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Estimation de l’impact de la vaccination chez les personnes âgées de 75 ans et plus sur le risque de formes graves de Covid-19 en France à partir des données du Système National des Données de Santé (SNDS) – actualisation jusqu’au 20 juillet 2021
Auteurs : Kim Bouillon, Bérangère Baricault, Jérémie Botton, Marie-Joëlle Jabagi, Marion Bertrand, Laura Semenzato, Stéphane Le Vu, Jérôme Drouin, Rosemary Dray-Spira, Alain Weill, Mahmoud Zureik
Organisme : EPI-PHARE - Groupement d’intérêt scientifique (GIS) ANSM-CNAM www.epi-phare.fr
Présentation
L’objectif de cette étude est de comparer chez les personnes âgées de 75 ans et plus les risques de formes graves de COVID-19 (hospitalisation pour COVID-19 et décès au cours d’une hospitalisation pour COVID-19) entre les personnes vaccinées entre le 27 décembre 2020 et le 30 avril 2021 et celles qui ne l’étaient pas.
Les groupes « vaccinés » et « non vaccinés » ont été constitués, en appariant chronologiquement chaque sujet vacciné à un sujet non vacciné à la date de vaccination de mêmes âge, sexe, région administrative et type de résidence. Les personnes vaccinées et non vaccinées ont été suivies de la date de vaccination jusqu’au 20 juillet 2021.
Au total, 7,2 millions de personnes âgées de 75 ans et plus (3,6 millions vaccinés comparés à 3,6 millions non vaccinés) ont été incluses. Parmi les vaccinés, 85,3% avaient reçu le vaccin Pfizer, 8,7% le vaccin Moderna et 6,1% le vaccin AstraZeneca. Leur suivi médian, de la date de vaccination jusqu’au 20 juillet 2021, était de 51, 49 et 41 jours respectivement.
En conclusion, en vie réelle, tous les vaccins contre la COVID-19 étudiés sont hautement efficaces et ont un effet majeur sur la réduction des risques de formes graves de COVID-19 chez les personnes âgées de 75 ans et plus en France. La poursuite du suivi permettra de mesurer l’évolution de l’efficacité sur une plus longue période et de mieux caractériser les effets du variant Delta.
Introduction
Dans le cadre du dispositif renforcé de surveillance des vaccins contre la maladie à coronavirus (COVID19), un suivi pharmaco-épidémiologique rapproché est mis en œuvre par le Groupement d’Intérêt Scientifique EPI-PHARE (GIS ANSM-CNAM).
La vaccination contre la COVID-19 a débuté le 27 décembre 2020 chez les résidents d’établissements accueillant des personnes âgées (EHPAD) et résidents en services de longs séjours (USLD). A partir du 18 janvier, elle a été étendue à l’ensemble des personnes de 75 ans et plus, et celles souffrant de pathologies à haut risque (cancers, de maladies rares et/ou transplantées), quel que soit leur âge.
Les vaccins disponibles en France au moment de l’étude sont de deux types : vaccins à ARN messager (ARNm) comme ceux de Pfizer-BioNTech et de Moderna et vaccins à adénovirus comme ceux d’Oxford-AstraZeneca et de Janssen. Compte tenu de la mise sur le marché plus récente du vaccin Janssen, ce dernier n’est pas étudié ici mais fera l’objet d’une étude spécifique. Pour faciliter la lecture des résultats, nous avons nommé les vaccins en utilisant le nom de leur laboratoire de fabrication (« Pfizer », « Moderna », et « AstraZeneca »). Bien que le vaccin AstraZeneca n’ait pas été recommandé pour les personnes âgées de 75 ans et plus, en vie réelle, il a parfois été utilisé dans cette population ; ce qui nous a permis d’apporter des résultats d’efficacité également dans cette population.
