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Peines en droit pénal (18 12 2024)

Nous vous proposons aujourd’hui cette note publiée le 26 novembre 2024 sur le site Vie-publique (cliquer ici pour accéder au site Vie-publique)

https://www.vie-publique.fr/questions-reponses/296120-les-peines-en-droit-penal-le-point-en-cinq-questions.html

Principales, complémentaires, automatiques... Cinq questions sur les peines en droit pénal

Publié le 26 novembre 2024

 

En France, le droit pénal consacre le principe d'individualisation des sanctions prononcées par le juge dans le cadre de la loi. Le législateur a toutefois prévu des aménagements à ce principe. L'essentiel en cinq questions.

 

1 Qu'est-ce que le principe d'individualisation des peines ?

2 Quelles sont les limites au principe d'individualisation ?

3 Qu'est-ce qu'une peine complémentaire ?

4 Et la peine d'inéligibilité ?

5 Qu'étaient les peines "planchers" ?

 

1 Qu'est-ce que le principe d'individualisation des peines ?

En France, le juge fixe la peine dans les limites prévues par la loi mais aussi en fonction de la gravité de l'infraction, des circonstances, de la personnalité, de la situation sociale et familiale de l'auteur des faits. La sanction est personnalisée.

Le principe est inscrit à l'article 132-1 du code pénal et à l'article 707 du code de procédure pénale. Le code pénal prévoit aussi le régime des peines (articles 131-1 et suivants) et les modalités de leur personnalisation (articles 132-24 et suivants).

Le Conseil constitutionnel a reconnu la valeur constitutionnelle du principe d'individualisation des peines dans une décision du 22 juillet 2005, considérant qu'il découlait de l’article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789. 

Les juridictions disposent de nombreux outils pour moduler la peine en fonction des circonstances. Le principe d'individualisation des peines s'applique à la fois :

  • pendant le jugement : circonstances (aggravantes ou atténuantes) de l'infraction (action ou omission, préméditation, seul ou en groupe...), dispense de peine, sursis, semi-liberté, travail d'intérêt général (TIG), surveillance bracelet électr., etc. ;
  • pendant l'exécution de la peine (remise de peine, permissions de sortir, libération conditionnelle, par exemple), sur décision du juge d'application des peines (JAP).

2 Quelles sont les limites au principe d'individualisation ?

Le principe d’individualisation n’est pas absolu. Le Conseil constitutionnel (Décision QPC du 23 11 2018) a précisé que ce principe "ne saurait interdire au législateur de fixer des règles distinctes permettant l'engagement de procédures conduisant à l'application de plusieurs sanctions afin d'assurer une répression effective des infractions".

Le code pénal définit ainsi des peines minimales et des peines maximales. Dans certains cas, la durée de la peine (le quantum) s'impose au juge :

  • en cas de crime, la peine de prison encourue est de 15 ans jusqu'à la prison à vie. Les périodes de sûreté empêchent les aménagements de peine (suspension ou le fractionnement de la peine, le placement à l’extérieur...). La période de sûreté est automatique quand la condamnation est d'au moins 10 ans d'emprisonnement sans sursis. La perpétuité est "réelle" quand la peine de réclusion criminelle à perpétuité est assortie d'une période de sûreté illimitée ;
  • pour les délits, la durée de l’emprisonnement ferme ne peut être inférieure ou égale à un mois et l'emprisonnement est de 10 ans maximum.

Il existe aussi des peines automatiques et obligatoires qui constituent des limites au principe d'individualisation. Les peines automatiques concernent certaines infractions (amende forfaitaire par exemple). 

Dans les cas prévus, le juge doit prononcer une peine complémentaire obligatoire (confiscation du véhicule, injonction de soins, interdiction du territoire français...) sauf à motiver spécialement sa décision de l'écarter.

3 Qu'est-ce qu'une peine complémentaire ?

 

À côté des peines principales (amende, emprisonnement, peines alternatives), des peines complémentaires (secondaires) peuvent s'appliquer (interdictions ou des obligations) quand la loi le prévoit.

