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Précarité financière et inflation (août 2022) (03 11 2022)

Nous vous proposons aujourd’hui cette note publiée le 13 octobre 2022 sur le site de l’INSEE (cliquer ici pour accéder au site de l’INSEE)

https://www.insee.fr/fr/statistiques/6542263.html

 

Avec l’inflation, une précarité financière en légère hausse, mais inférieure en août 2022 à son niveau d’avant-crise sanitaire

Marine Adam, Odran Bonnet et Tristan Loisel (Insee) - Paru le : 13/10/2022

L’inflation observée depuis l’été 2021 érode le pouvoir d’achat et fait craindre une dégradation de la situation financière de certains ménages. L’analyse de données bancaires jusqu’à l’été 2022 ne met pas en évidence une nette augmentation de la précarité financière. La part des ménages à découvert et celle des ménages avec peu d’avoirs sur leurs comptes, qui avaient diminué lors du premier confinement en 2020, demeurent en août 2022 à des niveaux inférieurs à ceux de 2019.

Néanmoins, la valeur des patrimoines financiers bruts, en forte augmentation depuis 2019, ralentit nettement et diminue même en euros constants depuis l’été 2021, notamment pour les ménages avec de faibles revenus. De plus, la proportion de ménages à découvert augmente lentement depuis début 2021. Enfin, les ménages semblent avoir diminué leurs dépenses de consommation en volume (euros constants), en particulier celles de carburant et d’énergie, contribuant ainsi à préserver leur situation financière.

Sommaire

Les patrimoines financiers bruts diminuent en euros constants depuis l’été 2021

Pas de nette hausse de la précarité financière consécutive à l’inflation

Moins de précarité financière en 2022 qu’en 2019, même parmi les ménages grands consommateurs d’énergie et de carburant

Face à l’augmentation des prix, les ménages diminuent leurs consommations de carburant et d’énergie en volume

 

Les patrimoines financiers bruts diminuent en euros constants depuis l’été 2021

 

Le patrimoine financier brut des ménages, en hausse notable pendant la crise sanitaire, ralentit depuis l’été 2021. De plus, l’inflation, qui érode la valeur des patrimoines financiers, a sensiblement augmenté depuis l’été 2021, pour atteindre 5,9 % en glissement annuel en août 2022. Sur la période récente, l’inflation est telle que le patrimoine financier brut, mesuré en euros constants, est inférieur en août 2022 à son niveau d’août 2021. Entre août 2021 et août 2022, le patrimoine financier brut au Crédit Mutuel Alliance Fédérale croît ainsi de 4,8 % en euros courants mais diminue de 1,0 % en euros constants 

À La Banque Postale, il augmente de 3,7 % en € courants et diminue de 2,2 % en € constants. Si ce patrimoine a décru en € constants depuis l’été 2021, il reste à la mi-2022 supérieur à son niveau pré-crise, y compris pour les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles.

Cette dynamique est à mettre en regard de l’évolution du patrimoine financier sur les 3 dernières années. Entre le premier trimestre 2019 et le premier trimestre 2022, pour l’ensemble des ménages, les encours des placements financiers, exprimés en euros courants, ont augmenté de 14 %. Sur les deux échantillons étudiés, les patrimoines financiers bruts ont également augmenté, en moyenne, de 23,5 % (soit 11 200 euros) depuis janvier 2020 sur l’échantillon du Crédit Mutuel Alliance Fédérale et de 18,4 % (soit 7 500 euros) sur celui de La Banque Postale. La croissance du patrimoine financier s’est accrue en 2020 du fait de la constitution d’une épargne consécutive à la baisse de la consommation liée aux restrictions sanitaires. L’augmentation du patrimoine financier brut s’observe chez tous les groupes de ménages, quel que soit leur niveau de revenus. Néanmoins, elle est plus forte pour les ménages aux revenus élevés. Ainsi, entre janvier 2020 et août 2022, le patrimoine des 25 % des ménages aux plus hauts revenus a crû de 25,6 % au Crédit Mutuel Alliance Fédérale et de 22,6 % à La Banque Postale, contre des hausses respectives de 16,4 % et 12,6 % pour les 25 % des ménages aux revenus les plus faibles. Ces évolutions reflètent à la fois le comportement d’épargne des clients et la fluctuation de la valeur des actifs. Les ménages modestes détiennent moins de comptes-titres et d’assurances vie et leurs avoirs sont donc moins soumis aux variations du cours de la bourse.

Pas de nette hausse de la précarité financière consécutive à l’inflation

L’évolution de la précarité est étudiée grâce à trois indicateurs : la proportion de ménages à découvert en fin de mois (patrimoine financier brut négatif), la proportion de ménages avec un patrimoine brut inférieur à trois fois le montant du seuil de pauvreté mensuel (1 102 euros en 2019 et ajusté ensuite selon l’évolution des prix) et la proportion de ménages avec plus de cinq jours de découvert dans le mois.

En août 2022, la proportion de ménages à découvert en fin de mois et la proportion de ménages avec plus de cinq jours de découvert dans le mois sont légèrement plus élevées que début 2021 sur les deux réseaux bancaires. Une hausse des indicateurs de précarité depuis l’été 2021 s’observe à La Banque Postale, dont la clientèle est en moyenne moins aisée qu’au Crédit Mutuel Alliance Fédérale. Cela peut être le signe de difficultés croissantes pour certains ménages. À ce titre, le Baromètre mensuel de l’inclusion bancaire de la Banque de France reporte également une hausse en 2022 de quelques indicateurs, comme le nombre d’inscriptions au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) qui remonte en mars 2022 et se stabilise à un niveau proche de celui de 2019.

