http://www.senat.fr/questions/base/2017/qSEQ17120149G.html
Question d'actualité au gouvernement n° 0149G de M. Michel Raison (sénateur de Haute-Saône)
Michel Raison. Ma question s'adressait à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur ; elle concerne la sécurité routière. C'est un sujet grave, très grave, qui me préoccupe depuis un certain nombre d'années, et j'ai d'ailleurs reçu récemment Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la sécurité routière.
On le sait, les causes d'accident sont multiples et sont souvent conjuguées, ce qui complique évidemment la définition des mesures à mettre en œuvre et rend difficile la tâche du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Il semble néanmoins qu'il soit envisagé de mettre toutes les routes sans séparateur à 80 kilomètres par heure, et ce dès la deuxième quinzaine de janvier.
Toutefois, le Gouvernement ne peut pas se fonder uniquement sur le précepte italien selon lequel chi va piano va sano…
J'ai deux interrogations. La première concerne l'expérimentation du précédent ministre de l'intérieur – trois tronçons à 77 kilomètres par heure, pendant seulement deux ans. Avez-vous des conclusions sur cette expérimentation et sont-elles utilisables ?
Ma seconde question est simple ; si vous mettez cette mesure en place au mois de janvier, comment l'expliquerez-vous aux citoyens, et au moyen de quels arguments ?
Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement publiée dans le JO Sénat du 15/12/2017 p. 9647
Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Raison, je me souviens des propos tenus le 14 juillet 2002 – j'étais député depuis peu de temps – par le président Jacques Chirac. Celui-ci proposait trois grandes causes nationales à la France : l'insertion des handicapés – un sujet important –, l'action contre le cancer et la lutte pour faire diminuer le nombre de tués sur les routes.
Il a ainsi pris un certain nombre de mesures, avec le gouvernement qui l'accompagnait, qui ont permis de constater que, à la fin de son second mandat, près de 8 000 personnes avaient conservé la vie du fait de ces actions et que près de 100 000 personnes avaient évité un accident relativement important entraînant des séquelles physiques permanentes. Il a fallu à ce moment-là le courage de tenir bon face à ceux qui revendiquaient le droit de rouler sur les routes à la vitesse qu'ils souhaitaient.
C'était le même débat en 1974, quand on a abordé la question de la ceinture de sécurité à l'avant des véhicules.
Là encore, au nom de la liberté, certains contestaient cette mesure. Soyons sérieux, mesdames, messieurs les sénateurs. Les études montrent que baisser de 10 kilomètres par heure la vitesse sur les routes bidirectionnelles sans séparateur central permettrait de sauver 350 vies par an.
On peut certes considérer qu'il faut continuer ainsi et se satisfaire de l'augmentation, sur les trois dernières années, de la mortalité sur nos routes – de 3,6 % en 2014, 2,3 % en 2015 et 0,5 % en 2016 –, mais on peut aussi choisir le courage. Et puisque la moitié des morts sur nos routes adviennent sur ce type de voies, assumer de prendre des mesures de sécurité routière et de prévention et d'engager des investissements, que les collectivités territoriales discutent, en ce moment même, à Cahors, en présence du Premier ministre et des représentants des départements qui ont une responsabilité sur ces routes.
On peut décider d'avoir le courage politique pour sauver des vies !
Michel Raison. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État. Je suis tout à fait d'accord : on doit être très rigoureux sur ce sujet. Toutefois, je suis également partisan de la pédagogie. Pour que les citoyens puissent s'approprier une nouvelle mesure, il faut la leur expliquer. La pédagogie ne peut être bonne que si l'on a des arguments chiffrés, ce qui ne me semble pas être tout à fait le cas.
Je ne voudrais surtout pas que la mesure soit contre-productive ; tel était le but de ma question. Je ne suis pas, je vous rassure, pour le laxisme.