Le présent rapport fait suite au précédent1 publié sur l’estimation de l’impact de la vaccination sur le risque de formes graves de COVID-19 chez les personnes âgées de 75 ans et plus en France. En comparaison à ce dernier, celui-ci présente les résultats de l’étude incluant 1) les personnes âgées vaccinées sur une plus longue fenêtre de temps (entre le 27 décembre 2020 et le 30 avril 2021) et suivies sur une période plus longue (jusqu’au 20 juillet 2021), 2) le vaccin « AstreZeneca », et 3) des analyses menées par vaccin.
L’objectif de cette étude était d’estimer l’impact de la vaccination contre la COVID-19 sur le risque de forme grave de COVID-19 chez les personnes âgées, en comparant les risques d’hospitalisation pour COVID-19 et de décès au cours d’une hospitalisation pour COVID-19 entre les personnes âgées de 75 ans et plus vaccinées entre le 27 décembre 2020 et le 30 avril 2021 et celles qui ne l’étaient pas.
Synthèse et interprétation
Les résultats de cette étude montrent que chez les personnes âgées de 75 ans et plus, les vaccins Pfizer, Moderna et AstraZeneca ont été très efficaces pour réduire le risque de forme grave de COVID-19 en France jusqu’au 20 juillet 2021 avec une réduction du risque d’hospitalisation pour COVID-19 atteignant 92% à 96% par spécialité de vaccin et une réduction du risque de décès lors d’une hospitalisation pour COVID-19 du même ordre de grandeur. Les résultats montrent que la réduction du risque a persisté dans le temps, atteignant encore 94% à 5 mois de suivi. Nous ne disposons pas de résultats au-delà de 5 mois du suivi.
Il est à noter que l’interprétation de la réduction du risque pour AstraZeneca doit être faite avec prudence. Premièrement, ce vaccin n’a pas été recommandé par les autorités de santé pour la population âgée de 75 ans et plus et a été tout de même utilisé par 6% (n=221 156) de personnes vaccinées dans notre étude. Deuxièmement, le délai entre les 2 injections d’AstraZeneca était bien plus long que celui pour Pfizer et Moderna. Et enfin, les effectifs d’AstraZeneca et de leurs témoins étaient plus faibles pour étudier la réduction du risque à partir du 14ème jour après la seconde dose.
Dans la 1ère semaine après la 1ère injection, on ne s’attendrait pas à observer une forte réduction du risque d’hospitalisation pour COVID-19 ; cette durée n’étant pas suffisante pour développer une immunité efficace due au vaccin. Or dans les 6 premiers jours, on a observé une réduction du risque variant entre 66% et 73% alors qu’elle variait entre 12 à 37% du 7ème au 13ème jour.
La réduction dans les 6 premiers jours est probablement liée à un biais d’indication dû à 2 tendances :
- la sélection des personnes en meilleure santé et/ou aux comportements de santé plus prudents qui chercheraient à être vaccinées plus tôt ou à qui l’on proposerait plus facilement une vaccination et qui éviteraient d’être exposés au coronavirus lors de la vaccination,
- la contre-indication à la vaccination des personnes ayant des symptômes évocateurs de la COVID-19 comme la fièvre qui seraient plus susceptibles d’être sélectionnées dans le groupe non vacciné.
Il est possible que la réduction du risque des formes graves de COVID-19 observée dans cette étude soit sous-estimée car elle ne tient pas compte de la protection des non vaccinés par les vaccinés (immunité collective) ni de l’immunité naturelle acquise par l’infection qui diminue le risque de forme sévère chez les non-vaccinés.
Afin d’approcher l’impact du variant Delta, nous avons estimé la réduction du risque d’hospitalisation pour COVID-19 à partir du 14ème jour après l’injection de la seconde dose pour les sujets dont le suivi était postérieur au 20 juin 2021. Elle était de 84%. Cette approche, basée sur une courte période (20 juin et 20 juillet 2021), ne permet cependant pas d’évaluer de manière définitive l’effet du variant Delta sur la réduction du risque.