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Retraites : évolution et perspectives (17 09 2022)

Nous vous proposons aujourd’hui la synthèse du rapport publiée le 15 septembre 2022 sur le site du Conseil d’Orientation des Retraites (cliquer ici pour accéder au site du C.O.R.)

https://www.cor-retraites.fr/node/595.html

 

Cliquer ici pour accéder au texte complet (342 p.) du rapport pdf du Conseil d’Orientation des Retraites (C.O.R.)

https://www.cor-retraites.fr/sites/default/files/2022-09/RA_COR2022.pdf

Retraites : évolution et perspectives 

  1. Une dynamique des dépenses de retraite globalement toujours contenue par rapport à l’évolution de la richesse nationale, mais un niveau en augmentation par rapport aux dernières projections

 

Les dépenses du système de retraite rapportées au PIB constituent un indicateur déterminant pour évaluer la soutenabilité financière du système de retraite ; il exprime, de manière globale et synthétique, le niveau des prélèvements qu’il faut opérer sur la richesse produite par les actifs pour assurer l’équilibre.

 

Sur la période 2021-2027, couverte par les prévisions du gouvernement établies dans le cadre du programme de stabilité, les dépenses de retraite dans le PIB seraient globalement stables. Elles passeraient de 13,8 % en 2021 à 13,9 % du PIB en 2027.

 

En revanche, de 2028 à 2032, la part des dépenses de retraite serait en hausse, pour atteindre 14,2 % pour le scénario 1,6% à 14,7 % pour le scénario 0,7 %. Dans le cadre du modèle de projection du COR, la période 2028-2032 est une période de raccordement entre les prévisions établies par le gouvernement pour la période 2022-2027 et l’après 2032, où l’évolution économique est dictée par les hypothèses de chômage et de croissance de la productivité du travail retenues par le COR (taux de chômage à 7% ; quatre scénarios d’évolution de la productivité du travail allant de 0,7 % à 1,6 %). Dans les rapports précédents, cette période de raccordement ne marquait pas de rupture nette de tendance. Une telle rupture apparait dans le rapport 2022 car le gouvernement prévoit désormais une baisse du taux de chômage à 5% en 2027, soit deux points de moins que la cible retenue par le COR en 2032. De ce fait, la croissance est fortement déprimée sur la période 2028-2032 ; l’emploi diminue par l’augmentation du taux de chômage entre 2028 et 2032. Il s’agit là d’un artefact lié à la méthode de projection : rien ne permet d’anticiper que la conjoncture économique sera particulièrement déprimée sur la période 2028-2032.

 

À plus long terme, de 2032 jusqu’à 2070, malgré le vieillissement progressif de la population française la part des dépenses de retraite dans la richesse nationale serait stable ou en diminution. Ce résultat peut sembler contre-intuitif au regard du vieillissement démographique attendu qui viendra inéluctablement peser sur les dépenses de retraite futures, en alourdissant le nombre de retraités relativement au nombre de cotisants. Cette évolution démographique défavorable est contrebalancée, d’une part par le recul de l’âge de départ à la retraite qui passerait de 62 ans à 64 ans du fait des réformes déjà votées ; et, d’autre part, par la moindre augmentation du niveau de vie des retraités relativement aux actifs. Du fait de l’indexation du système de retraite sur les prix, la pension moyenne continuerait de croître en euros constants, mais moins vite que les revenus d’activité moyens (qui bénéficient des gains de productivité en sus de l’inflation). Le niveau de vie des retraités rapporté à celui de l’ensemble de la population serait ainsi compris, en 2070, entre 75,5 % et 87,2 % contre 101,5 % en 2019. La stabilisation/diminution de la part des dépenses de retraite dans le PIB a pour contrepartie la diminution relative – et non absolue – du niveau de vie des retraités par rapport à l’ensemble de la population.

 

 

En 2070, la part des dépenses de retraite dans le PIB serait comprise dans une fourchette allant de 12,1 % à 14,7 %. Pour un même scénario d’évolution de la productivité du travail, cette part serait plus élevée que dans l’exercice précédent du fait notamment des nouvelles projections démographiques moins favorables pour l’évolution de la population active.

 

Au regard de ces résultats, il ne revient pas au COR de se positionner sur le choix du dimensionnement du système de retraite. Selon les préférences politiques, il est parfaitement légitime de défendre que ces niveaux sont trop ou pas assez élevés, et qu’il faut ou non mettre en œuvre une réforme du système de retraite.

 

En particulier, même si les dépenses de retraites se stabilisent en part de PIB sur la période 2022-2027, leur rythme d’évolution spontanée ne semble pas compatible avec les objectifs du gouvernement inscrits dans le programme de stabilité de juillet 2022, même si tous les membres du COR ne se sentent pas liés avec ces objectifs. Pour tenir ces objectifs, la croissance des dépenses publiques devrait être limitée à 0,6 % en volume entre 2022 et 2027. Or les dépenses de retraites qui représentent le quart de ces dépenses publiques progresseraient sur la période de 1,8 % en termes réels.

