SÉNAT (SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008)
PROJET DE LOI relatif aux organismes génétiquement modifiésprésenté au nom de M. FRANÇOIS FILLON, Premier ministre, par M. JEAN-LOUIS BORLOO,
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, messieurs,
Le présent projet de loi a pour objet de contribuer à la mise en oeuvre des recommandations formulées à l'issue des travaux du Grenelle de l'environnement dans le domaine des organismes génétiquement modifiés.
Les modifications législatives qui doivent être apportées au code de l'environnement, au code rural et au code de la santé publique ont pour ambition, dans le respect de nos obligations internationales et communautaires, de moderniser et de compléter le dispositif juridique en vigueur en le fondant sur les principes de transparence, de précaution, de prévention, d'information et de responsabilité, indispensables à une protection effective de l'environnement et de la santé publique. Elle garantit en outre le libre choix de consommer et de produire avec ou sans organisme génétiquement modifié.
Le projet de loi comporte un premier article fixant les principes encadrant l'expertise et la gestion des risques liés aux organismes génétiquement modifiés. Ensuite, six articles se répartissent entre trois chapitres successivement consacrés à la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés (chapitre Ier), à la responsabilité (chapitre II) et à la transparence (chapitre III). Enfin cinq articles contiennent des dispositions d'adaptation au droit communautaire en matière d'utilisation confinée (chapitre IV), ainsi que des dispositions nécessaires à l'adaptation et à la mise en cohérence des dispositions du code de l'environnement, du code rural et du code de la santé publique avec les articles des chapitres précédents (chapitres V et VI).
L'article 1er institue un nouvel article L. 531-1-1 dans le titre III du livre V du code de l'environnement relatif aux organismes génétiquement modifiés. Cet article rappelle les principes de précaution, de prévention, d'information et de responsabilité qui structurent le dispositif juridique régissant la production, les autorisations, la commercialisation, la culture, l'utilisation et la consommation des organismes génétiquement modifiés. En particulier, il convient de relever que l'information de l'administration et du public sur tout risque nouveau que les organismes génétiquement modifiés font courir à l'environnement et à la santé publique sera mise en oeuvre conformément aux obligations qui découlent de l'article 7 de la charte de l'environnement, de l'article L. 251-1 du code rural, des articles L. 124-1 et suivants et L. 535-1 du code de l'environnement.L'article 2, seule disposition du chapitre Ier, crée la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés. Cette Haute autorité a vocation à remplacer les instances d'expertise existantes (la Commission du génie génétique, la Commission du génie biomoléculaire et le Comité de biovigilance). Les articles L. 531-3 et L. 531-4 du code de l'environnement consacrés à cette nouvelle instance en définissent la mission et les conditions d'intervention, notamment en ce qui concerne l'élaboration des règles d'évaluation des risques sanitaires et environnementaux qui devra se faire conformément aux dispositions communautaires en vigueur. Ils précisent également les grandes lignes de son organisation. Un décret en Conseil d'État, prévu par l'article L. 531-5, en précisera la composition, les attributions, les règles de fonctionnement, de saisine et de déontologie.
L'article 3 modifie les articles L. 663-8 et L. 663-9 du code rural pour autoriser l'autorité administrative à fixer des conditions techniques, destinées à éviter la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions. Sont également prévues les règles relatives au contrôle du respect de ces prescriptions ainsi que les sanctions administratives possibles.
L'article 4, qui modifie les articles L. 671-14 et L. 671-15 du même code, détermine les délits et les peines applicables en cas de méconnaissance des articles L. 663-8 et L. 663-9.
L'article 5 insère au code rural les articles L. 663-10 et L. 663-11. L'article L. 663-10 instaure un régime de responsabilité de plein droit pour le préjudice économique qui pourrait résulter de la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans des cultures conventionnelles et biologiques (I et II). Tout exploitant mettant en culture des organismes génétiquement modifiés devra souscrire une garantie financière afin de se prémunir contre ce risque (III). L'article L. 663-11 rappelle que l'exploitant, mais aussi le distributeur, le détenteur de l'autorisation de mise sur le marché et le détenteur d'un certificat d'obtention végétale, restent responsables, dans les conditions de droit commun, de tout préjudice qui pourrait résulter de la mise en culture des organismes génétiquement modifiés.
