'autre, ceux qui reconnaissent l'efficacité des nouveaux instruments, mais s'inquiètent pour les libertés publiques. Trois chantiers prioritaires illustrent les crispations.

Le fichier Périclès. La direction de la gendarmerie nationale a fait procéder, depuis quelques mois, à de discrets essais liés à la mise en place d'un fichier informatique, dénommé "Périclès". Ce système d'analyse sérielle permet d'effectuer des rapprochements entre affaires et de lutter contre tout type de délinquance. Mais ce type de fichier contient de nombreuses données liées à la vie du citoyen : numéros de cartes grises, de permis de conduire, de puces de téléphone portable, factures, autant de détails qui ne figurent jamais dans les procédures judiciaires.

La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) n'a pas encore été saisie du dossier. Les gendarmes assurent, en mettant en avant onze garanties autour de Périclès, que cet arsenal demeurera sous contrôle judiciaire. Reste que dans la dernière version de la Lopsi, dont Le Monde a eu connaissance, on parle de "traitements automatisés de données à caractère personnel concernant toute infraction commise contre les personnes". Ces données ne seraient plus "collectées au cours de procédures judiciaires pénales", comme cela apparaissait dans le texte initial. Il faut voir là le résultat d'un intense lobbying des gendarmes. Dans un courrier daté du 3 juin adressé au ministère de l'intérieur, le général Guy Parayre, directeur général de la gendarmerie nationale, avait réclamé la suppression de cette mention qui, selon lui, conduisait "à priver de tout effet la réforme envisagée". Conclusion du général Parayre, au cas où sa missive ne serait pas suivie d'effet : "Il me paraît imprudent dans ces conditions d'exposer la ministre (Michèle Alliot-Marie) sur ce sujet sensible lors d'un débat parlementaire sans doute délicat, pour un résultat final qui ne procurera aucun progrès..." Manifestement, il a été entendu.

Les pouvoirs des juges.

Le secrétaire général de la défense nationale (SGDN), Francis Delon, milite pour limiter l'accès des juges d'instruction aux lieux de pouvoir tels que les ministères ou les services secrets. Si l'avis du SGDN est suivi, ce qui paraît être le cas, les perquisitions dans des lieux protégés ne seront plus possibles que sous certaines conditions. Le projet d'article est ainsi rédigé : "Lorsqu'un magistrat envisage de procéder à une perquisition dans des lieux classifiés ou abritant des secrets de la défense nationale, il remet à l'autorité administrative compétente une décision écrite et motivée indiquant la nature de l'infraction, (...) les raisons justifiant la perquisition et l'objet de celle-ci." L'effet de surprise disparaîtrait de fait. D'autant que l'autorité administrative est alors censée transmettre cette "décision" du juge au président de la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN), seul habilité à déclarer une " déclassification temporaire, totale ou partielle" du lieu visé par le magistrat. La perquisition, si elle est autorisée, se ferait alors en sa présence.

Par ailleurs, "les saisies et les mises sous scellés" ne pourraient " porter que sur des documents non classifiés ou déclassifiés". Seul le président de la CCSDN pourra prendre connaissance des "informations classifiées" et décider, ou non, de les transmettre au magistrat instructeur. Le ministère de l'intérieur ne souhaite pas inclure ces dispositions dans la future Lopsi.

Les "captations" informatiques et sonores.

La loi devrait permettre, à l'avenir, d'introduire dans les ordinateurs des citoyens un "cheval de Troie" informatique. Il sera possible, avec l'aval d'un juge, "sans le consentement des intéressés, d'accéder à des données informatiques, de les observer, les collecter, les enregistrer, les conserver et les transmettre, telles qu'elles s'affichent pour l'utilisateur ou telles qu'il les y introduit par saisie de caractère", et ce pendant une durée de quatre mois, renouvelable une fois. Le dispositif technique pourra être mis en place à toute heure, en s'introduisant dans tout lieu, ou via "la transmission par un réseau de communications électroniques".

Par ailleurs, les enquêteurs pourront plus facilement placer des micros afin d'intercepter les conversations.

Les commentaires sont fermés.