Article de Mme Cécile Prieur lu le 10 décembre 2008 sur le site du Monde (cliquer ici pour accéder au site du Monde)
http://www.lemonde.fr/politique/article/2008/12/10/implantation-et-tarifs-des-medecins-le-gouvernement-menace-de-legiferer_1129092_823448.html#xtor=EPR-32280155&ens_id=628859
La pression s'accentue sur les syndicats de médecins libéraux. Mercredi 10 décembre, une ultime séance de négociations devait se tenir entre l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (Uncam) et les représentants des praticiens libéraux pour trouver un accord sur des mesures de régulation médicale. Alors que le gouvernement menace de légiférer s'ils ne trouvent pas un terrain d'entente, les partenaires sociaux peinent à s'accorder sur les moyens de lutter contre la désertification médicale et restreindre les dépassements d'honoraires.
"Cette négociation est difficile, confie le directeur de l'Uncam, Frédéric Van Roekeghem. Nous attendons que les syndicats de médecins avancent de nouvelles propositions. Sinon, c'est clairement un débat que tranchera le gouvernement."
L'accès aux soins
Entamées il y a plus d'un an, les négociations conventionnelles s'inscrivent dans un contexte d'aggravation de l'accès aux soins. Selon le ministère de la santé, un quart de la population française manquerait de médecins près de son lieu de résidence, principalement dans les zones rurales et les banlieues.
Or les mesures financières d'incitation à l'installation dans les zones déficitaires, comme l'augmentation de 20 % du tarif de la consultation, n'ont quasiment pas eu d'effets. Le gouvernement pourrait donc adopter des mesures plus contraignantes, notamment par le biais d'amendements à la loi "Hôpital, patients, santé, territoire", qui doit être discutée en février au Parlement : "Nous avons trop longtemps laissé les professions de santé gérer seuls leur démographie, a lancé Nicolas Sarkozy, le 18 septembre. Il est temps d'agir et de faire des choix."
Soucieux d'éviter que le gouvernement ne décide à leur place, les syndicats de médecins ont accepté le principe d'un "contrat de santé solidarité" : les médecins exerçant en zone sur-dotée, comme les centres-villes, iraient prêter main forte à leurs collègues des zones déficitaires. Mais cette mesure, qu'ils souhaitaient incitative, l'assurance-maladie la veut désormais contraignante : M. Van Roekeghem demande que les médecins qui s'y soustraient paient une contribution financière.
Pour les syndicats, c'est un point d'achoppement des discussions : "Nous ne pouvons accepter que les médecins installés depuis vingt ou trente ans paient l'inefficacité des pouvoirs publics à réguler l'offre de soins sur le territoire", affirme Michel Chassang, président de la Confédération syndicale des médecins français (CSMF).
Les honoraires
L'autre point de friction réside dans la manière de juguler les dépassements d'honoraires. Le principe de la création d'un "secteur optionnel", afin d'inciter les médecins exerçant en secteur 2 (honoraires libres) à pratiquer des tarifs moins prohibitifs, est certes acté : les médecins s'engageraient à réaliser 30 % de leurs actes aux tarifs de la Sécurité sociale et pourraient pratiquer des dépassements à hauteur de 50 % maximum sur le reste de leurs revenus, pris en charge par les mutuelles.
Mais les organismes complémentaires (mutuelles, sociétés d'assurance, institutions de prévoyance) demandent d'aller plus loin. Ils réclament notamment une régulation plus importante du secteur 2 "afin que les dépassements d'honoraires non encadrés diminuent progressivement" : ce que refusent, à ce stade, les syndicats.
Malgré la crise économique, qui va aggraver le déficit de l'assurance-maladie, les médecins attendent toujours une revalorisation de la consultation des généralistes de 22 à 23 euros, qui leur est promise depuis plusieurs mois. Dans ce cadre, les syndicats ont accepté les mesures de maîtrise médicalisée de la CNAM pour 2009 (limitations de prescriptions) à hauteur de 594 millions d'euros.
De son côté, le gouvernement fait de cette revalorisation un moyen de pression supplémentaire sur les syndicats : fin octobre, la ministre de la santé, Roselyne Bachelot, indiquait qu'elle n'interviendrait en 2009 que "si la négociation conventionnelle s'achève en décembre".