L'article 6 consacre, par la modification que le 1° de son I apporte à l'article L. 251-1 du code rural, l'obligation pour toute personne cultivant des organismes génétiquement modifiés de déclarer les lieux où sont pratiquées ces cultures, mais aussi de communiquer les informations qui seront précisées par décret. Un registre national, mis à la disposition de tous, indiquera la nature et la localisation des cultures « OGM » à l'échelle de la parcelle. Y figureront diverses informations qui pourront se révéler pertinente à l'usage, comme les dates des semis. Le 3° du I confirme également que les missions du comité de biovigilance seront désormais assurées par la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés. Le II du même article met en place des sanctions pénales en cas de non respect de cette obligation de déclaration. Les exploitants qui ne respecteront pas cette obligation de déclaration, encourront jusqu'à six mois d'emprisonnement et 30 000 € d'amende.
L'article 7 clarifie la rédaction de l'article L. 535-3 relatif aux informations du dossier de demande d'autorisation de dissémination volontaires d'organismes génétiquement modifiés qui peuvent ou non être regardées comme confidentielles, en reprenant les termes mêmes de la directive.
L'article 8, seule disposition du chapitre IV, contribue à la transposition de la directive 98/81/CE du 26 octobre 1998 modifiant la directive 90/219/CE relative à l'utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés. Cette directive devait être transposée avant le 5 juin 2000. Le 17 octobre 2007, les autorités communautaires ont adressé une mise en demeure aux autorités françaises. Les dispositions de transposition concernent notamment les définitions, l'introduction du classement des utilisations confinées d'OGM en quatre classes, la procédure ainsi que les dispositions relatives à la confidentialité et aux informations ne pouvant rester confidentielles.
Par ailleurs, l'article 8 modifie l'article L. 515-13 du code de l'environnement pour soumettre l'utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés à des fins de production industrielle aux dispositions du titre III du livre V du code de l'environnement. La délivrance de l'agrément à des fins de production industrielle et de l'agrément à des fins de recherche, de développement ou d'enseignement sera donc soumise aux mêmes dispositions législatives. Toutefois, touchant deux domaines aux objectifs différents, les agréments ne seront pas délivrés par la même autorité administrative compétente. En ce qui concerne la recherche, le développement ou l'enseignement, les agréments continueront d'être délivrés par le ministre de la recherche.
Enfin, cet article regroupe dans un même article du code de l'environnement (L. 532-6) les dispositions relatives aux frais d'instruction des deux types de demandes d'agrément. Il modifie également l'article L. 536-3 afin d'instituer des sanctions pénales pour l'utilisation confinée à des fins de production industrielle en cas de non respect des prescriptions édictées par l'agrément ou de en violation d'une mesure de suspension ou de retrait d'agrément.
L'article 9 apporte diverses modifications au code de l'environnement. Celles-ci ont pour objet de tirer les conséquences de la création de la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés, d'améliorer la cohérence rédactionnelle des dispositions applicables à la dissémination volontaire des organismes génétiquement modifiés ou améliorer le dispositif (IX à XIV), de faciliter la lecture combinée des dispositions législatives et réglementaires applicables aux organismes génétiquement modifiés (II à VIII).
Les articles 10 et 11 tirent les conséquences des articles 2, 7 et 9 du projet et modifient les dispositions concernées du code rural et du code de la santé publique.
L'article 12 vient tirer les conséquences de la modification des articles L. 515-13 et L. 532-6, et supprimer les dispositions de la loi de finances rectificatives pour 1992 qui avait institué une taxe pour l'utilisation confinée des OGM à des fins de production industrielle. Le principe de la taxe ne disparaît pas, mais il sera désormais régi par les dispositions de l'article L. 532-6 du code de l'environnement.
L'article 13 fixe, en ce qui concerne la dissémination volontaire à toute autre fin que la mise sur le marché, la date d'entrée en vigueur des dispositions concernant les organismes génétiquement modifiés comportant des gènes marqueurs de résistance aux antibiotiques utilisés pour les traitements médicaux ou vétérinaires susceptibles d'avoir des effets préjudiciables pour l'environnement et pour la santé publique.