http://www.senat.fr/questions/base/2020/qSEQ200415504.html
Question écrite n° 15504 de Mme Nathalie Delattre (sénatrice de Gironde)
Mme Nathalie Delattre interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation concernant le soutien aux conversions pour la haute valeur environnementale (HVE). La HVE ne cesse de séduire de plus en plus d'exploitants agricoles. Pour preuve, le nombre d'exploitants agricoles a bondi de près de 50 % au premier semestre de 2019, passant de 1 518 à 2 272 exploitants certifiés. La filière du vin représente près de 84 % des certification HVE. La Gironde fait figure d'exemple dans ce domaine avec 500 exploitants certifiés dont 27 % d'exploitants viticoles. Cette certification HVE est essentielle afin d'accompagner au mieux les exploitants dans la transition agro-écologique. Cependant, cette démarche est parfois freinée en raison d'une hausse des investissements et du surcoût administratif qu'elle implique.
Dès lors, depuis 2018, la filière viticole, rejointe en 2019 par l'ensemble du secteur agricole, défend une proposition dans le cadre des débats sur le projet de loi de finances (PLF) visant à offrir un crédit d'impôt de 3 500 € - soit un montant équivalant à celui accordé à l'agriculture biologique – aux exploitations ayant obtenu une certification environnementale de niveau 3 (HVE) dans les prochaines années. Ce dispositif incitatif permettrait notamment d'accélérer l'engagement des viticulteurs dans la viticulture durable. De fait, un amendement discuté lors de l'examen du PLF pour 2020 aurait permis de mettre en place cette mesure.
Cependant, l'exécutif s'est montré défavorable à la mise en place de ce dispositif. Pour ce dernier, la solution face aux difficultés liées à la certification environnementale se trouve dans une simplification administrative et non pas dans une aide financière. Malgré l'intérêt que reconnaît le Gouvernement à cette mesure, celle-ci n'a toujours pas été intégrée dans un projet de loi. De nombreuses modifications ont été apportées à cette mesure dans le cadre des débats sur le PLF pour 2020, la destinant seulement aux petites entreprises puis aux très petites entreprises, toujours sans succès.
Toutefois, une avancée notable est à noter : au cours de l'examen en première lecture au Sénat, le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics a indiqué qu'il fallait hiérarchiser l'agriculture biologique et la HVE, et qu'un groupe de travail serait mis en place avec le ministère de l'agriculture pour trouver des solutions afin de soutenir l'agriculture biologique et la HVE tout en clarifiant cette hiérarchisation. En tant que coprésidente de l'association nationale des élus de la vigne et du vin, elle avait adressé au Gouvernement un courrier actant la nécessité de trouver des mesures incitatives pour favoriser le développement de la certification HVE. M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics avait alors répondu que le directeur général des finances publiques ferait un point sur ce dossier. Or, à ce jour, cela n'a toujours pas été fait. Elle lui demande donc à connaitre l'état d'avancement du travail de hiérarchisation entre l'agriculture biologique et la HVE et la mise en place de mesures de soutien au développement à la certification HVE.
Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée dans le JO Sénat du 17/09/2020 p. 4236
La société manifeste aujourd'hui une attention croissante aux conditions de production des produits alimentaires et exprime notamment des attentes nouvelles en terme de respect de l'environnement et de qualité des produits. Pour répondre à cette attente légitime, l'agriculture doit s'engager dans une nécessaire transition agro-écologique de ses pratiques. La production biologique et la haute valeur environnementale (HVE) sont deux modes de valorisation officiels permettant d'identifier les exploitations engagées dans des démarches respectueuses de l'environnement. Ces deux dispositifs répondent chacun à une logique propre et à un champ d'application spécifique.
La production biologique est encadrée par une règlementation européenne et constitue un signe officiel national de qualité. La production biologique atteste d'une excellence environnementale par la mise en place, tant au stade de la production et de l'élevage, qu'à toutes les étapes de fabrication d'un produit, de pratiques garantissant notamment l'absence d'utilisation de produits chimiques de synthèse et d'organismes génétiquement modifiés (OGM) ainsi que le respect de normes élevées en matière de bien-être des animaux.
La HVE atteste, quant à elle, de l'atteinte, sur l'ensemble de l'exploitation, de seuils de performance environnementale portant sur la protection de la biodiversité, la stratégie phytosanitaire, la gestion de la fertilisation et la gestion de l'irrigation. Ces deux dispositifs sont donc complémentaires dans l'objectif d'accompagner et de valoriser les agriculteurs réduisant l'impact de leurs pratiques sur l'environnement.
Le programme ambition bio 2022 accompagne le développement de la production biologique pour notamment atteindre 15 % de surface agricole utile en 2022 et servir 20 % de produits biologiques en restauration collective, en favorisant un équilibre de l'offre et de la demande privilégiant les productions des territoires. Pour ce qui concerne plus spécifiquement la HVE depuis les états généraux de l'alimentation notamment, de nombreux acteurs des filières agricoles et alimentaires se sont mobilisés pour développer ce dispositif.
À ce jour, c'est la filière vitivinicole qui est la plus engagée mais d'autres filières l'accompagnent progressivement : arboriculture, maraîchage, grandes culture, horticulture notamment. Le nombre d'exploitations certifiées de HVE connaît ainsi actuellement une forte croissance et 5 399 exploitations étaient certifiées au 1er janvier 2020. Pour accompagner ce dynamisme, plusieurs actions ont d'ores et déjà été mises en place. Le développement de la HVE est ainsi inscrit dans le « plan biodiversité » qui prévoit un objectif de 50 000 exploitations certifiées à l'horizon 2030. Par ailleurs, l'engagement des agriculteurs dans la HVE est soutenu dans le cadre de la mise en œuvre de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable. Ainsi, les produits issus des exploitations certifiées sont pris en compte pour atteindre l'objectif minimal de 50 % de produits alimentaires de qualité dans les achats de denrées de la restauration collective publique dès 2022, tel que prévu par l'article 24 relatif à la restauration collective. Une communication plus ciblée sur la HVE permettra également son développement.
Une première action importante en ce sens a été l'organisation, en collaboration avec l'association de développement de la HVE, des premières rencontres nationales de la HVE qui ont eu lieu le 13 février 2019 au ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Ces rencontres ont connu un important succès. Enfin, des travaux ont été initiés au sein de la commission nationale de la certification environnementale afin d'adapter le dispositif pour prendre en compte davantage les spécificités de certaines productions notamment pour ce qui concerne les filières animales et ainsi participer à dynamiser leur engagement dans le dispositif.
Dans le cadre du plan de relance et son volet agricole, alimentation et forêt, le Gouvernement a décidé de fortement soutenir le développement de HVE à travers un dispositif de crédit d'impôt. Celui-ci sera effectif dès 2021. C'est la conjugaison de l'action des pouvoirs publics, de l'engagement des filières et de la bonne reconnaissance des produits issus de ces dispositifs par les citoyens et consommateurs qui permettra de prendre définitivement la voie de l'agroécologie et de sa valorisation.