 

En revanche, les résultats de ce rapport ne valident pas le bien-fondé des discours qui mettent en avant l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraite.

 

  1. Après avoir enregistré des excédents en 2021 et 2022, le système de retraite serait déficitaire en moyenne sur les 25 prochaines années

 

L’évolution de la part des dépenses de retraite dans le PIB synthétise le montant du prélèvement sur la richesse produite par les actifs nécessaire pour équilibrer les régimes de retraite. Toutefois, le débat public se structurant autour du solde, le COR ne peut pas faire l’économie de proposer une estimation des soldes futurs qui mettent en regard des dépenses à financer les recettes allouées au système de retraite.

 

Normalement, un système de retraite en répartition est financé par les cotisations des actifs en emploi prélevées sur leurs salaires bruts selon un taux de cotisation déterminé. Dans ce cas, les ressources du système de retraite, à taux de cotisation inchangé, évoluent comme le PIB et l’évolution du solde n’est que le reflet de l’évolution de la part des dépenses de retraite dans le PIB.

 

Toutefois, notre système de retraite est aussi financé par des contributions de l’État destinées à assurer l’équilibre financier du régime de la fonction publique de l’État et de certains régimes spéciaux (SNCF, RATP, régimes des mines, marins ou encore régime des ouvriers de l’État). Les montants de ces contributions et subventions d’équilibre ne découlent pas de la fixation ex ante de taux de cotisations et sont par nature discrétionnaires. Leur projection dépend donc nécessairement de conventions.

 

Les membres du COR ont ainsi décidé cette année de présenter les ressources et le solde du système de retraite selon deux conventions comptables concernant le régime de la fonction publique de l’État et certains régimes spéciaux : la convention EPR (Équilibre Permanent des Régimes) qui les équilibre année après année ; et la convention EEC (Effort de l’État Constant) où la part de la contribution de l’État à ces régimes dans le PIB est constante en projection.

 

Le choix de ces deux conventions par le COR est cohérent avec les recommandations du CSR et la position du gouvernement qui, lorsqu'il a fixé un objectif de rééquilibrage à la Conférence de financement, réunie sous l'égide de M. Marette fin 2019, l'avait déterminé en faisant la moyenne des déficits prévisionnels dans les conventions EPR et EEC à l'horizon 2027.

 

La convention EPR reflète la législation actuelle du système de retraite, elle sert notamment de base aux débats sur les lois de financement de la sécurité sociale. Elle présente l’intérêt d’alerter sur le besoin de financement des régimes ne bénéficiant pas de subventions d’équilibre. Elle ne donne cependant par construction aucune indication sur la situation financière des régimes équilibrés financièrement par l’État (près d’un quart des dépenses de l’ensemble du système de retraite).

 

La convention EEC permet quant à elle de mettre en lumière les redéploiements des flux financiers qu’il serait possible d’opérer entre les régimes équilibrés dont les dépenses sont appelées à diminuer et les autres régimes, dès lors que la contribution de l’Etat au financement des retraites resterait constante en part de PIB.

 

En 2021, le système de retraite a été excédentaire de près de 900 millions d’euros. Cette nette amélioration par rapport à 2020 s’explique en très grande partie par la croissance importante des ressources due au rebond de l’activité, alors que l’effet de la surmortalité des retraités liée à la covid sur les dépenses de retraite est resté limité. Elle se prolongerait en 2022 et le système connaîtrait un excédent de 3,2 milliards d’euros (0,1 point de PIB).

 

De 2022 à 2032, la situation financière du système de retraite se détériorerait avec un déficit allant de -0,5 point de PIB à -0,8 point de PIB en fonction de la convention et du scénario retenu. La dégradation de la situation financière de début de période (2022-2027) est principalement à relier à la dégradation de la part des ressources dans la richesse nationale : la baisse de la part des traitements indiciaires des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers cotisant à la CNRACL dans la masse totale des rémunérations a un effet négatif sur la part des ressources dans le PIB, ce régime ne bénéficiant pas de la contribution d’équilibre et ayant un taux de cotisation supérieur aux personnes en emploi dans le privé. Il convient de souligner le caractère paradoxal de ce résultat, les mesures d’économie sur la masse salariale publique se traduisant par une détérioration du solde du système de retraite. La dégradation du solde global se prolongerait de 2028 à 2032 avec la période de faible croissance liée à la transition du taux de chômage vers sa cible de long terme. Le creusement du déficit serait alors largement porté par les régimes de base du secteur privé. Avec une cible de taux de chômage à 4,5 % et non plus de 7 %, le déficit serait moindre à l’horizon 2032 mais s’élèverait encore à -0,5 point de PIB.

