Article mis en ligne le 17 février 2009 sur le site Seniorscopie (cliquer ici pour accéder au site seniorscopie)
http://www.seniorscopie.com/articles/les-projets-des-retraites-ecornes-par-l-aide-aux-enfants-et-le-soin-aux-parents.html
Un nouveau profil de boomers se dessine. Dans une situation financière confortable, ils avaient confiance dans leur futur et envisageaient sereinement leur retraite. Malgré cela, dans un laps de temps relativement court, tout change. Non seulement, ils se retrouvent en charge de leurs enfants mais aussi de leurs parents. Une situation qui nuit à leur consommation.
Une confiance absolue :
Harry Pemberton avait commencé à se retirer de la vie professionnelle. Avec son emprunt remboursé et ses enfants plus ou moins indépendants, il se préparait à une vie pleine d'aventures. Sa petite entreprise de sécurité, Fastness, peut désormais se passer de lui et sa femme Pamela a choisi de réduire son temps de travail. L'année dernière, le couple est parti faire un safari en Afrique du Sud. "Nous aimons dépasser nos limites", expliquait Harry. Prudent, le couple avait placé ses économies dans différentes compagnies choisies pour leur sécurité. Il était donc bien à l'abri.
Ils étaient aussi riches en liquidités qu'en temps libre. De quoi être heureux.
"Je n'ai jamais contracté d'investissements à risque", se défend aujourd'hui Harry Pemberton. Désormais, il regarde ses certitudes avec une triste perplexité. Harry et Pamela, la cinquantaine bien avancée, appartiennent à ces baby-boomers ridés par l'anxiété. Au contraire de leurs parents, ils n'ont pas eu à vivre de bouleversement. Les guerres, les famines ou les migrations n'ont pas touché cette génération. Il ne s'agissait que de travailler dur, d'économiser dur et l'on profiterait d'une retraite tout en gardant une réserve d'argent destinée aux enfants. Mais, depuis l'automne, deux éléments sont venus contrecarrer les plans de la famille.
Deux générations de dépendants
Toby, le fils cadet, diplômé de la Warwick University, a rejoint les 1,97 millions de chômeurs britanniques. Lui qui voulait travailler à la City est retourné vivre chez ses parents. Pendant ses années d'études, il a multiplié les dettes et les petits crédits. De petits crédits en petits crédits, le jeune homme a accumulé 2 500 livres de dettes (2700 euros). Ses parents sont les garants de ses crédits. Ils souhaiteraient pouvoir aider leur enfant pour ses achats immobiliers mais leurs propres économies sont écornées par d'autres dépenses.
Joan, la mère de Harry, ne peut plus vivre seule. A 82 ans, elle est atteinte de démence. Elle n'a pas d'économies et, depuis neuf mois, sa maison, en vente, n'a pas attiré un seul acheteur. Sa maladie ne cesse d'empirer, elle ne va donc pas tarder à demander une attention permanente à laquelle la famille ne peut, seule, répondre. Joan Pemberton doit donc rentrer en maison de retraite. En Angleterre, ce type d'établissement coûte entre 35 000 et 50 000 livres par an (38 000/55 000 euros). De leur côté, Harry et Pamela sont terrifiés à l'idée de l'installer dans une maison de retraite avant d'avoir pu vendre sa maison. Ils n'ont pas les moyens de pourvoir à une telle dépense. Les Pemberton font donc partie des trois millions de Britanniques qui doivent maintenant aider leurs parents. Ils se retrouvent donc en face de ce que Dominic Fraser-Smith de Norwich Union appelle "un dilemme émotionnel et financier généré par la prise en charge de deux générations de dépendants".
Des compromis comme solution
Pourtant, Harry est ce que l'on pourrait appeler un dépensier réfléchi. Il est fier de dire qu'il est très fort dans la gestion de l'argent. Malgré ses précautions, ses revenus ont chuté de 30% l'année dernière. Son capital, de 25%. Il sait aussi que sa maison a été dépréciée de 15% en dépit de l'aménagement d'une serre. Ce qui le contrarie le plus le couple, c'est que "le pire est à venir". Leur désillusion est complète. Ils réalisent qu'il n'existe pas de zone à l'abri pour leur économies. Ne rien faire n'est pas dans leurs habitudes. Harry va donc travailler davantage et sa femme, se remettre à travailler à temps plein. Elle a aussi dressé une liste d'économies pour contrer la hausse des dépenses obligatoires comme les charges ou les courses alimentaires. Elle a abandonné sa Peugeot 205 et Harry pense de plus en plus à échanger son Range Rover pour une voiture moins vorace en essence. A la place d'aller skier à Val d'Isère, la famille se rendra à Bansko, en Bulgarie où elle espère économiser près de 400 livres. Il en va de même pour leur vacances d'été, le Macchu Picchu était prévu, c'est en Turquie que le couple se rendra. Le couple n'est cependant pas prêt à tous les sacrifices. Hors de question pour Harry d'arrêter le golf et pour Pamela d'abandonner son programme de beauté Clarins.
Dix mois plus tôt, tout était rose pour la famille Pemberton. Harry aimerait interroger les responsables de ma crise : "Si j'avais fait de grosses erreurs dans ma compagnie, j'aurais été mis à la porte". Les Pemberton se sentent pénalisés pour leur prudence, mais lâchés par les professionnels auxquels ils vouaient une confiance absolue. L'année dernière, Harry racontait à une économiste : "Nous avons assez d'argent donc je ne m'inquiète pas. Nous sommes très confiants." Aujourd'hui, ils ne sont plus sûrs de rien.
(The Daily Telegraph, 16/02/2009 : "Even the prudent feel pain")