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Prix du pétrole et crise de la dette : quels effets sur la croissance en zone euro ?
Sommaire
· Résumé
· Fin 2010, les prix du pétrole et de l'ensemble des matières premières s'envolent
· ... mais elle affecte tous les pays qui engagent une consolidation budgétaire
· Un chiffrage qui repose sur des hypothèses de stabilité des comportements
Résumé
· Après 2 % de croissance en 2010, l'activité de la zone euro a ralenti en 2011 (+ 1,4 %) et se contracterait en 2012 (- 0,5 % prévu dans le dernier Point de conjoncture de l'Insee). Deux facteurs particuliers auraient freiné l'activité ces deux dernières années : la hausse des prix du pétrole et des matières premières et la crise des dettes souveraines en zone euro. Le modèle multinational NiGEM permet d'estimer les effets de ces chocs sur les principales économies de la zone euro, en tenant compte des canaux commerciaux.
· La hausse des prix du pétrole et des matières premières aurait ainsi réduit l'activité d'un quart de point de produit intérieur brut (PIB) en zone euro (un peu plus en France ou en Allemagne), aussi bien en 2011 qu'en 2012.
· La crise des dettes souveraines en zone euro s'est manifestée par l'augmentation des taux souverains dans les pays du Sud de l'Europe. Ceci pénaliserait l'investissement via la progression associée des taux privés. La hausse des taux ferait ainsi perdre 0,9 et 1,4 point de PIB en 2012 à l'Italie et à l'Espagne. En revanche, les mouvements de taux auraient un peu soutenu la croissance en France et surtout en Allemagne, leurs dettes publiques ayant statut de valeur refuge.
· Face aux hausses des taux souverains, les pays européens ont engagé une consolidation budgétaire ambitieuse. À court terme, de tels ajustements budgétaires ont un effet négatif sur l'activité, car ils pèsent sur la demande. On estime pour 2012 qu'ils auraient réduit la croissance de plus d'un point de PIB en Italie et en Espagne et de 0,8 point en France. Les différents plans de consolidation auraient eu surtout des effets internes aux pays dans lesquels ils sont menés et peu d'influence sur la croissance des autres pays de la zone.
· Au total, en France, l'ensemble de ces chocs aurait freiné l'activité à hauteur de 0,7 et 1,1 point de croissance en 2011 et 2012, l'effort de consolidation y contribuant pour moitié en 2011 et aux trois quarts en 2012.
· Ces chiffrages sont indicatifs. Certains mécanismes ne sont pas intégrés dans le modèle. Par ailleurs, les plans de consolidation budgétaire ont pu, dans certains pays, avoir l'effet bénéfique d'empêcher ou freiner la hausse des taux d'intérêt : leur effet restrictif serait donc moindre. En outre, le modèle utilisé ne permet pas de prendre en compte très finement la composition des ajustements budgétaires, comme par exemple des hausses d'impôt ciblées.
· Ce texte reprend, en les actualisant, les principaux éléments d'un dossier de la Note de Conjoncture publiée par l'Insee en juin 2012.
Fin 2010, les prix du pétrole et de l'ensemble des matières premières s'envolent
Après un an de stabilité, le prix du pétrole a fortement augmenté à partir de l'été 2010 : le prix du Brent de la mer du Nord est passé de 75 dollars au troisième trimestre 2010 à 115 dollars au deuxième trimestre 2011. De même, les matières premières agricoles et industrielles hors énergie se sont fortement renchéries à partir de l'été 2010. Tous ces prix sont ensuite restés en 2012 à des niveaux historiquement élevés.
La hausse des prix du pétrole et des matières premières constitue pour les pays importateurs nets un prélèvement sur les agents domestiques. C'est un choc d'offre négatif car les coûts de production augmentent ; ils alimentent ensuite l'inflation, car les entreprises essaient de les répercuter sur leurs prix de vente. C'est aussi un choc de demande négatif : l'inflation importée entraîne une baisse de la consommation réelle.
En 2011 comme en 2012, l'Allemagne et la France, comme la zone euro dans son ensemble, auraient ainsi été pénalisées par l'augmentation des prix du pétrole et des matières premières, avec une intensité variant entre - 0,3 et - 0,5 point de croissance. La hausse du prix du pétrole aurait eu un effet plus marqué que celle des autres matières premières.
Cette estimation, faite à l'aide du modèle NIGEM (encadré), considère la politique monétaire comme figée. En réalité, il est possible que la Banque centrale européenne ait moins baissé ses taux d'intérêt directeurs à cause de l'inflation importée, ce qui aurait eu un effet négatif sur l'activité. Les chiffres présentés dans ce tableau seraient alors des minorants des effets totaux d'une hausse des prix du pétrole et des matières premières. …/…