Note de la Rédaction : avec la prudence et le respect que nous devons aux personnes souffrantes, nous avons estimé intéressant de vous informer d'un article paru récemment sur le site du Monde, et des perspectives, encore futures, qu'il ouvre.
Une étude explique comment se calment les tremblements de la maladie de Parkinson
Article de M. Paul Benkimoun lu sur le site du Monde le 25 décembre 2007
Très efficace, notamment sur les symptômes de la maladie de Parkinson, la stimulation cérébrale profonde (SCP) par une électrode implantée dans le cerveau était loin d'avoir livré le mystère de ses mécanismes. C'est désormais chose faite grâce à des chercheurs américains, qui ont découvert les phénomènes mis en jeu au niveau cellulaire lors de la SCP. Maiken Nedergaard (université de Rochester, Etats-Unis) et son équipe ont publié leurs résultats dans un article publié, dimanche 23 décembre, sur le site Internet de la revue Nature Medicine.Destinée à faire régresser les signes cliniques de la maladie de Parkinson, la stimulation électrique du noyau sous-thalamique a été pratiquée pour la première fois chez l'homme en 1993, par le professeur Alim-Louis Benabid et son équipe de l'unité 318 de l'Inserm, au CHU de Grenoble. Cette technique dérive des expériences d'électrostimulation destinées à traiter des phénomènes douloureux. Elle consiste en l'introduction de deux électrodes sous la région du cerveau appelée thalamus. L'électricité est fournie par un stimulateur implanté sous la clavicule du malade, et relié aux électrodes par un câble sous-cutané. Le patient peut actionner le stimulateur grâce à un aimant.
En 2005, l'équipe du laboratoire de physiologie et physiopathologie de la signalisation cellulaire (CNRS/université Bordeaux 1 et 2), qui avait, la première, attiré l'attention sur les effets thérapeutiques de la stimulation du noyau sous-thalamique chez le macaque en 1993, montrait que la SCP permettait de désynchroniser et de rendre de nouveau indépendants les neurones du noyau sous-thalamique qui fonctionnent de manière synchrone chez le malade parkinsonien. INFLUX EXCITATEURS Travaillant sur la souris, Maiken Nedergaard et ses collègues ont cherché à élucider les phénomènes biologiques en jeu dans la SCP. Dans un premier temps, ils ont prouvé que la stimulation électrique de haute fréquence utilisée dans la SCP entraînait autour de l'électrode la libération d'une molécule, l'adénosine triphosphate (ATP), à l'extérieur des cellules cérébrales. L'ATP fournit l'énergie nécessaire aux réactions chimiques chez tous les êtres vivants. Son catabolisme produit l'adénosine, et les chercheurs ont bien retrouvé une augmentation de la concentration d'adénosine dans la zone stimulée.
Ils ont ensuite vérifié deux points. D'une part que l'adénosine contribuait à la répression de la transmission d'influx excitateurs dans le thalamus, ce qui se traduit par la diminution des tremblements typiques de la maladie de Parkinson. Et d'autre part, que l'utilisation d'une molécule bloquant le récepteur A1 de l'adénosine atténuait les effets de la SCP. Pour confirmer tous ces résultats, les chercheurs américains ont enfin "mimé" les effets de la SCP sur le tremblement, tout d'abord en stimulant le récepteur A1 par une molécule analogue à l'adénosine, et ensuite en perfusant de l'adénosine dans le thalamus. L'équipe de Maiken Nedergaard démontre que deux phénomènes sont déterminants dans la diminution des tremblements obtenue par la SCP : la libération d'ATP et l'activation des récepteurs A1 à l'adénosine qui en découle. De plus, tous deux limitent les effets secondaires excitateurs que peut induire la stimulation cérébrale profonde.
Ces travaux pourraient un jour déboucher sur de nouvelles cibles pour des médicaments antiparkinsoniens. Ils pourraient aussi confirmer l'utilité de la SCP dans d'autres pathologies, notamment psychiatriques, pour lesquelles cette technique est aujourd'hui expérimentée : troubles obsessionnels compulsifs ou dépression.