Article de M. Etienne Lefebvre publié le 20 avril 2009 sur le site des Echos (cliquer ici pour accéder au site des Echos)
http://www.lesechos.fr/info/france/4855470-le-gouvernement-desarme-face-au-mur-de-la-dette-sociale.htm?xtor=EPR-1001
L'Unedic dévoile mercredi de nouvelles prévisions, aggravées, de déficit. Si l'exécutif a choisi de laisser filer les déficits pour amortir les effets de la crise, il doit trouver une solution pour rembourser la dette de la Sécurité sociale. Le besoin de financement du régime général dépassera 15 milliards d'euros dès l'automne
Tout va de mal en pis pour les régimes sociaux, et le gouvernement sent petit à petit monter la pression. L'Unedic va dévoiler mercredi de nouvelles prévisions, aggravées, de déficit. Dans sa dernière note financière, l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss) fait état de chiffres très inquiétants. La masse salariale, sur laquelle sont assises les cotisations, se stabiliserait en glissement annuel au premier trimestre (+ 0,5 %), puis reculerait au deuxième (- 0,3 %) et plongerait au troisième (- 1 %). Une évolution sans précédent.
Le gouvernement avait tablé sur une stagnation de la masse salariale cette année, une hypothèse a priori très prudente mais désormais trop optimiste. Les destructions d'emplois expliquent pour l'essentiel ce retournement spectaculaire, qui risque de s'avérer durable : l'éventuel retour de la croissance en 2010 ne s'accompagnera pas forcément d'une reprise sur le marché de l'emploi.
Autre enseignement de la note de l'Acoss : le besoin de financement de la Sécurité sociale atteindrait 15,5 milliards d'euros dès la fin septembre. Le plafond de « découvert » de 18,9 milliards autorisé par le Parlement pour 2009 risque donc de s'avérer insuffisant en fin d'année, vu la rapidité du creusement des déficits.
Hausse d'impôt exclue
Quant à 2010... En l'absence de mesures de redressement, le déficit du régime général grimperait bien au-delà de 20 milliards d'euros (une barrière qui pourrait être atteinte dès 2009). Nicolas Sarkozy excluant toute hausse d'impôt en 2010, afin de ne pas entraver la reprise, le gouvernement s'est fait une raison quant à la perspective d'une nouvelle année de déficits record de « crise », pour l'Etat comme pour la Sécurité sociale.
Mais si, pour l'heure, le financement de la dette de l'Etat ne pose pas trop de difficultés (l'Agence France Trésor trouve preneur sur les marchés), la dette sociale va devenir un enjeu politique majeur. Le gouvernement ne peut plus transférer les déficits cumulés à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), qui vient de reprendre 26,9 milliards d'euros de dettes, et dont la durée de vie ne peut être prolongée, en vertu d'un principe inscrit dans une loi organique.
La solution serait de relever le taux de la CRDS qui alimente la Cades, mais, là encore, le chef de l'Etat ne veut pas en entendre parler à ce stade. L'ancien Premier ministre, Edouard Balladur, suggère de créer une nouvelle « caisse d'amortissement de la dette publique » qui rembourserait la part de l'endettement née des déficits suscités par les dépenses extraordinaires consacrées à lutter contre la crise. Une sorte de Cades bis, qui pourrait accueillir déficits budgétaires et sociaux. Il faudrait lui trouver des ressources, mais il n'y aurait plus l'obstacle de la durée de vie.
L'idée d'un grand emprunt public, qui avait été proposée à l'automne par le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, pourrait aussi ressurgir. Enfin, certains dans la majorité proposent de supprimer la Cades et de transférer la gestion des quelque 100 milliards d'euros de dettes non amorties à l'Etat.
Un sujet hautement sensible
Le débat va donc immanquablement se nouer et il traversera les rangs de la majorité. Toutes les options sur la table sont jugées à hauts risques par le gouvernement. L'exécutif sait que le remboursement de la dette sociale enflamme les débats au Parlement - sur le thème des dépenses d'aujourd'hui dont la charge est renvoyée aux générations futures -, et que trouver une majorité au Sénat sera très compliqué.
Le gouvernement doit trouver une solution avant septembre. La prochaine commission des comptes de la Sécurité sociale et le débat d'orientation des finances publiques de juin au Parlement constitueront des étapes incontournables.