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le pari de l'éolien (2/2) (28 12 2009)

Le pari de l’éolien

Rapport de Mme Johanne Buba avec la collaboration de Mme Caroline Le Moign sous la direction de M. Dominique Auverlot publié le 10 décembre 2009 sur le site du Centre d’Analyse Stratégique (cliquer ici pour accéder au site du CAS)

http://www.strategie.gouv.fr/IMG/pdf/09_rapport_eoliennes.pdf

 

NDLRB : publication sur le blog étalée sur 2 jours les 27 (sommaire et introduction) et 28 déc. 2009 (conclusion)

 

Conclusion :

L’éolien, comme toute nouvelle énergie, est un pari industriel que certaines données exogènes (prix des énergies, coût du quota de carbone, ou encore prix de l’électricité) viendront légitimer ou infirmer à l’avenir. Si le développement de l’éolien peut pleinement trouver sa justification dans l’ouverture de nouveaux marchés, il reste à définir les modalités permettant de viser les huit objectifs suivants.

1. Partager les risques entre la collectivité et l’investisseur privé, afin que ce dernier continue à obtenir une rentabilité suffisante et que l’augmentation de la part de l’éolien dans la contribution au service public de l’électricité (qui serait supérieure à un milliard d’euros en 2020 selon la CSPE) reste acceptable pour le consommateur. Si les tarifs d’achat semblent constituer une bonne pratique pour impulser le développement rapide de la filière, ils isolent entièrement les producteurs/investisseurs des risques liés à l’exposition au marché de l’électricité. L’évolution des aides à l’investissement et du tarif d’achat, ainsi que les conditions de développement de la filière pourraient faire l’objet d’un travail spécifique rassemblant tous les acteurs concernés. D’autres procédures pourraient également être étudiées. Le rapport de la Commission Énergie du Centre d’analyse stratégique a proposé la mise à l’étude de la substitution des tarifs d’achat par les opérateurs historiques de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables par une obligation d’incorporation dont la proportion serait fixée par les pouvoirs publics, idée que l’on retrouve notamment aux Etats-Unis dans la récente proposition de loi sur le changement climatique. L’Institut Montaigne envisage de recourir à des procédures d’appels d’offres, déjà utilisées notamment par la Chine : celles-ci pourraient s’appliquer à des champs importants. Elles supposent néanmoins l’existence d’une concurrence suffisante. Ces deux systèmes pourraient permettre une significative réduction des coûts pour la collectivité par rapport à l’utilisation de tarifs d’achat.

 

2. Créer des emplois nécessaires dans cette période de crise. À cette fin, les processus d’appels d’offres pourraient s’accompagner d’une étude sur l’impact économique local d’un développement éolien. Supposant qu’ils portent sur des champs de taille importante et qu’ils conduisent à une fabrication sur plusieurs années, les régions pourraient également favoriser l’implantation d’usines d’assemblage, qui bénéficieraient d’un coût moins élevé d’acheminement. En face d’une telle incitation, il est évidemment crucial de former un personnel qualifié en proposant des enseignements dédiés à ce secteur, ou des spécialisations pour les employés des secteurs de l’automobile, de la construction navale ou encore de l’aéronautique, qui souhaitent se reconvertir.

 

3. Impulser le développement d’une industrie française de l’éolien onshore. Si certains restent sceptiques, l’observation de pays tels que l’Espagne tend à prouver qu’un début tardif peut aller de pair avec la naissance d’acteurs éoliens à rayonnement national comme international. Cependant, l’entrée massive sur ce marché de pays tels que la Chine ou les États-Unis ou encore la longue expérience de l’Allemagne et du Danemark font douter d’un réel développement des fabricants français d’éoliennes, dont le seul représentant à l’échelle internationale est Vergnet SA. La France doit miser sur ses atouts, à savoir les sous-traitants fournissant les composants nécessaires à la construction d’éoliennes.

