Nous vous proposons aujourd’hui une 2e note relative à la santé mentale et au lien social publiée le 14 novembre 2025 sur le site Santé-publique (cliquer ici pour accéder au site Santé publique)
https://www.santepubliquefrance.fr/docs/le-lien-social-soutien-essentiel-de-la-sante-mentale
Le lien social, soutien essentiel de la santé mentale
par Arnaud Goulliart, délégué général de la Fédération française pour les liens sociaux.
L’ESSENTIEL
- Il est important de comprendre les facteurs de risque et de protection de la santé mentale pour agir sur ses déterminants environnementaux notamment, telles les conditions de vie. Parmi eux, les liens sociaux occupent une place structurante. En témoigne la résolution de l’Organisation mondiale de la santé, qui invite à en faire un axe prioritaire de la politique de santé, visant en particulier les populations isolées vulnérables.
La santé mentale est le fruit d’interactions complexes, tout au long de la vie, entre des dimensions individuelles, sociales et environnementales. Elle ne se limite pas à l’absence de troubles, mais englobe la capacité à faire face aux difficultés, à établir des relations et à participer à la vie sociale. Pour en comprendre les dynamiques, la littérature distingue les facteurs de risque – qui augmentent la probabilité d’une altération de la santé mentale – et les facteurs de protection – qui en favorisent le maintien ou la restauration. La distinction entre facteurs de risque et facteurs de protection ne relève pas d’une simple typologie. Elle reflète une façon de concevoir la santé mentale comme un processus évolutif et modulable.
Les facteurs de risque sont des caractéristiques individuelles ou des conditions sociales, économiques et environnementales qui fragilisent la santé mentale. À l’inverse, les facteurs de protection en soutiennent l’équilibre. Ils agissent souvent ensemble, dès la petite enfance et tout au long de la vie et peuvent être biologiques (vulnérabilités génétiques, antécédents familiaux), psychologiques (faible estime de soi, stratégies d’adaptation inefficaces) ou sociaux (précarité, perte d’emploi, difficultés scolaires, isolement et solitude, discrimination). La recherche insiste sur l’importance des facteurs modifiables, notamment ceux liés aux conditions de vie, comme la qualité du logement, l’accès aux soins, la stabilité de l’emploi, le niveau de revenu ou encore l’environnement social. Agir sur ces déterminants sociaux permet de réduire les risques et de renforcer durablement la santé mentale.
Parmi ces déterminants, les liens sociaux jouent un rôle particulièrement structurant. Ils désignent la façon dont les gens interagissent les uns avec les autres, couvrant les aspects structurels et fonctionnels, ainsi que la qualité de ces relations. Leurs effets sont bien documentés. Une méta-analyse de référence indique qu’un réseau social riche est associé à une réduction significative du risque de mortalité prématurée. Sur le plan psychologique, le soutien social favorise la régulation émotionnelle, diminue les effets du stress et renforce le sentiment de sécurité. À l’inverse, l’isolement social augmente le risque de troubles dépressifs, anxieux ou de conduites suicidaires, quel que soit l’âge.
Construire des communautés reliées
Le 23 mai 2025, lors de sa 78e Assemblée mondiale, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a adopté une résolution historique consacrée spécifiquement aux liens sociaux. Ce texte marque une étape décisive dans la reconnaissance des liens sociaux comme un déterminant majeur de la santé. Elle appelle les États membres à les intégrer (programmes d’amitié, groupes de soutien pairs, compagnons animaux et robots…) comme un axe prioritaire de santé. La résolution souligne également que la déconnexion sociale touche plus fortement certaines populations vulnérables. Elle appelle à davantage d’efforts inclusifs et intersectoriels pour construire des communautés plus reliées et plus résilientes.
Les liens sociaux ne tiennent pas seulement à la quantité de relations. Leur qualité, leur stabilité, la possibilité de les mobiliser en cas de besoin sont aussi essentielles. Promouvoir la santé mentale suppose de créer des environnements qui facilitent des relations durables, bienveillantes et accessibles. Il ne s’agit pas ainsi de soigner uniquement des troubles, mais de favoriser la santé relationnelle et sociale. Alors que les liens sociaux se fragilisent, réinvestir les ressources relationnelles et les solidarités de proximité, dans le domaine de l’urbanisme, des groupes communautaires ou encore de la prescription sociale, est devenu un enjeu de santé publique. C’est une façon de relier la santé mentale aux réalités sociales et aux territoires de vie.