Article de M. Vincent Collen paru le 2 avril 2009 sur le site des Echos (cliquer ici pour accéder au site des Echos)
http://www.lesechos.fr/info/france/4849465-les-investissements-massifs-font-exploser-la-dette-des-hopitaux.htm?xtor=EPR-1001
Les hôpitaux ont investi 6,8 milliards d'euros l'an dernier, deux fois plus qu'en 2002. Mais leurs capacités d'autofinancement chutent et la dette a passé la barre des 20 milliards d'euros
Malgré une situation financière qui se dégrade, les hôpitaux continuent à investir massivement, ce qui se traduit par un recours de plus en plus important à l'endettement. C'est ce que montre la note de conjoncture de Dexia publiée hier. Les établissements de santé publics ont déboursé 6,8 milliards d'euros pour leurs investissements l'an dernier. Un montant record, deux fois plus élevé qu'en 2002.
C'est d'abord le fait du plan « Hôpital 2007 », lancé en 2003 par Jean-François Mattei pour moderniser les établissements, et qui arrive à échéance cette année, avec un peu de retard. « Sur les cinq années du plan, près de 5,5 milliards d'euros de crédits publics ont été dépensés, soit un peu plus de 70 % du total programmé », souligne la banque, premier financeur des hôpitaux français. Ces fonds, alloués par l'Etat, ont eu un effet d'entraînement, les hôpitaux ayant également investi sur leurs ressources propres pour accompagner ce plan.
Baisse du taux de vétusté
L'année 2008 « aura probablement été un pic » pour les investissements, estime Dominique Hoorens, directeur des études de la banque franco-belge. Les dépenses devraient ainsi repasser sous la barre des 6 milliards cette année. Elles resteraient ensuite à peu près à ce niveau au cours des quatre prochaines années. Car un nouveau programme, « Hôpital 2012 », lancé par Nicolas Sarkozy à son arrivée à l'Elysée, est en train de démarrer.
C'est une bonne nouvelle pour les patients et le personnel des hôpitaux. Le taux de vétusté des établissements, qui montait en flèche, « est redescendu à son niveau de 2000 ». Mais cette forte progression des investissements coïncide aussi avec une nette dégradation des comptes des établissements de santé.
Tarification à l'activité
Depuis dix ans, les charges augmentent plus vite que les recettes, pratiquement tous les ans. Conséquence, leur capacité d'autofinancement est en forte baisse : elle est passée de 3,5 milliards d'euros en 2004 à 2,2 milliards l'an dernier. La dégradation s'est accélérée en 2008 : - 25 %. La Fédération hospitalière de France évalue le déficit des hôpitaux à 800 millions d'euros, contre 479 millions en 2007. Cette mauvaise performance s'explique essentiellement par la montée en charge de la tarification à l'activité (T2A), un mécanisme qui vise à mettre en adéquation les moyens alloués aux établissements avec leur activité.
Faute de ressources suffisantes dégagées par leur activité, les hôpitaux ont donc eu massivement recours à l'endettement pour financer leurs investissements. La dette a pratiquement triplé en dix ans, passant la barre des 20 milliards en 2008. Elle est concentrée, aux deux tiers, dans les plus gros établissements, ceux dont le budget annuel dépasse les 70 millions d'euros.
« Ce mouvement était prévu lors de la mise en place du programme », rappelle Dominique Hoorens, qui souligne que les hôpitaux étaient jusqu'à présent peu endettés. Mais la Fédération hospitalière de France (FHF) tire la sonnette d'alarme : « Certains établissements se posent la question de refuser des crédits du plan Hôpital 2012 parce qu'ils n'ont pas les moyens de mobiliser leur part d'autofinancement. »
Dexia veut rassurer sur la capacité des hôpitaux à payer leurs frais financiers : « Ils n'ont pas de difficulté pour se financer », affirme Jean-Luc Guitard, directeur de l'ingénierie financière, car leur dette est garantie par l'Etat. Avec la crise, les banques étrangères ont certes « un peu disparu » de ce marché, mais les hôpitaux bénéficient en revanche de taux « qui n'ont jamais été aussi bas ».
10 milliards d'euros pour « Hôpital 2012 »
Le plan « Hôpital 2012 » prévoit 5 milliards d'euros d'aides de l'Etat, auxquels doivent s'ajouter 5 milliards en provenance des hôpitaux eux-mêmes.
Lancé l'an dernier, il sélectionne des projets dans trois domaines jugés prioritaires :
- La recomposition de l'offre de soins d'abord, et notamment la reconversion de certains services ou la restructuration de plateaux techniques.
- La mise aux normes des établissements (électricité, incendie, amiante...).
- La modernisation des systèmes informatiques hospitaliers.
Fin 2008, 264 projets ont été retenus dans le cadre de la première tranche du programme. Ils représentent, selon Dexia, un montant d'investissement de 2,5 milliards d'euros, aidés à hauteur de 1,3 milliard.