Dette et déficit publics : la France n'a pas tenu ses engagements en 2007
Article de Mme Claire Guélaud lu le 29 mars 2008 sur le site du Monde
http://www.lemonde.fr/politique/article/2008/03/28/dette-et-deficit-publics-la-france-n-a-pas-tenu-ses-engagements-en-2007_1028425_823448.html#ens_id=991293
La France, décidément, a du mal avec ses finances publiques. Son déficit public a finalement atteint 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2007 au lieu des 2,4 % initialement prévus. La dette publique a augmenté de 5,2 %, à 1 209,5 milliards d'euros, après + 0,4 % en 2006. Elle s'élève à 64,2 % du PIB, après 63,6 % fin 2006.
Le taux de prélèvements obligatoires a diminué de 0,4 point, à 43,5 % du PIB, en raison de la progression modérée des impôts. L'Insee devait notifier, vendredi 28 mars, à Eurostat les chiffres du déficit et de la dette publics, bien supérieurs aux objectifs évoqués en juillet 2007 par Nicolas Sarkozy devant les ministres des finances de la zone euro. A l'époque, la stabilisation annoncée du déficit 2007 et l'effort de réduction promis pour 2008 avaient pourtant été jugés insuffisants.
Une fois cette notification faite et avant la présentation mi-avril des nouvelles prévisions économiques françaises pour 2008 et 2009, Bruxelles peut, à tout moment, adresser à la France une "recommandation" lui enjoignant de se conformer à sa trajectoire d'ajustement budgétaire. Cette injonction serait du plus mauvais effet à trois mois de la présidence française de l'Union européenne.
DÉRAPAGE DES COLLECTIVITÉS LOCALES
La réévaluation du déficit public en 2007 (+ 0,3 point) est substantielle. François Fillon l'avait minimisée en évoquant dans L'Express du 27 mars un montant "sans doute un peu supérieur" à ce qui était prévu. "La France est le seul pays de la zone euro qui ait un déficit public 2007 aussi élevé et qui ait dû procéder à une révision d'une telle ampleur", notait, jeudi 27 mars, Gilles Carrez (UMP), rapporteur général du budget.
Les deux tiers du dérapage s'expliquent par les collectivités locales : leurs dépenses ont augmenté de 6 %, alors que celles de l'Etat évoluent comme l'inflation. Le reste de la hausse est imputable à une nouvelle règle de comptabilité, qui réduit la possibilité offerte à l'Etat de ponctionner les excédents de l'assureur-crédit public, la Coface.
La révision annoncée de la croissance 2008, qui se situera "entre 1,7 % et 2 %" selon M. Fillon, augure mal de la suite. "Selon les nécessités de la communication gouvernementale ou présidentielle, on oscille entre la courte vue du budget annuel et la longue vue du paradis retrouvé à l'horizon 2012 : mais comment passe-t-on d'une situation à l'autre, quelles sont les étapes à respecter, comment réussir effectivement 2009 si l'on n'a pas tenu ses engagements en 2008 – par exemple –, cela on ne le sait pas", a noté, jeudi, le président PS de la commission des finances, Didier Migaud, qui n'exclut pas "une baisse significative des recettes".
Le gouvernement a longtemps feint de croire qu'il pourrait maintenir ses prévisions macroéconomiques et budgétaires alors que la Commission européenne, le FMI, l'OCDE et la majorité des conjoncturistes français disaient le contraire. Il devra procéder à des réajustements.
Pour éviter un dérapage trop fort du déficit 2008, l'exécutif devrait jouer sur la réserve de précaution de 7,2 milliards d'euros de crédits votée par le Parlement (0,5 % sur les dépenses de personnel et 6 % pour les autres crédits). "C'est au plus un milliard d'euros de la réserve qui a fait l'objet d'une annulation en 2007 et quelques dizaines de millions d'euros en 2006", a rappelé M. Migaud. Une annulation massive en 2008 constituerait "une modification en profondeur de la loi de finances initiale et, pour tout dire, l'application d'une vraie politique de rigueur", a-t-il ajouté.
Les ménages anticipent des lendemains difficiles. Leur moral, en baisse depuis juillet, a chuté d'un point en mars à - 36, selon l'Insee. Un nouveau record.