Education Nationale : études INSEE (4 septembre 2008)
http://www.insee.fr/fr/publications-et-services/sommaire.asp?id=183&nivgeo=0
- Accès à l'enseignement supérieur en France : une démocratisation réelle mais de faible ampleur
- Éducation et mobilité sociale : la situation paradoxale des générations nées dans les années 1960
Accès à l'enseignement supérieur en France : une démocratisation réelle mais de faible ampleur
Valérie Albouy et Chloé Tavan
Résumé
La démocratisation lente et désormais ancienne de l’école concerne aussi l’enseignement supérieur. Mais l’ouverture rapide du supérieur depuis le début des années 1980 et la diversification de son offre éducative, notamment le développement des filières courtes à finalité professionnelle, invitent à réexaminer la question de la réduction des inégalités sociales devant l’école.
La réalité de cette démocratisation est en effet doublement contestée. D’une part, elle concernerait essentiellement les cycles courts du supérieur, le mouvement de démocratisation s’essoufflant pour les diplômes plus élevés. D’autre part, les inégalités auraient changé de forme et concerneraient désormais la nature des études suivies.
La compilation des enquêtes Emploi de 1990 à 2002 permet d’étudier l’évolution du lien entre origine sociale et diplôme à une échelle fine. L’ouverture du supérieur ne s’est pas accompagnée d’une pause dans le mouvement de démocratisation et ce, quel que soit le niveau de diplôme considéré. Plus encore, la démocratisation du supérieur a été de même ampleur à ses différents niveaux de diplômes. Elle a été en revanche moins marquée que celle du baccalauréat.
Mesurée à niveau de sélection constant, afin de neutraliser l’éventuelle dévalorisation des titres scolaires, la baisse de la sélectivité sociale du supérieur est encore avérée. La démocratisation du supérieur reste cependant de faible ampleur.
Pour les filles, la phase d’explosion du supérieur est allée de pair avec un renforcement de la polarisation sociale des différents domaines d’études. En particulier, celle des études de médecine et de droit, déjà marquée, s’est encore accrue. En revanche, la polarisation sociale des filières choisies par les garçons semble plutôt constante au fil des générations.
Éducation et mobilité sociale : la situation paradoxale des générations nées dans les années 1960
Camille Peugny
Résumé
Les difficultés rencontrées par les générations nées dans les années 1960 ont été illustrées par de nombreux travaux qui soulignent notamment l’existence d’inégalités entre les générations, en termes de salaire ou de mobilité en cours de carrière.
De telles inégalités, au détriment des générations nées au tournant des années 1960, apparaissent également lorsque l’on mesure l’évolution des flux de mobilité intergénérationnelle au fil des cohortes de naissance successives. En effet, si la part des individus qui parviennent à s’élever au-dessus de la condition de leurs parents demeure toujours supérieure à celle des déclassés, l’écart entre les deux flux diminue considérablement : en 2003, parmi les 35-39 ans, les ascendants ne sont plus que 1,4 fois plus nombreux que les descendants.
Cette dégradation des perspectives de mobilité sociale est généralisée aux enfants de toutes les origines sociales. Pour les individus issus des classes populaires, les trajectoires ascendantes sont plus rares, et pour ceux nés dans des milieux sociaux plus favorisés, les trajectoires descendantes se multiplient. Cette dégradation s’explique par des raisons structurelles (sous l’effet des difficultés économiques, la structure sociale s’élève moins rapidement vers le haut).
Pour autant, elle est paradoxale car le niveau d’éducation de ces générations est sans précédent. Ces deux évolutions contradictoires amènent à questionner l’évolution au fil des générations du poids du diplôme dans le statut social atteint. L’affaiblissement du lien entre diplôme et position sociale est mis en évidence, ce qui remet en cause l’idée de l’avènement progressif d’une société plus méritocratique.