Protection juridique : pour qui, pourquoi ? Que faut-il penser de ce dispositif ? (2)
Fiche juridique n°2 de YM lue le 27 février 2008 sur le site Age village
Le système de protection des " majeurs incapables " ne remplit plus sa fonction.
Le système de tutelle-curatelle ne remplit plus sa fonction. Tel est le constat établi dans le courant de l'année 1999 par une triple mission d'inspection des ministères des Finances, de la Justice et des Affaires sociales. Un rapport commandé par ces trois ministères et rendu public mardi 24 novembre 1999, a mis noir sur blanc une série de dysfonctionnements.
La protection juridique a dérivé de son cadre initial
Destiné à l'origine aux déficients mentaux ou aux personnes âgées dépendantes, le système de protection des majeurs incapables - tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice - prend désormais en charge des personnes surendettées, des majeurs " alcooliques ou toxicomanes, marginaux ou en voie de marginalisation, ayant perdu pied à la suite d'un divorce ou de la perte d'un travail ".
Le nombre de placements sous tutelle a augmenté de 44 % entre 1990 et 1996, pour toucher aujourd'hui 500 000 personnes, soit environ 1 % de la population majeure du pays.
- 50 000 nouvelles mesures de placement en curatelle-tutelle sont prononcées chaque année.
- A ce rythme, la France comptera un million de mises sous tutelle en 2009 (1 Français sur 65).
Les textes ont vieilli.
Les textes ne correspondent plus à la réalité sociologique du pays. Ainsi l'obligation alimentaire, à l'origine, n'avait d'autre but que d'obliger les familles à offrir un bol de soupe à un parent dans le besoin. Aujourd'hui, cette même obligation alimentaire peut impliquer la participation des familles au placement dans une maison de retraite à 15 000 francs par mois.La sauvegarde de justice aurait pu représenter un cadre juridique satisfaisant pour bon nombre de situations familiales. En réalité, elle est devenue un état transitoire menant à des formes de " protection " plus sévères comme la curatelle et la tutelle. Or la difficulté de mesurer l'incapacité d'une personne dépendante rend le juge incertain, il ne sait jamais si une protection plus légère n'aurait pas été mieux indiquée.
Les juges travaillent à l'aveuglette
Le rapport interministériel a aussi révélé une carence de l'enquête. Seul un majeur sur trois est entendu par les juges, certains ne " voyant guère l'intérêt " d'auditionner les malades atteints d'altérations graves ". Isolé et surchargé, souvent jeune et inexpérimenté, le juge a tendance à fonder sa décision sur l'expertise médicale. L'avis du médecin spécialiste est alors suivi 9 fois sur 10.
Contrôle inexistant
Le contrôle après décision judiciaire est inexistant. Rien ne vient certifier que les membres de la famille - quand la tutelle leur est confiée - agissent dans l'intérêt de la personne âgée. La tutelle peut dissimuler une forme de spoliation légale jamais réprimée. Tuteurs et curateurs doivent pourtant présenter chaque année un bilan comptable de leur gestion aux greffiers en chef des tribunaux d'instance. Or la mission d'inspection interministérielle a relevé que chacun d'eux doit vérifier entre 2 500 et 3 000 comptes par an, soit environ une demi-heure par dossier...