 

4. Simplifier les procédures liées à la construction d’éoliennes. Si le régime ICPE est appliqué aux installations éoliennes, il appartiendra cependant à l’administration de veiller à ce que la mise en place de ce nouveau régime conduise à une réelle simplification administrative, sans pour autant remettre en cause la nécessaire concertation locale ;

 

5. Associer, y compris financièrement, la population locale à la réalisation de nouvelles éoliennes. On pourrait ainsi envisager de permettre à la population locale, à l’exemple des pratiques allemandes et danoises, de prendre des participations dans les champs éoliens afin de bénéficier des revenus de leur exploitation. Dans ce schéma, les plus petites éoliennes seraient principalement destinées à un usage local, autrement dit à l’usage de leurs propriétaires, qui pourraient cependant revendre leur électricité au distributeur.

 

6. Optimiser l’implantation des nouvelles éoliennes : il est souhaitable, pour la collectivité mais aussi pour l’investisseur, de chercher à optimiser les coûts et donc de favoriser l’implantation des éoliennes dans des zones ventées, permettant une meilleure rentabilité. À l’exemple de la loi américaine American Clean Energy Leadership Act, la mise en place d’objectifs renouvelables régionaux contraignants pourrait être envisagée, afin de favoriser une meilleure implantation des parcs éoliens, notamment en Corse et dans les DOM-TOM mais aussi dans les départements au fort potentiel éolien, et de la limiter ailleurs. Cette mesure pourrait permettre d’ajuster la dépense non seulement du promoteur mais aussi de la collectivité et du consommateur ;

 

7. Coordonner le développement de la filière. Pour le moment, l’empilement des procédures administratives, le rôle du préfet dans la détermination des ZDE, ainsi que les nouveaux plans régionaux concernant les énergies renouvelables, peuvent faire craindre un manque de coordination, sur lequel il est important de se pencher. Il pourrait être intéressant de créer un comité national de suivi du programme éolien associant l’ensemble des parties prenantes (État, collectivités locales, ONG, syndicats et industriels), afin de réaliser un véritable programme éolien. Ce programme serait structuré autour de points essentiels tels que des objectifs contraignants par région, une simplification du cadre réglementaire, une définition de stratégies dans la recherche et l’industrie, ainsi qu’une meilleure communication s’appuyant sur des bilans énergétiques, environnementaux, sociaux et économiques ;

 

8. Anticiper les développements futurs de l’éolien, en misant sur l’innovation, que ce soit dans le domaine onshore ou offshore. La technologie offshore n’en est qu’à ses balbutiements : la France gagnerait à développer des éoliennes en mer (conditions météorologiques et accès difficiles), qui constituent une technologie naissante mais prometteuse. Une récente communication de la Commission européenne prévoit des investissements publics et privés de 6 milliards d’euros dans les dix prochaines années (le SET-PLAN présenté le 9 octobre 2009).

Elle envisage d’encourager davantage la R & D en matière d’énergie éolienne autour de trois thématiques principales : une diminution des coûts, l’installation d’éoliennes en mer et une meilleure intégration aux réseaux.

 

Le développement éolien doit répondre à un triple critère : remplir les engagements fixés par le Grenelle de l’Environnement, créer des emplois mais aussi répartir équitablement les risques entre contribuable et investisseur, afin que ce dernier continue à obtenir une rentabilité suffisante et que l’augmentation de la part de l’éolien dans la contribution au service public de l’électricité reste acceptable pour le consommateur.

Trois niveaux de déploiement pourraient être envisagés. Les grands champs, créateurs d’emplois, pourraient être soumis à des appels d’offres. Les champs de taille moyenne continueraient à bénéficier du tarif d’achat existant : la population locale serait invitée à s’associer aux projets. Le gouvernement pourrait enfin favoriser le développement des petites éoliennes à l’usage des particuliers grâce à des incitations adaptées (crédit d’impôt notamment, achat du surplus d’électricité …) et leur permettre ainsi de s’impliquer concrètement dans la mise en oeuvre des objectifs du Grenelle.

Le développement des éoliennes est en partie tributaire d’une simplification des procédures administratives mais également d’une implantation raisonnée des quelques milliers de turbines qui composeront le paysage de demain. Le gouvernement et les collectivités pourraient favoriser, par le biais d’appels d’offres, l’émergence d’une filière industrielle française dynamique et mettre en place des formations adaptées sur l’ensemble de la chaîne de valeur afin de mettre en adéquation l’offre d’emplois et la demande.

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