La gestion des bureaux ruraux fait polémique entre l'Etat et La Poste
L’année 2009 sera-t-elle celle de tous les changements, pour La Poste ? Après avoir obtenu de l'Etat la promesse d'être transformée en société anonyme, dans l'année, l'entreprise publique a engagé des discussions avec les pouvoirs publics afin d'alléger le coût de sa présence postale en zone rurale.
La Poste possède aujourd'hui 9 700 points de contacts dans les communes de moins de 2 000 habitants, qui lui coûtent cher et qu'elle estime pouvoir mieux adapter à des besoins disparates sur le territoire. La compensation que verse l'Etat à l'opérateur postal, au titre de cette mission publique d'aménagement du territoire (environ 140 millions d'euros par an), laisse, en effet, à sa charge 240 millions d'euros.
Selon nos informations, plusieurs pistes de travail ont été examinées, au cours des derniers mois, avec le ministère de tutelle de l'opérateur public postal, dans la perspective de la libéralisation du marché postal en 2011. L'une d'elles, restée confidentielle, très sensible politiquement, autant sans doute que le changement de statut récemment entériné par le chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy, avait la préférence du président de La Poste, Jean-Paul Bailly. M. Bailly aurait aimé en faire l'ultime point fort de son mandat. Mais elle a suscité une vive réticence de la part du gouvernement.
Cette piste revenait à transférer aux régions, ou aux départements, la gestion des bureaux de poste ruraux. Elle consistait à faire passer ces bureaux sous délégation de service public, confiée aux collectivités territoriales, exactement comme cela a été fait à la SNCF, en 2002, pour la gestion des Trains express régionaux (TER). A cette date, la compétence du transport régional ferroviaire de voyageurs a été transférée aux régions, à charge pour elles d'organiser le contenu de ce service public (dessertes, fréquence, tarifs etc.). L'exploitation a été confiée à la SNCF, par le biais de "contrats de délégation de service public", passés avec les conseils régionaux. Les régions versent à la SNCF une contribution financière pour la réalisation de ce service régional.
Transposé à La Poste, ce modèle aurait fait des régions - par exemple - l'autorité organisatrice du service postal en zone rurale, à charge pour elles de conclure un contrat de délégation de service public avec l'exploitant, La Poste, et de lui verser la contrepartie financière correspondant au coût du service. Les bureaux de poste ruraux auraient été transférés dans un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Ce n'était plus l'Etat qui finançait La Poste, pour compenser le surcoût de son réseau rural, mais les régions. Celles-ci auraient perçu une compensation financière de l'Etat. Sur le papier, La Poste n'y avait vu que des avantages, à commencer par la possibilité, pour les régions, de dimensionner l'offre postale aux besoins, disparates, des populations rurales, en décidant elles-mêmes de la localisation des points de présence, de leurs horaires d'ouverture et de la nature des services rendus.
NOUVELLE STRUCTURE
Cette piste, cependant, a été jugée politiquement "explosive" par le gouvernement, qui, à cinq mois des élections européennes, a récemment demandé à M. Bailly de renoncer à son projet. De fait, un tel projet nécessitait l'adoption d'une loi, l'organisation et le financement du service postal ne comptant pas parmi les compétences des régions ni des départements. Les collectivités n'auraient pas manqué de dénoncer un nouveau transfert de charges onéreux.
Une nouvelle piste de travail, jugée plus raisonnable par le gouvernement, est discutée entre La Poste et l'Etat. Celle-ci vise à externaliser la gestion du Fonds de péréquation territorial - qui porte l'aide financière publique pour la présence postale rurale, géré aujourd'hui par La Poste - auprès d'une nouvelle structure juridique. Ce nouvel établissement serait contrôlé par les communes, départements et régions. La Poste en serait le prestataire de services et agirait sur instruction des élus, sans qu'il y ait cependant besoin d'organiser, par la loi, un transfert juridique de compétence.