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Le Conseil d’État annule la décision autorisant la mise sur le marché de l’insecticide «Cruiser» pour l’année 2010
L’Union nationale de l’apiculture française (UNAF) demandait l’annulation de la décision du ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche du 15 décembre 2009 autorisant, du 1er janvier au 31 décembre 2010, la mise sur le marché du produit phytopharmaceutique « Cruiser » pour un usage en traitement de semences pour la culture du maïs. Ce produit est un insecticide appliqué directement sur la graine pour lutter contre les insectes ravageurs du maïs.
La procédure d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques est encadrée par les dispositions de la directive 91/414/CEE du 15 juillet 1991 concernant la mise sur le marché de ces produits et, au niveau national, par celles des articles L. 253-1 et R. 253-38 et suivants du code rural. Ces dispositions prévoient que le ministre chargé de l’agriculture ne peut autoriser la mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique que si l’instruction de la demande présentée a établi l’innocuité à court comme à long terme du produit, son efficacité et sa sélectivité. Dans le cadre de cette procédure, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA1) doit délivrer un avis, qui ne lie cependant pas le ministre, sur la satisfaction de ces conditions. L’article R. 253-38 du code rural prévoit que les autorisations sont délivrées pour une durée de 10 ans, sauf hypothèses particulières prévues aux articles R. 253-44, R. 253-49 et R. 253-50.
En l’espèce, le Conseil d’Etat a jugé que la décision d’autorisation provisoire de mise sur le marché pour un an était illégale.
Pour ce faire, il a d’abord relevé que la demande d’autorisation n’entrait dans aucune des hypothèses limitativement énumérées par le code rural dans lesquelles il pouvait être dérogé à cette durée de 10 ans.
Il a ensuite estimé que, lorsque la demande n’entre pas dans ces hypothèses particulières, le ministre, qui doit se prononcer au vu de l’ensemble des éléments d’appréciation dont il dispose, notamment de l’avis délivré par l’AFSSA, ne peut que choisir entre deux décisions :
- soit, s’il juge que l’innocuité à court et long terme du produit ou son efficacité ne sont pas suffisamment établies, un refus d’autorisation ;
- soit, dans le cas contraire, une autorisation pour 10 ans.
En l’espèce, le Conseil d’Etat a jugé qu’en autorisant le Cruiser seulement pour une durée d’un an et en annonçant un réexamen complet du dossier à l’issue de cette année pour étudier la possibilité d’un renouvellement, le ministre devait nécessairement être regardé comme ayant justifié sa décision par le fait qu’au vu des éléments dont il disposait, il ne pouvait tenir pour suffisamment établie l’innocuité, notamment à long terme, du produit, motif qui ne pouvait le conduire qu’à prendre une décision de refus d’autorisation. Le Conseil d’Etat a en outre relevé que la succession de décisions d’autorisation valables pour un an seulement, accordées à la préparation Cruiser puis à la préparation, identique, Cruiser 350, était justifiée par le ministre en des termes contradictoires, par le fait que l’innocuité de ce produit était suffisamment établie mais qu’il était néanmoins indispensable de décider que l’autorisation serait réexaminée au bout d’un an, même en l’absence de tout élément nouveau. Il a jugé que cette manière de procéder était contraire au régime d’autorisation des produits phytopharmaceutiques.
En conséquence, le Conseil d’Etat a annulé la décision du 15 décembre 2009.
CE, 3 octobre 2011, Union nationale de l’apiculture française, n°336647.
(Voir également pour les autorisations du même produit sur les années 2008 et 2009, CE, 16 février 2011, Confédération paysanne et autres, n°s 314016, 314044, 314144, 325193, 325318, 325328).
(1) Depuis, l’AFSSA a été remplacée dans cette mission par l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – Anses, créée en juillet 2010.