Article de Mme Tiphaine Réto lu le 3 avril 2008 sur, le site du Monde
http://www.lemonde.fr/technologies/article/2008/04/02/des-moteurs-de-recherche-lancent-le-clic-humanitaire_1030070_651865.html
En quelques clics, peut-on lutter contre la faim dans le monde ? C'est le pari lancé par différentes associations et entreprises de jeunes internautes. Alors que le géant Google affiche un chiffre d'affaires de 16 milliards de dollars pour 2007, de petits moteurs de recherche se développent pour utiliser l'argent généré par la publicité sur Internet à des fins humanitaires.
Le principe est simple : plutôt que de conserver la manne financière des annonceurs, les sites hébergeurs solidaires la redistribuent à des ONG. Pas besoin, pour l'internaute, de mettre la main au porte-monnaie. Il lui suffit de changer de moteur de recherche. Plus la fréquentation d'un portail est importante, plus la cagnotte s'accroît. "Nous transformons le temps de recherche en argent humanitaire", résume Nicolas Desmaret, président de l'association Doona.
Créée en 2006 par trois lycéens, Doona est à l'initiative de l'Internet solidaire. Son moteur de recherche, www.doona.fr, reverse l'intégralité de ses revenus à trente-trois associations partenaires, choisies par un vote des internautes. Non lucratif, le site a attiré de grosses entreprises. Il est désormais soutenu par Exalead, premier moteur de recherche français, et par l'américain Mégaglobe, qui lui fournissent techniques et données. "Nous n'en tirons absolument rien, affirme François Bourdoncle, PDG d'Exalead. Mais le projet me paraissait tellement insensé qu'il m'a plu."
Insensé ? Pas tant que ça. Car si Doona souhaite garder sa modestie en restant associatif, d'autres ont suivi le mouvement pour développer un vrai charity business. VeoSearch, lancé par une équipe de jeunes diplômés d'HEC, qui travaille essentiellement avec Yahoo, a préféré la version entrepreneuriale de l'action Web solidaire. Fondée sur trois piliers, l'environnement, l'économie et le social, la petite société fait son trou sur la Toile. "Notre chiffre d'affaires a atteint 21 500 euros en mars, détaille Guillaume Heintz, son fondateur. Nous en reversons la moitié à des associations partenaires." Un chèque de 1 394 euros a ainsi permis à France Libertés de construire un accès à l'eau en Bolivie.
L'argent conservé sert au développement de l'entreprise. Mais pas question pour ses concepteurs de tomber dans la caricature de la start-up juteuse. "Le développement durable et solidaire n'est pas une mode, explique Arthur Saint-Père, cofondateur de VeoSearch. C'est une nouvelle logique de vie. Et pour les pays développés en mal de croissance, c'est un levier de créations d'emplois."
Une vision partagée par les quatre membres de l'équipe, tous âgés de moins de 25 ans. "Pour nous, gagner de l'argent est un cercle vertueux, justifie M. Heintz. Si on peut payer des gens avec les revenus du site, on peut continuer à le développer et à l'améliorer... Et donc rapporter de l'argent aux ONG."
Et la formule fonctionne. La fréquentation du site, lancé en janvier, frôle les 15 millions de recherches. En partenariat avec les bases de données de Yahoo!, VeoSearch parvient à apporter sa contribution à de grosses associations telles que WWF ou Handicap International. Une nouvelle version du site a été mise en ligne en mars afin de "fonctionner sur un principe plus communautaire, en mettant en réseau les utilisateurs du moteur". Et continuer, ainsi, à tisser la toile du solidaire.
- www.doona.fr
- www.veosearch.com