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Pauvreté et Exclusion Sociale en France et en Europe (2/2) (10 06 2010)

Pauvreté et Exclusion Sociale en France et en Europe (suite et fin)

Présentation du Rapport 2009-2010  publié sur le site de l’Observatoire national de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale le 22 mars 2010 (cliquer ici pour accéder au site de l’ONPES, au texte de présentation, au texte du  rapport ou aux fiches pédagogiques)

http://www.onpes.gouv.fr/Le-Rapport-2009-2010.html

http://www.onpes.gouv.fr/IMG/pdf/Discours_Agnes_de_Fleurieu.pdf

http://www.onpes.gouv.fr/IMG/pdf/RapportONPES_2009-2010.pdf

http://www.onpes.gouv.fr/IMG/pdf/Fiches_Presse.pdf

 

…/…

Le surendettement des ménages, notamment les plus pauvres est un autre sujet de préoccupation. Au cours de l’année 2009 les dépôts de dossiers ont augmentés de 15% et, en septembre 2009, 744 000 ménages étaient officiellement en situation de surendettement. L’endettement moyen par dossier a lui aussi augmenté et se monte à plus de 41 000 euros en septembre 2009. Les associations se font d’ailleurs l’écho d’une augmentation sensible des difficultés financières des ménages et d’une hausse des demandes d’aide alimentaire et financière qui résultent à la fois de la persistance de difficultés antérieures à la crise et de ses premiers effets.

 

Le logement constitue aujourd’hui un des points les plus sensibles de l’exclusion. Je ne vous apprendrai rien, Monsieur le Ministre, en rappelant, le poids accru des dépenses de logement dans le budget des ménages pauvres et modestes : il représente près du tiers des dépenses pour le quintile des plus pauvres contre un peu plus de 20% pour le quintile des plus riches. La part des demandes de logement social non satisfaites après un an reste élevée et les conditions de logement pour les ménages les plus pauvres sont souvent les plus dégradées.

 

Vous évoquiez, il y a quelques jours, Monsieur le Ministre la situation des personnes sans abri. La France fait partie des premiers pays qui ont mené des études sur ces personnes. L’enquête de 2001 de l'INSEE reste la référence dans ce domaine, elle doit être actualisée en 2012, mais elle ne fournit aucune donnée à l’échelle régionale ou locale. Elle est d’ailleurs destinée à décrire des profils, des situations, des trajectoires, et reste mal adaptée pour évaluer un nombre de personnes sans abri. La fixation d'un objectif volontariste de réduction significative du nombre de personnes sans-abri, peut, en revanche, s'appuyer sur le Recensement qui, tous les cinq ans, approche les personnes sans abri. A la suite d'une étude  commanditée par l’ONPES plusieurs pistes d’amélioration du système de dénombrement se dégagent et font l'objet d'un rapport qui vous a été remis. Elles passent par, une modification de l'enquête INSEE pour y inclure des questions nouvelles, une régionalisation des données et une enquête spécifique dans les quelques dizaines de communes qui concentrent les trois quart des sans abri voire, si les moyens le permettent, dans les 150 communes qui en concentrent 90%.

 

La décennie qui vient de s'écouler aura aussi été marquée par une prise de conscience progressive du fait qu'il ne suffisait pas de disposer d'une batterie d'indicateurs de suivi pour atteindre des résultats concrets en matière de lutte contre la pauvreté mais qu'il fallait fixer des objectifs clairs sur les résultats à atteindre pour déterminer les leviers adaptés en matière d’action publique. C'est ainsi qu'après des expériences pionnières, menées par le Canada, l'Irlande et la Grande Bretagne, une vingtaine de pays européens se sont, aujourd'hui, fixé des objectifs quantifiés en matière de lutte contre la pauvreté des enfants.

 

Comme nombre d'acteurs engagés dans la lutte contre l'exclusion, l'Observatoire s'est félicité de l'engagement, dans notre pays, à votre initiative Monsieur le Haut commissaire, d'une démarche volontariste de lutte contre la pauvreté et de la fixation d'un objectif de réduction d'un tiers de la pauvreté d'ici cinq ans. La loi du 1er décembre 2008 qui a généralisé le RSA et réformé les politiques d’insertion, a consacré juridiquement cette démarche. Le décret qui l'accompagne prévoit que la pauvreté est mesurée au moyen d'un tableau de bord qui comprend une série de 17 indicateurs principaux tous assortis d'objectifs quantifiés. Les avis formulés lors de la large concertation préalable à la loi ont conduit à replacer l'indicateur central de pauvreté monétaire ancré dans le temps dans un ensemble d'autres indicateurs qui seront suivis, en même temps, pour approcher la réalité multidimensionnelle de la pauvreté. L'existence de ce tableau de bord, très complet, pose bien sûr à l'Observatoire la question du devenir ou de l'adaptation de son propre tableau destiné, depuis 2005, à suivre dans le temps des indicateurs de pauvreté, de minima sociaux, de non accès aux droits fondamentaux et d'inégalités de revenus mais je suis sûre que les articulations pertinentes sauront être trouvées.

 

Au cours des dernières années, l'Observatoire a renforcé sa conviction, exprimée dès ses premiers travaux, qu'au-delà de la production de statistiques ou de la fixation d’objectifs quantifiés, il faut co-construire notre connaissance de la pauvreté avec le savoir des personnes qui la vivent. Les premières études menées à cette fin ont confirmé l’intensification de phénomènes d’angoisse chez les personnes pauvres, source d’un enfermement croissant et d’un découragement face aux difficultés rencontrées. Cette première expérience invite à penser autrement la pauvreté et l’exclusion sociale. Pour les personnes concernées, en effet, la pauvreté se présente d'abord comme une inadéquation entre les ressources et les libertés de choix. La lutte contre la pauvreté se définirait alors d’abord comme l’élargissement de leurs capacités à agir par elles-mêmes.

 

Après avoir célébré son 10ème anniversaire, l'Observatoire aborde désormais une nouvelle phase de son existence, ses missions vont être redéfinies et ses moyens repensés. La question de l'observation statistique n'est pas technique mais c'est un enjeu de société, car comme l'a dit la commission Stiglitz ce que l'on mesure a une incidence sur ce que l'on fait. La question de la mesure des inégalités reste donc posée à l'ONPES même si ses travaux passés l'ont plutôt conduit, conformément à sa mission, à centrer ses travaux sur les questions de pauvreté.

 

De même, la connaissance de la transmission intergénérationnelle de la pauvreté et la lutte contre la pauvreté des enfants sont elles indispensable à la construction d'une vraie stratégie de développement durable or, pour l'instant, des indicateurs de ce type ne figurent pas dans ceux qui ont été retenus pour le suivi de la stratégie française de développement durable.

 

Enfin, la question de la grande exclusion et de la misère des personnes invisibles reste posée à l'Observatoire, ces personnes qu'aucune statistique ne recense Celles qui vivent dans des institutions. Celles qui se cachent parce qu'elles ne veulent pas recourir à l'assistance ; celles qui vivent à l’abri des regards, dans des caves, des parkings ou des bordures de périphériques, celles qui ne croient plus qu'on puisse les aider. Celles qui ont rejoint l’Europe, comme le continent de leur rêve, mais qui n’y ont trouvé ni travail, ni logement, ni statut.

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