https://www.senat.fr/questions/base/2024/qSEQ24110198S.html
Question de M. Jean-Marie Mizzon (sénateur de Moselle) et réponse du Garde des sceaux publiées dans le JO Sénat du 12/02/2025 - page 2598
Monsieur le ministre, en Moselle, mais cela vaut également pour le reste du territoire national, la liste est longue des médias qui font régulièrement état de logements squattés.
L'évacuation et la restitution à leurs propriétaires légitimes de ces logements occupés illégalement, le plus souvent très dégradés, demeurent trop difficiles.
Certes, depuis 2017, la procédure d'évacuation forcée permet aux préfets, saisis en ce sens et dans un délai de quarante-huit heures après le dépôt de plainte, de mettre en demeure les squatteurs de quitter le logement. Pour autant, cette procédure accélérée, créée par la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, dite loi Asap, répond en partie seulement aux attentes des victimes. Ce texte est donc perfectible, ne serait-ce que parce qu'il ne dissuade absolument pas les squatteurs. Les violations de domicile sont toujours aussi nombreuses et les travaux de remise en état toujours aussi onéreux pour les victimes de cette infraction, qui sont donc doublement pénalisées.
Aussi, afin que cet arsenal juridique soit davantage dissuasif, n'est-il pas temps d'envisager une plus grande sévérité dans les peines encourues ainsi que de lourdes sanctions financières pour tout contrevenant à la loi sur la propriété privée ?
Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et des Français de l'étranger apportée en séance publique le 11/02/2025
Monsieur le sénateur Jean-Marie Mizzon, le ministère de la justice est engagé de longue date dans la lutte contre l'occupation illicite des logements. L'arsenal législatif a d'ailleurs été renforcé par la loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite.
Dans sa nouvelle rédaction, l'article 226-4 du code pénal porte les peines encourues en cas d'introduction illicite dans le domicile d'autrui d'un à trois ans d'emprisonnement et de 15 000 à 45 000 euros d'amende.
Par ailleurs, le législateur a créé aux articles 315-1 et 315-2 du code pénal deux nouveaux délits protégeant la propriété immobilière : d'une part, l'introduction ou le maintien illicites ”dans un local à usage d'habitation ou à usage commercial, agricole ou professionnel”, d'autre part, ”le maintien sans droit ni titre dans un local à usage d'habitation en violation d'une décision de justice”.
En outre, les quanta des peines encourues du chef de sous-location illicite ont été augmentés et un nouveau délit de propagande en faveur de ces comportements a été créé à l'article 226-4-2-1 du code pénal.
Dans le prolongement de cette loi, le garde des sceaux a invité, dans une circulaire datée du 23 novembre 2023, les procureurs de la République à mettre en œuvre une politique pénale empreinte de fermeté.
Enfin, le législateur a étendu et facilité la mise en oeuvre de la procédure d'évacuation administrative prévue par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite Dalo, permettant à la personne concernée de demander au préfet de mettre en demeure l'occupant de quitter les lieux et de procéder le cas échéant à son évacuation forcée.
La loi du 27 juillet 2023 a étendu cette procédure au squat de tout local à usage d'habitation, alors que, auparavant, seul le squat d'un domicile était concerné.
Par ailleurs, les démarches administratives pour la personne concernée et le constat de l'occupation illicite ont été simplifiées.
Enfin, la possibilité pour le juge d'accorder aux occupants des délais pour quitter les lieux expulsés a été exclue en cas de squat.
Considérons donc que l'arsenal juridique existant apparaît aujourd'hui comme suffisamment complet.
Le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.
Jean-Marie Mizzon. Monsieur le ministre, la question que je vous ai posée porte sur un sujet connu de tous, et ce depuis longtemps.
D'un point de vue intellectuel, votre réponse est satisfaisante. En revanche, en pratique, au regard des réalités auxquelles sont confrontés nos concitoyens, les résultats ne sont pas aussi splendides que pourrait le laisser à penser l'arsenal juridique que vous venez de rappeler.
J'espère que, à l'avenir, la justice appliquera les règles comme elle doit le faire.