INSEE : Note de conjoncture (décembre 2007)
France : onde de choc amortieComme en témoigne un troisième trimestre supérieur aux attentes dans de nombreux pays, la croissance mondiale devrait avoir assez bien résisté aux multiples chocs qui l’ont affectée en 2007 : chute jusqu’ici ininterrompue du marché immobilier américain ; crise des prêts immobiliers à haut risque aux États-Unis débouchant, à partir du mois d’août, sur une panne de liquidité générale ; forte hausse des cours du pétrole au second semestre…
L'effet de ces chocs sur l'économie mondiale devrait se matérialiser plus nettement en 2008. Dans tous les pays, l'investissement des entreprises pâtirait du durcissement des conditions de financement, et le prélèvement inflationniste exercé par les matières premières agricoles et énergétiques freinerait la consommation des ménages. Dans les pays anglo-saxons, celle-ci serait en outre affectée par la baisse des prix immobiliers et le tarissement des financements appuyés sur la valeur des logements.
Le ralentissement de l'activité serait net aux États-Unis et au Royaume-Uni. Il serait plus limité en zone euro, comme en témoigne la bonne résistance des enquêtes de conjoncture au cours des derniers mois, et en Asie.
La France a jusqu'à présent échappé au ralentissement général. L'écart de croissance avec l'Allemagne, comme avec l'ensemble de nos partenaires européens, s'était creusé en défaveur de la France lorsque l'activité de la zone avait accéléré en 2006 ; il a disparu depuis deux à trois trimestres. Les pertes de part de marché des exportateurs français semblent s'atténuer et l'investissement des entreprises est soutenu par la montée du taux d'utilisation des capacités.
Toutefois, l'économie française ne devrait pas échapper entièrement au ralentissement mondial. En l'absence de grèves dans les transports, la croissance du PIB français aurait été de 0,6 % au quatrième trimestre 2007 puis de 0,4 % par trimestre au cours du premier semestre de 2008.
Les grèves viendraient altérer à la marge ce profil, en abaissant d'un dixième de point la croissance du quatrième trimestre et en la relevant d'autant au premier trimestre de 2008.
La nette appréciation de l'euro devrait peser sur les exportations à la fin de 2007 et au début de 2008. L'investissement des entreprises, encore dynamique en fin d'année 2007 selon les enquêtes de conjoncture, serait progressivement freiné par le durcissement des conditions de financement et le ralentissement de la demande étrangère. La consommation serait soumise, quant à elle, à des influences contradictoires : la hausse de l'inflation énergétique et alimentaire pèserait sur le revenu réel des ménages mais ceux-ci parviendraient cependant à maintenir leur rythme de consommation en abaissant leur taux d'épargne, corrigeant ainsi en partie sa forte progression de début 2007.
Les créations d'emploi devraient également fléchir et le chômage baisser moins rapidement. Le taux de chômage au sens du BIT reviendrait néanmoins à 7,7 % de la population active au deuxième trimestre de 2008.
L'ampleur et la durée de la crise de liquidités actuelle constituent la principale source d'incertitude affectant cette prévision : si elle se prolonge, la pénurie de liquidités pourrait entraver de nombreuses décisions d'investissement et le ralentissement de l'économie mondiale s'accentuerait ; à l'inverse, si elle devait se résoudre rapidement, l'assouplissement des conditions de financement qui en résulterait, amplifié aux États-Unis par les baisses de taux directeurs déjà décidées par la Réserve fédérale, pourrait entraîner un redémarrage rapide de la croissance. La stabilité du climat des affaires dont témoignent les enquêtes de conjoncture, malgré la dégradation de l'environnement international, signale peut-être que la France dispose de ressorts internes lui permettant de résister mieux que prévu au ralentissement général.