Une reprise fantôme ?
Que nous réserve l'économie des Etats-Unis et du monde ? Cette question suscitait l'an dernier une polémique entre deux camps. L'un annonçait que les Etats-Unis auraient à faire face à une récession en V, de courte durée - huit mois, comme les récessions de 1990-1991 et de 2001 - et peu profonde, avec un découplage entre la conjoncture mondiale et le ralentissement américain. L'autre camp, dont j'étais, soutenait qu'étant donné les effets de levier excessifs (dans les ménages, les institutions financières et les entreprises), il fallait s'attendre à une récession en U, de longue durée - vouée à durer vingt-quatre mois environ - et profonde, sans découplage entre la conjoncture mondiale et le ralentissement américain.
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Il y a également aujourd'hui deux raisons de craindre une récession en W. D'abord, la stratégie pour sortir de la politique de relâchement monétaire et budgétaire risque d'être bâclée parce que les responsables seront frappés d'anathème - qu'ils l'appliquent ou non. S'ils prennent au sérieux leurs déficits budgétaires (et la monétisation éventuelle de ces déficits), qu'ils augmentent les impôts, réduisent la dépense et épongent l'excédent de liquidités, ils risquent d'affaiblir encore davantage la reprise. Mais s'ils ne remédient pas à leurs énormes déficits budgétaires et continuent à les monétiser, les marchés obligataires se rebelleront tôt ou tard - une fois les forces déflationnistes atténuées. A ce stade, il faudra s'attendre à une poussée de l'inflation, à la hausse de la marge actuarielle des bons du Trésor, et la reprise en sera obstruée.
La deuxième raison qui fait craindre une récession en W a trait au fait que le pétrole, l'énergie et la nourriture risquent de subir une augmentation plus rapide que ne le préconisent les fondamentaux économiques, et cette augmentation pourrait encore être aggravée par le mur de liquidité qui attire à lui les actifs, ainsi que par la demande de spéculation. L'an dernier, l'économie mondiale a basculé quand le baril de pétrole a atteint 145 dollars, provoquant une onde de choc qui a touché les Etats-Unis, l'Europe, le Japon, la Chine et l'Inde - tous les pays importateurs de pétrole. L'économie mondiale s'en remet à peine aujourd'hui et, si ces mêmes forces spéculatives devaient faire grimper le baril à 100 dollars, le choc d'une contraction pourrait lui être fatal.
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