Pacs, enfants tardifs et hors mariage : la famille en 2008
Article de Mme Anne Chemin lu le 31 mars 2008 sur le site du Monde http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/03/31/pacs-enfants-tardifs-et-hors-mariage-la-famille-en-2008_1029256_3224.html#ens_id=628859
La famille des années 2000 est bien loin du modèle traditionnel des années 1950. Des mères plus âgées, des pacs qui se substituent de plus en plus souvent aux mariages et une majorité d'enfants qui naissent désormais hors mariage : telles sont ses nouvelles caractéristiques, décrites dans le bilan 2007 de l'Institut national d'études démographiques.
Des grossesses de plus en plus tardives. En 2007, les femmes qui ont mis un enfant au monde avaient en moyenne 29,9 ans. "La tendance observée depuis trente ans à avoir ses enfants toujours plus tard se poursuit", note le démographe Gilles Pison dans Population et sociétés (La Population de la France en 2007, mars 2008, no 443, www.ined.fr). En 1977, l'âge moyen des femmes à l'accouchement était de 26,5 ans. Aujourd'hui, plus d'un nouveau-né sur cinq (21,1 %) a une mère âgée de plus de 35 ans.
L'explosion du pacs. Créé en 1999, le pacte civil de solidarité, que Jacques Chirac jugeait "inadapté aux besoins de la famille", connaît un immense succès : alors que le mariage ne cesse de reculer, le nombre annuel de pacs a plus que quintuplé, passant de 20 000 en 2001 à plus de 100 000 en 2007. Cette progression est liée à l'augmentation des pacs signés par des couples homosexuels (+ 50 %), mais surtout au succès du pacs auprès des couples hétérosexuels : en six ans, leur nombre a été multiplié par six. "En 2007, on se rapproche d'un pacs pour deux mariages, remarque Gilles Pison. Le pacs hétérosexuel est-il en train de remplacer le mariage ?
" Le triomphe du pacs est sans doute lié au fait qu'il s'est peu à peu rapproché du mariage : en 2005, les avantages fiscaux accordés aux pacsés ont été alignés sur ceux des couples mariés. Sa souplesse - il peut être dissous à la suite d'une simple déclaration écrite - semble en outre correspondre aux demandes des couples d'aujourd'hui. Pendant la campagne électorale, Nicolas Sarkozy avait reconnu que la droite s'était fourvoyée, en 1999, en combattant cette nouvelle forme d'union. "Nous sommes passés à côté du pacs", regrettait-il dans Têtu. La banalisation des naissances hors mariage. En 2007, près de la moitié des bébés sont nés au sein d'un couple non marié, contre seulement 6 % en 1970. "Ces naissances, alors rares et mal perçues, étaient classées officiellement comme "naturelles" ou "illégitimes", souligne Gilles Pison. Mais la norme sociale a changé et elles sont aujourd'hui à parité avec les naissances au sein de couples mariés."
Le droit a pris en compte ce bouleversement : en 1972, le législateur a proclamé l'égalité des filiations légitimes et naturelles et, en 2001, l'égalité successorale des enfants a été garantie. Cette évolution a été parachevée en 2005 par une ordonnance du gouvernement de Dominique de Villepin, qui a fait disparaître les mots "légitime" et "naturel" du code civil. Les naissances hors mariage ne sont plus le signe d'une absence de père : en 2005, plus de 80 % des enfants nés hors mariage ont été reconnus par leur père dès la naissance. "Les naissances hors mariage surviennent désormais le plus souvent au sein de couples stables, conclut M. Pison. Avec la banalisation des naissances de couples non mariés, la reconnaissance paternelle est devenue la règle."