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médiation : évaluation (17 08 2009)

Face à la conflictualité et à la violence, quelle efficacité de la médiation ?

Extraits d’un rapport de Mme Laetitia Brabant-Delannoy,  Département Questions sociales

publié en juillet 2009 (Note de veille n°147) sur le site du Centre d’Analyse Stratégique (cliquer ici pour accéder au site du CAS ou au texte intégral de la note et du rapport)

 

http://www.strategie.gouv.fr/article.php3?id_article=1026

http://www.strategie.gouv.fr/IMG/pdf/NoteVeille147.pdf

 

 

Présentée comme un mode alternatif de résolution des conflits au sein des couples, des familles, comme dans les écoles et les quartiers, la médiation est particulièrement mise en avant par les pouvoirs publics. Des législations récentes la favorisent, des décrets l’organisent, plusieurs rapports appellent à sa généralisation. Considérée comme la panacée par certains, elle suscite également méfiance et hostilité.

 

La question du développement, voire de la généralisation, de la médiation pose au préalable celle de son efficacité face à la conflictualité et à la violence. Les éléments d’évaluation existants en France sur quatre types de médiations (familiale, scolaire, sociale et pénale) confirment la plupart des attraits mis en avant par ses promoteurs : prévention des tensions, apaisement des parties et meilleure résolution de conflits, responsabilisation des acteurs, sécurisation des espaces et des personnes et renforcement de la cohésion sociale. Ils signalent également les risques inhérents aux processus de médiation (renforcement de certaines inégalités entre les parties ou d’accès à la justice, communautarisation de la gestion de conflits).

 

L’ensemble de ces considérations mérite d’être étayé et invite à poursuivre et à développer la démarche d’évaluation encore insuffisante aujourd’hui.

 

Introduction

Les médiations sociale, familiale, pénale, scolaire se sont développées en France dans les années 1980-1990 sur la base d’initiatives de la société civile, des collectivités locales et également de certains professionnels (magistrats, avocats, travailleurs sociaux, personnel éducatif, psychologues). Celles-ci sont nées du constat des limites des actions sociales et éducatives traditionnelles et de la justice elle-même, face aux évolutions sociétales et à l’apparition de besoins sociaux insuffisamment couverts ou émergents (gestion des séparations familiales, de nouvelles formes de conflictualité et de violences au sein des quartiers, entre les générations, entre les communautés).

 

De natures très hétérogènes et informelles à l’origine, les médiations étudiées présentent aujourd’hui davantage d’unité1. Un effort a été accompli ces dernières années pour en définir le processus, circonscrire son champ d’action et établir des principes directeurs communs à toutes les formes de médiation. Ainsi, la médiation se définit comme un processus « reposant sur la responsabilité et l’autonomie des participants, dans lequel un tiers – impartial, indépendant, sans pouvoir de trancher ou de proposer (sans pouvoir décisionnel ou consultatif) avec la seule autorité que lui reconnaissent les médiés – favorise par des entretiens confidentiels l’établissement, le rétablissement du lien social, la prévention ou le règlement de la situation. Le mouvement, encore en cours d’institutionnalisation de la médiation, résulte notamment de l’intérêt manifeste des pouvoirs publics tant nationaux qu’internationaux pour ces pratiques depuis une quinzaine d’années.

 

Plusieurs rapports récents proposent de généraliser la médiation dans certains contentieux, situations ou lieux, voire, comme l’ont fait quelques pays étrangers4, de rendre systématique et obligatoire la rencontre de médiation avant la saisine du juge. Avant de se prononcer sur l’opportunité et les conditions éventuelles de cette généralisation en France, il apparaît nécessaire de s’interroger sur l’efficacité de la médiation nouveau mode d’intervention sociale et judiciaire dans les situations de conflictualité et de violence. Trois milieux semblent particulièrement confrontés à ces tensions : l’école, la famille, la rue.

 

À partir des éléments d’évaluation existant sur les différents dispositifs de médiation familiale, scolaire, pénale et sociale, il s’agira d’analyser l’efficacité de la médiation comme mode de résolution des conflits, d’apaisement des parties (couples, délinquant/victime, voisins, etc.), de prévention de la violence.

L’engouement actuel pour ces dispositifs se justifie-t-il ? Quels gains de la médiation pour les médiés, pour la société dans son ensemble et pour le système social et judiciaire ?

 

... /…

 

Conclusion

La démarche d’évaluation n’en est ici encore qu’à ses débuts et mérite d’être poursuivie et approfondie, afin de mesurer précisément les gains socioéconomiques de ce mode de résolution des conflits. Si certains rapports recommandent la création d’un observatoire de la médiation30, il peut être envisagé dans un premier temps de mettre en place une mission ou un comité national d’évaluation de la médiation. Celui-ci serait chargé d’établir une méthodologie commune d’évaluation (fixation d’indicateurs qualitatifs et quantitatifs à court, moyen et long terme, comparaison avec un groupe témoin) et d’impulser cette logique dans tous les secteurs. Un observatoire permettrait de suivre et de valoriser à plus long terme les évaluations qui seraient menées par les services d’étude des différents ministères et institutions concernés. Ce travail devrait également s’étendre à tous les types de médiation y compris économique, voire à l’arbitrage, comme instruments alternatifs de résolution des conflits entre entreprises.

 

À l’heure où certains évoquent une généralisation de la médiation, on peut néanmoins déjà conclure qu’en dépit de ses vertus, la médiation n’a ni la vocation ni la capacité de prévenir et réguler tous les différends, et de devenir le remède universel face à la conflictualité croissante des rapports sociaux et à l’encombrement des tribunaux. Elle constitue un mode de régulation efficace dans la plupart des conflits de proximité et apporte des réponses innovantes à des situations critiques. Néanmoins, elle ne peut s’inscrire qu’en complément des interventions traditionnelles. Pour certains conflits, le recours à la justice restera l’ultime moyen de protéger le plus vulnérable. Et en amont, la médiation sera d’autant plus féconde qu’elle sera un révélateur des dysfonctionnements sociétaux et qu’elle impulsera des actions préventives, voire des réformes de fond.

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