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obésité : perdre du poids sans ordonnance ? (30 03 2009)

Un médicament promet aux obèses de perdre du poids sans ordonnance

 

Article de Mme Sandrine Blanchard, lu le 7 février 2009 sur le site du Monde (cliquer ici pour accéder au site du Monde)

 

http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/02/06/un-medicament-promet-aux-obeses-de-perdre-du-poids-sans-ordonnance_1151789_3224.html#xtor=EPR-32280155&ens_id=628868

 

 

GlaxoSmithKline (GSK) dégraisse dans tous les sens du terme. Le groupe pharmaceutique britannique a annoncé, mercredi 4 février, la suppression de quelque 850 emplois en France d'ici à 2011-2012. Pourtant, quelques jours auparavant, le laboratoire se félicitait d'avoir obtenu une autorisation européenne de mise sur le marché d'Alli, premier médicament amaigrissant autorisé à la vente sans prescription médicale.

 

Depuis son lancement en juin 2007 aux Etats-Unis, Alli est devenu numéro trois des ventes sur le marché américain de l'automédication. Cela donne une idée de l'enjeu de l'arrivée de ce produit en France", souligne Vincent Cotard, président de GSK Santé-grand public. En visant le créneau très porteur de la perte de poids, ce médicament, qui arrivera dans les pharmacies françaises en mai, devrait augmenter le chiffre d'affaires du laboratoire.

 

Alli - comme "mon allié contre la graisse" - est simplement une version allégée (60 mg au lieu de 120 mg) d'un vieux produit (Xenical-Orlistat) qui était délivré uniquement sur ordonnance. "C'est la première fois qu'un médicament contre le surpoids et l'obésité se retrouve en vente libre", constate, sans inquiétude particulière, le professeur Arnaud Basdevant, chef du service de nutrition à l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière.

 

Cette décision a été adoptée à une courte majorité, douze pays ayant voté contre, dont la France. "Nous sommes tenus d'appliquer la décision européenne mais cette histoire nous enquiquine", reconnaît Fabienne Bartoli, adjointe au directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Pourquoi ? Parce qu'elle remet en cause le principe d'une prise en charge médicale globale de l'obésité et qu'elle risque fort d'attirer un public beaucoup plus large que les seules personnes en surpoids ou obèses.

 

 

 

 

"La difficulté va être de tempérer les ardeurs et de rappeler que dans le domaine du poids, la pilule miracle n'existe pas", souligne Mme Bartoli. Officiellement réservé aux adultes ayant un indice de masse corporel (IMC) supérieur à 28, Alli a une action locale sur l'intestin et "purge" environ 25 % des graisses consommées. La prise du traitement permet de se débarrasser plus facilement des matières grasses prises à chaque repas. Les personnes qui "répondent" bien au traitement pourront espérer perdre 5 à 10 % de leur poids sur un an. "C'est un médicament efficace par ses effets secondaires", explique le professeur Basdevant.

 

Mais il nécessite impérativement d'être associé à un régime alimentaire pour éviter de passer sa vie aux toilettes ! "La prise de ce produit entraîne des selles très grasses. Si l'alimentation reste riche en graisses, il y a un risque de diarrhées impétueuses", prévient le professeur Philippe Bouchard, chef du service d'endocrinologie à l'hôpital Saint-Antoine, à Paris. "Ce n'est pas un médicament confortable. Je n'ai jamais vu personne en abuser", résume le professeur Basdevant.

 

Contrairement aux coupe-faim (hormones thyroïdiennes, amphétamines, sibutramine), qui exposent à de graves complications cardiaques ou neurologiques, Alli "n'est pas un poison, estime le professeur Bouchard, et ses effets secondaires digestifs autolimitent, de fait, sa consommation". En revanche, ce produit est déconseillé chez les personnes ayant des maladies digestives, des carences en vitamines ou qui suivent certains traitements (anticoagulants et cyclosporine).

 

Viviane Gacquière, présidente de l'association Allegro fortissimo, ne décolère pas : "parler d'un médicament anti-obésité est scandaleux. Si on fait un régime et de l'activité physique, cette molécule ne sert à rien ; ces effets secondaires sont désocialisants et dès qu'on arrête le médicament on a un effet rebond".

 

L'Afssaps promet d'être "vigilante" sur la teneur du message publicitaire qui accompagnera le lancement de ce produit et souligne qu'Alli devra être "derrière le comptoir" des pharmacies.

 

"Notre communication insistera sur la nécessaire motivation des patients à faire un régime", assure Caroline Petit-Keller, pharmacienne responsable chez GSK Santé-grand public. Les pharmaciens, qui vont être formés par le laboratoire, devront calculer l'IMC des personnes qui souhaitent acheter Alli. "Nous ne délivrerons pas ce médicament de manière sauvage", insiste Jean Parrot, président du conseil national de l'ordre des pharmaciens. "Cette promesse de sagesse me fait doucement rigoler face aux enjeux commerciaux", rétorque Mme Gacquière.

 

Les personnes qui souhaitent perdre quelques kilogrammes avant l'été ou effacer plus vite un gueuleton pourront être tentées par Alli. "Le détournement est possible. Mais l'utilisation occasionnelle n'est pas risquée", estime le professeur Basdevant. "La femme moderne, qui mange déjà très peu de graisses, risque de dépenser son argent pour rien", préviennent les médecins. Compter environ 70 euros pour un mois de traitement. "Quand on sait de quoi sont capables les femmes pour maigrir, le risque est grand d'augmenter les troubles du comportement alimentaire", s'inquiète Mme Gacquière.

 

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