  • interdiction de conduire, d'exercer une activité, de se présenter à des élections, interdiction de séjour... ;
  • confiscation d'un objet ou d'un animal ;
  • obligations (suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière) (soin),...

Les peines complémentaires peuvent consister aussi en des mesures d'accompagnement (suivi socio-judiciaire à la sortie de prison).

La peine complémentaire s'ajoute à la peine principale. Elle est en principe facultative. Il existe toutefois des peines complémentaires obligatoires qui ne peuvent pas être écartées par le tribunal. Par exemple, le juge doit prononcer l’annulation du permis de conduire en cas de récidive de conduite sous l'emprise de stupéfiants. Pour écarter une peine complémentaire obligatoire, le juge doit spécialement motiver sa décision. 

4 Et la peine d'inéligibilité ?

 

La peine d'inéligibilité est une peine complémentaire prévue dans le code pénal (articles 131-26 et suivants). Le juge est libre de la prononcer. Elle est toutefois obligatoire dans les cas de crime et de certains délits énumérés par la loi (violences graves, agression sexuelles, discriminations, escroquerie, abus de confiance). L'inéligibilité est alors obligatoirement prononcée sauf si le juge décide le contraire par une décision spécialement motivée. Cette peine complémentaire a été instaurée par les lois du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique. Elle avait déjà été introduite mais de façon limitée par la loi "Sapin 2" du 9 décembre 2016 pour les délits de corruption, de prise illégale d’intérêts, de favoritisme, etc. 

Une peine automatique d’inéligibilité (art. L7 du c. électoral - abrogé depuis) créée en janvier 1995 pour les élus condamnés à plus de 6 ans d'emprisonnement pour manque au devoir de probité (abus de biens, corruption active ou de trafic d’influence, d’abus d’autorité, etc.). Le Conseil constitutionnel (décision QPC du 11 juin 2010) a jugé cette peine non constitutionnelle (principe d'individualisation des peines non respecté).

La peine d'inéligibilité est d'application complexe, par l'énoncé du code pénal (obligatoire tout en laissant une marge de manœuvre au juge) mais aussi parce que sa mise en œuvre dépend de différents éléments. Est-elle prononcée en cours de mandat ou avant les élections ? Est-elle accompagnée d'une exécution provisoire ou non ? Son exécution est-elle suspendue à la fin des recours ?

Lorsque la peine d'inéligibilité est prononcée au cours d'un mandat, le Conseil constitutionnel a jugé que l'inéligibilité, même assortie d'une exécution provisoire, est "sans effet sur le mandat en cours" (décision du 23 novembre 2021). 

L'inéligibilité entraîne l'interdiction définitive d'exercer un emploi public (radiation de la fonction publique). 

5 Qu'étaient les peines "planchers" ?

 

La loi du 10 août 2007 a mis en place des peines minimales (dites "peines planchers") pour certaines infractions en cas de récidive. Par exemple, une peine minimale d'au moins un tiers de la peine maximale prévue s'appliquait dès la première récidive pour les crimes et délits passibles d’au moins trois ans d’emprisonnement. Par ailleurs, l'atténuation de peine pour les mineurs entre 16 ans et 18 ans (réduction de moitié de la peine encourue) ne s’appliquait plus en cas de deuxième récidive pour les crimes ou délits avec violence ou les agressions sexuelles. Pour atténuer la peine et tenir compte des circonstances, le juge devait prononcer une décision "particulièrement motivée".

Dans sa décision du 9 août 2007, le Conseil constitutionnel a jugé les "peines planchers" conformes au principe d’individualisation des peines car la loi ouvrait la possibilité de prononcer des peines inférieures aux seuils fixés "en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur, des garanties d’insertion ou réinsertion". 

Les peines planchers ont été supprimées par la loi du 15 août 2014 sur l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales. 

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