En août 2022, les trois indicateurs de précarité demeurent néanmoins à des niveaux inférieurs à ceux de 2019, après avoir diminué lors des confinements en 2020 et 2021. Ces observations sont cohérentes avec les constats du Baromètre mensuel de l’inclusion bancaire qui souligne que les flux de dossiers de surendettement déposés, de demandes de droit au compte et d’inscriptions au fichier central des chèques (FCC) sont à des niveaux inférieurs à leurs niveaux de 2019.

Moins de précarité financière en 2022 qu’en 2019, même parmi les ménages grands consommateurs d’énergie et de carburant

L’inflation est particulièrement élevée sur les postes de dépenses d’énergie et carburant (22,2 % en glissement annuel en août et 28,5 % en juillet). Les ménages dont les dépenses en gaz, électricité et carburant représentent une grande part de leur consommation totale subissent ainsi une inflation plus élevée. La note de conjoncture de juin estime qu’en avril 2022, alors que l’inflation d’ensemble était de 4,9 % sur un an, les ménages des zones rurales ont été confrontés à un surcroît d’inflation de 1,0 point et les 10 % des ménages au niveau de vie le plus faible, à un surcroît de 0,4 point.

Au sein même de ces catégories, l’inflation subie est hétérogène : elle dépend notamment du niveau de dépenses d’énergie et de carburant. Les données du Crédit Mutuel Alliance Fédérale permettent d’isoler les grands consommateurs de carburant et d’énergie – plus de 100 euros par adulte et par mois en moyenne entre janvier 2020 et août 2022. Ils représentent 62 % de l’échantillon et 36 % parmi les ménages avec des faibles revenus. Les ménages modestes grands consommateurs de carburant et d’énergie sont étudiés spécifiquement dans la suite.

En août 2022, les patrimoines financiers bruts en euros constants des habitants des zones rurales et des ménages les plus modestes sont supérieurs à leurs niveaux de 2019, et les indicateurs de précarité inférieurs. Ce constat s’applique aussi aux ménages modestes ou ruraux qui consomment beaucoup d’énergie et de carburant. Le premier confinement de 2020 a en effet provoqué une hausse de l’épargne et une baisse des indicateurs de précarité chez tous ces groupes ; une période de relative stabilité s’en est suivie.

En revanche, depuis juillet 2021, le patrimoine financier brut en € courants des ménages modestes grands consommateurs de carburant et d’énergie n’augmente presque plus. Ainsi, le patrimoine financier brut moyen de ce groupe a diminué de 4,7 % en € constants entre août 2021 et 2022, contre 3,4 % pour l’ensemble des bas revenus et 1,0 % pour la population générale. Cela semble indiquer que la situation financière se tend en bas de la distribution des revenus pour certains ménages, sans impliquer, à ce stade, de hausse généralisée de la précarité financière.

Face à l’augmentation des prix, les ménages diminuent leurs consommations de carburant et d’énergie en volume

Depuis un an, les dépenses des ménages augmentent en euros courants, tirées par celles de carburant. Sur l’ensemble de l’échantillon du Crédit Mutuel Alliance Fédérale, les dépenses augmentent de 0,8 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 31 euros mensuels). Cette augmentation est nettement inférieure à l’augmentation des prix en glissement annuel sur la période : 6,0 %. Cela suggère que les ménages ont diminué leur consommation en volume afin de préserver leur situation financière. En particulier, ils semblent avoir diminué leurs dépenses de carburant et d’énergie en volume. Effectivement, ces dépenses augmentent de 13,8 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 32 euros mensuels), alors que l’augmentation des prix de l’énergie (y compris produits pétroliers) est de 30,7 % sur la période.

Les ménages avec de faibles revenus et une consommation élevée de carburant et d’énergie ont également ajusté leur consommation. Leurs dépenses augmentent de 1,5 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 32 euros mensuels). En particulier, leurs dépenses d’énergie et de carburant augmentent de 13,0 % en glissement annuel sur cette période (soit 32 euros mensuels), impliquant un recul de leur consommation en volume.

Les revenus ont, quant à eux, augmenté de 1,5 % en glissement annuel sur la période juin-juillet (soit 69 euros mensuels) pour l’ensemble des ménages (dans cet échantillon) et de 3,3 % (soit 72 euros mensuels) pour les ménages cumulant faibles revenus et importantes consommations de carburant et d’énergie. Plusieurs facteurs pourraient expliquer cette hausse des revenus, dont les hausses de salaires poussées notamment par les revalorisations automatiques du SMIC indexées sur l’inflation. Celui-ci a en effet augmenté de 5,85 % depuis un an. Les prestations sociales et familiales ont, quant à elles, été revalorisées de 1,8 % en avril 2022 et les pensions de retraite de 1,1 % en janvier 2022.

Cette croissance des revenus limite la dégradation de la situation financière. Toutefois, les revenus tels que mesurés dans ces données peuvent sous-estimer les contraintes pesant sur les ménages. Une partie des flux entrants considérés comme des revenus correspondent à des transferts d’un même ménage depuis une autre banque vers sa banque principale, ou des transferts entre différents ménages. Or, ces deux types de transferts peuvent augmenter en cas de difficultés financières.

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