Rapport de la Cour des Comptes sur la situation et les perspectives des Finances Publiques
http://www.ccomptes.fr/fr/CC/documents/RSFPE/RSPFP2.pdf
Conclusion générale
La France a abordé la crise avec, en 2008, un déficit public de 3,4 % du PIB, nettement supérieur à celui de la moyenne des pays européens. Ce déficit est marginalement le résultat de la crise, dont les effets sur les finances publiques ont encore été très limités en 2008. Il est surtout le résultat d’une maladie chronique, l’incapacité de la France à rétablir l’équilibre de ses comptes en raison d’une insuffisante maîtrise des dépenses publiques et de baisses répétées des prélèvements obligatoires. Cela se traduit par un déficit structurel de l’ordre de 3,5 % du PIB.
C’est l’Etat qui a contribué le plus à ce déficit. Pour autant, la persistance d’un déficit du régime général de sécurité sociale d’environ 10 Md€ depuis six ans était, dès avant la crise, très préoccupante et la stabilité en 2008 du déficit des collectivités locales n’a tenu qu’à une baisse de l’investissement.
La dette publique a augmenté de 118 Md€ en 2008 pour atteindre 1 327 Md€, soit 68,1 % du PIB, et elle a généré 55 Md€ de charges financières, plus que le produit de l’impôt sur le revenu.
Le déficit public pourrait plus que doubler en 2009, du fait de la crise et des mesures de relance, et la dette dépasserait 75 % du PIB, hors emprunts de la société de financement de l’économie française (elle approcherait 80 % avec). Cette dégradation touchera plus particulièrement l’Etat, dont le déficit devrait représenter plus de la moitié du total de ses recettes nettes, et le régime général de sécurité sociale.
Le déficit public sera probablement encore supérieur à 6,0 % du PIB en 2012 et la dette approchera alors 90 % du PIB (hors SFEF). Les charges d’intérêt seraient alors supérieures de 20 Md€ à leur montant de 2008, soit l’équivalent de deux points de CSG, et représenteront 1000 € de plus par personne occupée.
Dans ces conditions, l’endettement pourrait augmenter de manière exponentielle. Les charges d’intérêt mobiliseraient alors une part excessive des ressources publiques et un risque pèserait sur la signature de l’Etat.
La reprise de la croissance est fondamentale et le rétablissement des finances publiques en dépendra largement. Le creusement des déficits publics est inévitable en phase de récession mais le succès de la politique de relance pourrait être remis en cause si le redressement à moyen terme des finances publiques n’était pas assuré et si la confiance des ménages et des investisseurs venait à faiblir.
Il serait peu prudent d’attendre que des remèdes hypothétiques, comme la hausse de la croissance potentielle ou la reprise de l’inflation, exonèrent la France des efforts de redressement nécessaires de ces comptes publics. Il faut donc démontrer rapidement qu’elle n’est pas engagée dans un processus d’alourdissement continu de sa dette publique. Plus la réduction de l’endettement sera retardée, plus elle sera difficile.
Dans un contexte de différentiels significatifs des taux d’intérêt entre Etats et de concurrence croissante des émetteurs publics, il est souhaitable de définir une stratégie d’assainissement pour accompagner la sortie de crise. Le niveau de la dette déjà atteint en 2008 et la progression qu’elle enregistrera avec la crise rendent d’autant plus important l’effort qui devra être mené. En tout état de cause, un ajustement de l’ordre de 3,5 points de PIB sera nécessaire pour revenir à un équilibre à moyen terme des comptes publics et réduire rapidement l’endettement.
Cet assainissement doit d’abord passer par une réduction du poids des dépenses publiques, suivant ainsi l’exemple de bien d’autres pays. Si leur réduction s’avérait insuffisante, une augmentation des prélèvements obligatoires serait nécessaire.
L’objectif de croissance des dépenses affiché à l’horizon de 2012 dans le rapport de présentation de la deuxième loi de finances rectificatives de 2009 ne correspond toutefois qu’à un ajustement insuffisant, d’un point de PIB seulement, et les économies que pourraient permettre les réformes déjà engagées sont elles-mêmes très loin de cet objectif.
De nouvelles réformes doivent donc être entreprises sans délai : la réduction progressive des effectifs de l’Etat, bien engagée maintenant, doit être poursuivie et ne plus négliger le champ des opérateurs. De même, il sera nécessaire, tout en tenant compte de leurs spécificités, d’amener la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière, à dégager également des gains substantiels de productivité.
La maîtrise des dépenses d’intervention de l’Etat, par la recherche d’une plus grande efficacité, doit être engagée. Les exemples étrangers montrent, en effet, que c’est dans ce domaine que se situent les gisements d’économies les plus importants.