 

Sur les 25 prochaines années, le système de retraite serait en moyenne déficitaire, quels que soient la convention et le scénario retenus. À plus long terme, la situation financière du système de retraite dépendrait fortement de la convention et du scénario retenus. Avec la convention EPR, le solde du système de retraite resterait négatif à moyen terme dans l’ensemble des scénarios et ne reviendrait progressivement positif que dans le scénario 1,6 %. Le système de retraite resterait durablement en besoin de financement dans les autres scénarios (de -1,9 % du PIB dans le scénario 0,7 % et -0,4 % dans le scénario 1,3 %). Avec la convention EEC, le système de retraite reviendrait progressivement à l’équilibre dans trois scénarios sur quatre. Le solde varierait entre -0,7 % (scénario 0,7 %) et 1,5 % (scénario 1,6 %) du PIB en 2070.

 

Pour apprécier les mérites respectifs de telle ou telle convention, il ne s’agit pas de défendre que l’une est plus « vraie » que l’autre (toutes sont des conventions) mais de mesurer avant tout leur apport pédagogique à la compréhension des mécanismes sous-jacents à notre système de retraite.

 

Quelle que soit la convention adoptée pour le calcul du solde retraite, le solde global des finances publiques n’en est pas affecté. Les diverses conventions en matière de solde retraite ne jouent que sur la part des ressources publiques affectées aux retraites : une convention qui dégrade relativement le solde retraite améliore la situation des finances publiques hors retraite (et inversement). Autant le solde des finances publiques a une consistance certaine, autant tous les soldes partiels au sein des finances publiques dépendent de conventions sur l’affectation des recettes et des dépenses.

 

Il a été récemment proposé une autre convention qui consisterait à égaliser le taux de cotisation employeur dans les régimes équilibrés à celui du secteur privé. Pour autant, considérer que le taux de cotisation du privé doit être appliqué aux fonctionnaires de l’État suggère que le taux de cotisation implicite de l’État est illégitime et renvoie à des avantages particuliers dont bénéficieraient les fonctionnaires de l’État. Or les travaux du COR ne concluent pas à une différence systématique et importante dans la « générosité » des régimes publics de droit commun par rapport au privé et qu’en les plaçant sur un pied d’égalité (même assiette de cotisation, même ratio démographique notamment), les taux pratiqués dans le public et le privé sont équivalents, autour de 25 % (voir le chapitre 2 de la partie 2). Les membres du COR ne souhaitent pas retenir cette approche qu’ils jugent inappropriée.

 

  • Un rapport marqué par de nouvelles hypothèses de projection globalement plus défavorables sur le long terme

 

Pour réaliser ces projections financières du système de retraite, le COR s’appuie sur un ensemble d’hypothèses économiques et démographiques qui ont été actualisées par rapport aux exercices précédents. Ces projections sont réalisées sur la base de la législation en vigueur et n’intègrent pas de réforme qui ne serait pas encore votée.

 

En ce qui concerne les hypothèses économiques de long terme, les membres du COR ont décidé de décliner les résultats des projections selon quatre nouveaux scénarios de gains de productivité du travail (scénarios 0,7 %, 1,0 %, 1,3 % et 1,6 %) associés à un taux de chômage à terme de 7 %. Cette décision collégiale correspond à une révision à la baisse de la fourchette utilisée précédemment (scénarios allant de 1,0 % à 1,8 %) et fait suite à une large consultation d’experts ainsi qu’à un colloque organisé en novembre 2021. Le débat économique actuel reste cependant très partagé entre « techno-optimistes » et « techno-pessimistes » sur l’avenir des gains de productivité – et notamment sur la possibilité ou non d’un choc positif de productivité lié à la révolution numérique. Aussi, ces quatre scénarios, dont aucun n’est privilégié, ne constituent pas une prévision à proprement parler mais ont pour ambition d’être suffisamment contrastés et raisonnables pour éclairer le débat sur les évolutions à long terme du système de retraite.

 

Le COR a besoin par ailleurs de s’appuyer sur un certain nombre d’hypothèses relatives à l’évolution de la population pour réaliser les projections financières du système de retraite. L’INSEE a publié des nouvelles projections démographiques en novembre 2021, et de nouvelles projections de population active en juin 2022. Les hypothèses centrales de fécondité et d’espérance de vie ont été révisées à la baisse. Le COR avait anticipé pour une large part ce recul dès 2021, le rapport 2022 intègre les récentes perspectives moins favorables en matière de population active.

 

Il convient enfin de souligner les fortes incertitudes qui entourent les travaux de projection présentés dans ce rapport. L’évolution du contexte économique des prochaines années dépendra notamment étroitement de celle de la situation internationale ainsi que celle de la situation sanitaire.

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