Question de sénateur et réponse ministérielle publiées le 18 juillet 2019 sur le site du Sénat (cliquer ici pour accéder au site du Sénat)
http://www.senat.fr/questions/base/2019/qSEQ190711292.html
Question écrite n° 11292 de Mme Frédérique Gerbaud (sénatrice de l’Indre)
Mme Frédérique Gerbaud interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'éventualité d'un déremboursement des médicaments homéopathiques, la haute autorité de santé venant d'émettre un avis négatif sur leur efficacité. Selon un sondage de l'institut Odoxa paru en janvier 2019, 74 % de nos concitoyens ayant recours à l'homéopathie sont convaincus de ses bienfaits.
De fait, elle est bénéfique aux patients, même si certains considèrent que les mécanismes physico-chimiques sur lesquels repose son action ne sont parfaitement élucidés. Au demeurant, l'argument de l'absence de preuves scientifiques de l'efficacité de l'homéopathie est faux : de telles études existent en nombre, elles sont rigoureuses, fouillées et reconnues et ne peuvent se voir opposer de simples partis-pris hostiles. En asseyant aux yeux du patient la valeur et le sérieux de son traitement, le remboursement de la prescription homéopathique joue un rôle important dans la dimension psychologique, elle-même essentielle au succès de la cure. Dans le même ordre d'idées, la liberté de choix du patient, elle aussi impliquée dans le succès du traitement, est également à prendre en considération. Toujours sur le plan de l'efficacité curative, on ne saurait éluder la forte spécificité des traitements homéopathiques, dont l'action s'exerce au moins autant sur un terrain d'ensemble, celui de l'état général du patient, que de manière ciblée sur une pathologie donnée : la prise en charge globale du patient est le maître-mot de la démarche homéopathique. Or, l'approche classique retenue dans la plupart des études n'est pertinente que pour les médicaments allopathiques : un traitement précis pour une affection précise.
À cet égard, la cure homéopathique ne prétend jamais se substituer au traitement classique d'une pathologie donnée. Elle vient par nature en complément, en accompagnement de ce dernier dans le but d'améliorer une ou plusieurs dimensions de l'état général du patient, et ce au bénéfice même de l'efficience du traitement classique. De plus, la prescription homéopathique est le fait de médecins, dont le choix sur les traitements est parfaitement éclairé et fondé sur des diagnostics rigoureux. C'est sur cette base qu'en France, un médecin généraliste sur trois prescrit quotidiennement des médicaments homéopathiques. Alliée – jamais concurrente – de la médecine classique, la prescription homéopathique permet également de réduire de manière appréciable l'administration de certains principes actifs dont l'abus est nocif : division par deux, en moyenne, de la consommation d'antibiotiques, par deux de celle d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens et par plus de trois de celle de psychotropes.
Au plan économique et social, le déremboursement porterait un coup très dur aux fabricants et à leurs employés. 1 000 emplois seraient ainsi directement menacés chez Boiron, leader mondial du secteur, soit 40 % des salariés du groupe en France, avec un effet négatif immédiat sur les sous-traitants et le dynamisme économique des territoires concernés. Enfin, le déficit des régimes sociaux ne saurait être comblé par un déremboursement de l'homéopathie : à son niveau actuel de remboursement (30 %), elle représente pour l'assurance maladie un coût annuel de 86 millions d'euros, soit 0,29 % des 29,7 milliards d'euros de remboursements de médicaments.
Pour l'ensemble de ces motifs, elle lui demande si la plus grande prudence ne serait pas de mise avant de décider d'un déremboursement partiel au total de l'homéopathie qui, au final, pourrait s'avérer préjudiciable en termes de santé publique sans générer pour autant d'économies significatives.
Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée dans le JO Sénat du 18/07/2019 p. 3903
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